Les combats « ont cessé » dimanche à Soueïda, selon le gouvernement syrien, après la reprise de cette ville du sud du pays par les groupes druzes et le redéploiement des forces de l’Etat dans la région, en proie à des violences intercommunautaires qui ont fait près de mille morts en une semaine.
« Soueïda a été évacuée de tous les combattants tribaux, et les combats dans les quartiers de la ville ont cessé », a écrit sur Telegram le porte-parole du ministère syrien de l’Intérieur Noureddine Al-Baba.
Un communiqué du Conseil des tribus et clans syriens a confirmé son engagement à respecter le cessez-le-feu et assuré que « ses combattants ont quitté la ville » tout en mettant en garde « qu’ils riposteront à toute violation de la part des groupes hors-la-loi », à l’adresse des factions druzes.
Mais des sites syriens druzes ont affirmé « qu’un grand nombre de cellules dormantes des milices extrémistes sont toujours dans la ville et le gouvernorat en général ».
Les violences entre groupes druzes et bédouins sunnites qui ont éclaté le 13 juillet dans la région de Soueïda, dans le sud de la Syrie, ont fait 940 morts, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), une organisation basée à Londres qui s’appuie sur un vaste réseau de sources à travers le pays. Près de 87.000 personnes ont été déplacées par les combats, d’après l’Organisation internationale pour les migrations.
Le gouvernement du président intérimaire Ahmad al-Charaa avait déjà déployé ses forces mardi à Soueïda. Il les avait toutefois retirées après des raids israéliens sur plusieurs cibles du pouvoir au sud et à Damas.
« L’autorisation » de Netanyahu
Samedi, après l’annonce par l’envoyé américain Tom Barrack d’un accord entre le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le président syrien Ahmad al-Charaa, le pouvoir syrien a annoncé un cessez-le-feu dans la province de Soueïda et a commencé à y redéployer des forces.
La radio de l‘armée israélienne avait alors assuré « qu’Israël a accepté d’autoriser un accès limité des forces de sécurité intérieure au gouvernorat de Soueïda dans les prochaines 48 heures. »
Plusieurs journalistes israéliens ont souligné qu’une telle décision contredit la politique officielle annoncée par Netanyahu concernant la démilitarisation du territoire syrien au sud de Damas. Netanyahu a souligné à plusieurs reprises qu’Israël n’autoriserait pas la présence de groupes armés ou de forces militaires syriennes dans la zone située entre Damas et le plateau du Golan.
Samedi, le ministre israélien de la Défense, Yisrael Katz, a affirmé que le sud de la Syrie restera démilitarisé. Israël « ne fait pas confiance au président syrien », a-t-il déclaré, ajoutant que « les groupes qui ciblent les Druzes aujourd’hui cibleront Israël demain », selon le Jerusalem Post.
Des affrontements après l’annonce de cessez-le-feu
Mais les affrontements se sont poursuivis dans la journée malgré l’annonce du cessez-le-feu.
Dans un quartier de la ville, des combattants tribaux, certains au visage masqué, tiraient avec des armes automatiques, selon des images de l’AFP.
Un correspondant de l’AFP a vu des dizaines de maisons et de voitures brûlées et des hommes armés mettre le feu à des magasins après les avoir pillés.
L’un des combattants avait le front ceint d’un bandeau noir portant la profession de foi de l’islam. Un autre brandissait des ciseaux, utilisés pour taillader les moustaches des vieux druzes, insulte suprême pour ce peuple.
Dans la soirée, l’OSDH a assuré que les combattants druzes ont chassé leurs rivaux de la ville de Soueïda.
« Les combattants tribaux se sont retirés de Soueïda samedi soir », après une contre-offensive druze, mais continuaient à bombarder la ville après leur retrait, a indiqué l’OSDH.
Bassem Fakhr, le porte-parole du Mouvement des hommes de la dignité, l’une des deux principales factions druzes armées, a confirmé à l’AFP qu’il « n’y a(vait) plus de présence des bédouins dans la ville ».
