Les développements dramatiques sur la scène actuelle au Moyen-Orient, ont été dictés par les réalités du terrain syrien et ses implications, depuis la libération d’Alep jusqu’à la libération du sud syrien. Sans oublier tout ce qui a été soulevé autour de la bataille d’Idlib, engagée politiquement mais suspendue militairement.
Outre l’impasse et la paralysie politiques imposées à tout ce que Washington et ses alliés ont tenté d’exploiter et d’utiliser depuis Genève1 et sa série, il y a eu la série d’alliances internationales, les documents des cinq et autres, ainsi que le nouveau positionnement de la Turquie, depuis Astana1 au dernier accord de Sotchi, qui met ce pays en opposition avec le projet américano-occidental en Syrie. Alors qu’Ankara en était la locomotive, …
Tout cela a incité Washington à recourir à de nouvelles politiques qui consistent à « enflammer » les terrains et à renverser les tables contre tous les piliers de ce que l’on appelle désormais l’axe de la lutte contre le terrorisme dans la région. Elle procède en mélangeant toutes les cartes et en poussant à une nouvelle vague de conflits, qui les englobent tous, sans exception, afin de créer de nouveaux atouts qui prolongeraient sa présence dans la région le plus longtemps possible, et améliorer de la sorte ses conditions pour négocier sa sortie qui, plus qu’à ses partenaires, lui semble devenir inévitable… !
Ceci s’est illustré par plusieurs réorientations qualitatives engagées simultanément, en termes de temps et non de lieu, et dont les plus importantes sont :
– Pousser le « fanatisme » de séparatistes kurdes à s’opposer à l’armée syrienne à Qamichli, en Syrie orientale.
– Fabriquer les événements de Bassora et manipuler ses pantins pour bloquer la réalisation des droits constitutionnels et gouvernementaux en Irak.
– La guerre du Yémen et ses développements quotidiens, avec le soutien militaire et politique explicite de Washington, et les tentatives constantes de justifier l’action bilatérale saoudo-émiratie contre le peuple yéménite, dont la dernière est la déclaration du secrétaire d’Etat, Mike Pompeo, en date du 22 septembre, et selon lequel la paix au Yémen était « possible » si l’Iran cessait de soutenir les milices houthies « putschistes » en leur fournissant des armes et des roquettes qu’elles lancent sur « le territoire saoudien » depuis le Yémen …
– L’opération terroriste menée par ses mercenaires dans la ville d’Ahvaz en Iran durant la matinée du samedi 22 de ce mois, à laquelle Washington a apporté un soutien direct et solidaire à ses partenaires tant en Arabie Saoudite qu’aux Émirats Arabes Unis, d’autant que ce type de pénétration sécuritaire est marqué par les empreintes américaines.
– La couverture des violations israéliennes des règles d’engagement dans la région, et la justification de ses attaques répétées contre les positions syriennes sous prétexte de frapper la présence iranienne et d’empêcher le transfert d’armes sophistiquées au Hezbollah, bien que ce soit « accompli, fini et plié » selon les affirmations de son secrétaire général Sayed Nasrallah, lors de sa dernière apparition du 19 septembre; jusqu’à franchir les lignes rouges russes.
En effet, l’abattage de l’avion Il-20 dans la soirée du 17 septembre a provoqué une réaction russe inattendue, en particulier pour Israël.
Cette réaction s’est traduite par l’annonce du ministre de la Défense de la détermination de son pays à fournir à la Syrie le système de défense « S-300″, ainsi que le système de guerre électronique Krasukha, dans un court délai, exprimant sa conviction que les mesures prises «refroidiront » les têtes brûlées et « décourageront » les actes «inconsidérés » qui constituent une menace pour les militaires russes.
Fournir ces systèmes à l’armée syrienne menace d’une « escalade dangereuse » dans la région et constitue une « grave erreur », est l’avis du conseiller à la sécurité nationale John Bolton, l’un des plus importants faucons de l’administration américaine actuelle…
L’administration américaine a-t-elle enfin lu et interprété la nouvelle situation au Moyen-Orient ? A-t-elle réalisé que rester face à la Fédération de Russie, selon l’équation qu’elle essaie de consacrer, ne lui est pas favorable ? D’autant plus que ses missiles «intelligents » se sont avérés inefficaces face aux vieux missiles de Moscou, «perfectionnés en Syrie », depuis les frappes limitées en avril dernier.
A quoi sert sa présence face au système S-300 ? Celui-ci fera bientôt basculer l’avantage à l’armée syrienne qui aura le dernier mot; ce qui ne fera qu’aggraver l’échec américain en cas de nouvelles frappes, longtemps promises, contre des forces ou des positions syriennes, décidées avec leurs alliés à libérer Idlib.
En conséquence, et selon un rapport publié par le Wall Street Journal le 26 de ce mois, qui cite certains responsables militaires américains, « les Etats-Unis retirent une partie de leurs batteries et missiles antiaériens du Moyen-Orient » qui se trouvent en Jordanie, au Koweït et au Bahreïn. Le journal américain justifie la décision du Pentagone de «redéploiement » de ces systèmes et indique la « réorientation de ses efforts » loin des conflits « prolongés » du Moyen-Orient… !
Plus tôt, le 25 de ce mois, selon l’agence de presse russe Spoutnik qui a cité des sources bien informées, un accord a été conclu entre les parties russe et américaine sur le sort des « réfugiés du camp Rokbane » et des groupes armés associés à la base américaine Al-Tanf. Ces sources estiment que le « démantèlement » du camp en question et le retrait des groupes armés des environs de la base Al-Tanf sont les dernières étapes qui précéderont le « retrait » américain définitif de la région d’Al-Tanf.
En conclusion, et sans tenir compte des analyses qui ont suivi ces démarches américaines déclarées, affirmant qu’elles ne visent qu’à «traire » les Etats du Golfe et leur soutirer plus d’argent, nous estimons que, même si elles sont avérées, elles ne sont pas motivées. Washington peut prendre ce qu’il veut de ces pays et sans préliminaires, et ce ne sont pas les exemples qui manquent.
Nous pensons que l’administration américaine n’a pas ménagé ses efforts en enflammant davantage cet Orient, dans le seul but d’épuiser la force russe, pour l’enfoncer dans de nouveaux bourbiers et l’entrainer dans de nouveaux champs de bataille. Mais les décisions russes, « erronées » et « dangereuses », selon les prétentions de Washington, semblent avoir l’effet d’un boomerang pour l’Américain qui se trouve dans la position du « saigné » au lieu d’être le « saigneur».
Par Mahran Nizar Ghatrouf : journaliste syrien
Sources : Katehon ; traduit par Rania Tahar ;Réseau international