L’ONU et des ONG refusent de travailler avec la Fondation humanitaire pour Gaza (GHF) cette organisation créée de toutes pièces par les Etats-Unis et Israël pour distribuer de l’aide alimentaire dans la bande de Gaza, estimant que son plan de fonctionnement n’est pas conforme aux « principes de base » de l’aide humanitaire « d’impartialité, de neutralité et d’indépendance ».
Gérée par des agents de sécurité américains sous contrat, avec des troupes israéliennes à proximité, elle est officiellement privée et dotée d’un financement opaque.
« Ce que nous voyons est chaotique, tragique. On voit des centaines de milliers de personnes qui se démènent dans des conditions particulièrement indignes et dangereuses pour accéder à un tout petit peu d’aide », constate Ciarán Donnelly, chargé des situations de crise au sein de l’ONG International Rescue Committee (IRC).
Il appelle à travailler avec les écoles ou les dispensaires pour distribuer l’aide là où les gens en ont besoin, et pas dans des centres militarisés.
« Si l’on veut vraiment distribuer l’aide de manière transparente, responsable et efficace, il faut utiliser l’expertise et l’infrastructure des organisations humanitaires qui le font depuis des décennies », estime-t-il.
Selon lui, IRC dispose de 27 tonnes d’aide dont l’entrée à Gaza est empêchée par Israël, les organisations humanitaires affirmant depuis des mois que d’énormes quantités sont bloquées.
« Pourquoi laisser l’armée israélienne décider? »
« Pourquoi voudrions-nous laisser l’armée israélienne décider comment, où et à qui nous donnons notre aide dans le cadre de sa stratégie militaire visant à déplacer les gens dans Gaza ? « , abonde le secrétaire général du Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC) Jan Egeland.
« C’est une violation de tout ce que nous défendons. C’est la ligne la plus rouge que nous ne pouvons pas franchir », ajoute cet ancien chef des opérations humanitaires des Nations unies.
Les premières distributions de nourriture de la GHF ont été très compliquées, des milliers de personnes affamées se ruant sur les centres de distribution, provoquant des scènes de chaos au cours desquelles des dizaines de personnes ont été blessées.
« Israël ne connait aucune limite »
Alors que l’armée israélienne nie avoir tiré et la GHF affirme qu’il n’y a pas eu de blessés, Francesca Albanese, la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans le territoire palestinien occupé, a assuré qu’elle a ouvert le feu sur les Palestiniens.
« En quelques heures, des images et des vidéos terrifiantes ont émergé de Gaza, montrant le fonctionnement de ce mécanisme, notamment les forces israéliennes ouvrant le feu sur des civils palestiniens non armés. Il semble qu’Israël ne connaisse aucune limite », a-t-elle déclaré vendredi.
« Dissimuler les atrocités israéliennes »
Albanese qui accuse Israël pour son utilisation systématique des mécanismes humanitaires pour dissimuler et faciliter de graves atrocités dans la bande de Gaza a averti dans un communiqué de presse, que « la communauté internationale doit mettre un terme à l’utilisation délibérée et continue par Israël des cadres humanitaires pour masquer et perpétuer les atrocités à Gaza ».
Elle a décrit l’approche d’Israël comme une forme de « camouflage humanitaire brutal » qui lui permet de maintenir le contrôle de l’enclave assiégée tout en privant délibérément sa population d’une aide vitale.
« Nous continuons d’être témoins de conséquences horribles, lorsqu’Israël prétend promouvoir des solutions humanitaires sous prétexte de renforcer son emprise sur Gaza », a-t-elle déclaré.
Albanese a exprimé son inquiétude face à la « stratégie délibérée d’Israël visant à occulter les atrocités », notamment le déplacement de civils, le bombardement de zones déjà bombardées, l’incendie de personnes vives et la défiguration de survivants – des actions qui, selon elle, sont masquées par le langage de l’aide pour détourner l’attention de la responsabilité juridique.
En tant que puissance occupante, a souligné Albanese, Israël a l’obligation d’autoriser et de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire. « L’accès à l’aide ne doit pas être conditionné à des considérations politiques ou militaires », a-t-elle insisté.
Faisant référence à l’aide limitée qui est entrée à Gaza après un siège israélien de 11 semaines, elle a déclaré que ce n’était « rien d’autre qu’une goutte d’eau dans l’océan » et a décrit la famine d’une population entière suivie par les tirs sur des civils mendiant de la nourriture comme une « cruauté systématique ».
900 camions en deux semaines
Ce samedi, le commissaire général de l’UNRWA, Philippe Lazzarini, a affirmé que le volume d’aide envoyée à Gaza n’est pas proportionnel à l’ampleur de la tragédie humanitaire que vit la bande.
Vendredi, il a annoncé que 900 camions d’aide avaient pénétré à Gaza au cours des deux dernières semaines, ce qui ne représente que 10% des besoins quotidiens des habitants de la bande, ajoutant que l’arrêt de la famine actuelle à Gaza nécessite une volonté politique.
Il a expliqué que pendant le précédent cessez-le-feu, l’UNRWA et d’autres organisations avaient réussi à faire entrer de 600 à 800 camions d’aide par jour.
Source: Agences