Samedi, la présidence spirituelle de la communauté druze a renouvelé son appel à « une protection internationale directe pour les Druzes en Syrie » accusant « les gangs attaquants de commettre des violations et des crimes honteux pour l’humanité. »
La ville de Soueïda ce dimanche
Empêcher l’arrivée des « jihadistes violents »
Le secrétaire d’Etat américain Marco Rubio a exigé samedi du gouvernement syrien qu’il empêche l’arrivée de « jihadistes violents » dans le sud du pays.
Les autorités syriennes doivent utiliser « leurs forces de sécurité pour empêcher l’ISIS (Daech) et autres jihadistes violents d’entrer dans la région et d’y perpétrer des massacres », a écrit M. Rubio sur le réseau social X.
Rubio a exhorté les autorités syriennes à « demander des comptes et traduire en justice toute personne coupable d’atrocités, y compris dans leurs propres rangs ».
Ce dimanche, l’envoyé spécial des États-Unis en Syrie, Tom Barrack, a appelé toutes les factions syriennes à déposer immédiatement les armes, à cesser les hostilités et à abandonner le cycle de la vengeance tribale, soulignant que la Syrie « se trouve aujourd’hui à un tournant critique, où la paix et le dialogue doivent prévaloir ».
Dans un message publié sur la plateforme X, Barak a ajouté que la décision du président Donald Trump de lever les sanctions contre la Syrie était « une étape préliminaire qui a offert au peuple syrien l’occasion de surmonter des années de souffrances et d’atrocités inouïes ».
Il a averti que « cette ambition fragile est désormais éclipsée par un choc profond », notant que « les actes brutaux commis par les factions belligérantes sur le terrain sapent l’autorité du gouvernement et déstabilisent tout semblant d’ordre ».
Des druzes « israéliens » mobilisés
Selon la chaine israélienne Kan, « près de 2000 druzes israéliens dont des soldats réservistes dans l’armée d’occupation ont signé une pétition dans laquelle ils déclarent vouloir rejoindre les combats en Syrie si les attaques contre les druzes ne cessent pas ».
Les druzes « israéliens » ont envoyé des quantités importantes de vivres à Soueïda, a rapporté le site druze SYRDOC.
Le chef spirituel de la communauté druze en « Israël », Muwafaq Tarif, a déclaré que « l’accord de cessez-le-feu à Soueïda doit tenir », notant que « le temps est venu pour tous les Syriens de s’unir ».
Exprimant son « espoir que le nouveau gouvernement syrien accueille tous ses citoyens, en particulier les minorités », Tarif a poursuivi : « Des pourparlers sont en cours sous la médiation des États-Unis entre les dirigeants israéliens et syriens pour apporter la paix dans la région. »
Déploiement israélien
Pendant que les affrontements intercommunautaires faisaient rage samedi, les forces d’occupation israélienne se sont déployées massivement dans la zone du parc du plateau du Golan, près du barrage de Mantara, dans la campagne centrale de Quneitra au sud de la Syrie.
« Le 18 juillet, dans la route reliant la ville de Quneitra à l’ouest du gouvernorat, un rond-point connu localement sous le nom de « rond-point Al-Alam » a été supprimé. Des véhicules militaires israéliens ont presque entièrement rasé le site, ne laissant qu’un étroit passage permettant une circulation limitée », a rapporté l’OSDH.
Le délégation gouvernementale interdite à Soueïda
Selon le site Souwaydaa 24, le chef spirituel druze cheikh Hekmat al-Hejeri a refusé l’entrée de la délégation gouvernementale qui accompagnait le convoi de l’aide dans le gouvernorat de Soueïda et n’a autorisé que l’entrée du Croissant rouge.
Cette information a été confirmée par le ministère syrien de la Santé qui a assuré que les convois de l’aide ont dû rebrousser chemin vers Damas en raison de l’interdiction d’al-Hejeri.

Le ministre de la Santé Mosaab al-Ali qui accompagnait ce convoi de 20 véhicules qui transportaient des quantités de médicaments et de fournitures de premiers secours n’a pas pu entrer non plus. Il avait indiqué le 16 juillet dernier que l’aviation israélienne entravait l’entrée d’un convoi médical en bombardant tous les véhicules qui bougeaient.
Source: Divers