Angela Merkel, Shinzo Abe, Wang Qishan: les leaders se sont livré mercredi à Davos à une défense du multilatéralisme, face à la montée des populismes mais aussi aux critiques particulièrement audibles cette année lors de ce rendez-vous de l’élite économique mondiale.
« Non je ne crois pas que les personnes au pouvoir vont agir ou faire quoi que ce soit ici, parce que pourquoi le feraient-ils? Il faut faire en sorte qu’ils agissent. (…) Ils savent exactement quelles valeurs inestimables ils ont sacrifiées pour continuer à gagner des sommes inimaginables », a dit à l’AFP Greta Thunberg.
Cette Suédoise de 16 ans, dont la mobilisation contre le changement climatique inspire des manifestations de jeunes partout dans le monde, a fait une arrivée remarquée dans la station de ski huppée des Alpes suisses.
De nombreuses caméras l’attendaient sur le quai de la gare, après son voyage de trente-deux heures.
Le Premier ministre japonais Shinzo Abe, lui aussi arrivé en train, a lui appelé « tout le monde à ranimer la confiance dans le système du commerce international ».
Le Premier ministre, dont le pays préside cette année le G20, veut « retrouver l’optimisme », alors que l’ambiance à Davos est plombée par le ralentissement de l’économie mondiale, les frictions commerciales et la montée des populismes.
Après lui, la chancelière allemande Angela Merkel s’est livrée à une défense méthodique du multilatéralisme, un principe décrié par le Brésilien Jair Bolsonaro.
« Il y a (dans le monde) un courant qui dit je vais d’abord m’occuper de mes propres intérêts, et au final tout le monde se portera bien. J’en doute fort », a dit Mme Merkel.
Cette physicienne de formation, « attachée aux institutions multilatérales », a par exemple vanté la récente redéfinition du kilogramme par la Conférence générale des poids et mesures comme un succès de la coopération internationale.
Le vice-président chinois Wang Qishan a lui assuré mercredi à Davos que la Chine et les Etats-Unis étaient « indispensables l’un à l’autre », alors que les deux mastodontes mènent des négociations commerciales à haut risque.
Wang Qishan a par ailleurs fait valoir que la croissance chinoise, tombée en 2018 à son plus bas niveau en presque trente ans, n’en restait pas moins « significative », avec 6,6%.
Le Premier ministre espagnol, le socialiste Pedro Sachez a lui estimé que « le nationalisme, le populisme, ne sont plus seulement le problème d’un pays ou d’un continent: ils sont les principaux défis que rencontrent les démocraties. »
Le chef du gouvernement populiste italien, Giuseppe Conte, a plaidé en termes plus vagues pour un « nouvel humanisme » et une Europe « du peuple, par le peuple et pour le peuple ».
Le Royaume-Uni s’est lui employé à rassurer sur les conséquences du Brexit. Le pays est « ouvert pour les affaires », a assuré le ministre au Commerce extérieur Liam Fox.
Londres s’offre à Davos une gigantesque affiche clamant que « le libre-échange, c’est super », une initiative suscitant nombre de commentaires ironiques dans les rues verglacées de Davos.
Dans le vide laissé cette année par les deux vedettes du Forum économique international l’an dernier, Donald Trump et Emmanuel Macron, les remises en cause de la mondialisation trouvent plus d’écho que d’habitude.
Par exemple quand elles émanent du chanteur Bono, co-fondateur de la campagne One: « Le capitalisme a sorti plus de gens de la pauvreté qu’aucun autre +isme+ mais c’est une bête sauvage qui, si elle n’est pas domptée, peut dévorer de nombreuses personnes en route ».
« Le business est mondial mais les problèmes sociaux et les réponses sont locaux, nationaux », résume Alain Roumilhac, président de Manpower France. Pour lui, le rendez-vous d’environ 3.000 patrons, banquiers, responsables politiques et activistes dans la station de ski huppée « manque de souffle » cette année.
Plus amer, le secrétaire général d’Amnesty International Kumi Naidoo a dit à l’AFP: « A Davos, c’est comme si l’on rangeait les chaises longues sur le pont du Titanic pendant que l’humanité coule ».
Source: AFP