La tension sur le dossier iranien est encore montée d’un cran, avec l’annonce par Téhéran qu’il comptait s’affranchir davantage de l’accord de 2015 sur le nucléaire, sur fond de surenchères avec les Etats-Unis de Donald Trump.
Dans le cadre du climat ultra tendu avec Washington, l’Iran a indiqué en mai qu’il cesserait de se sentir tenu par les limites que cet accord conclu à Vienne impose à ses réserves d’eau lourde et d’uranium enrichi. A ce titre, le seuil limite de réserve d’uranium enrichi doit être symboliquement franchi jeudi.
Dès mardi, la République islamique est toutefois allée plus loin: à partir du 7 juillet, elle réduira « résolument » ses engagements pris dans le cadre de l’accord, a déclaré dans une note, citée par l’agence Fars, l’amiral Ali Shamkhani, secrétaire-général du Conseil suprême de la sécurité nationale.
Le pays cesserait ainsi de respecter les restrictions consenties « sur le degré d’enrichissement de l’uranium » (limité à 3,67% par l’accord de Vienne).
Il pourrait en outre reprendre un projet de construction d’un réacteur à eau lourde à Arak (centre), mis en sommeil par l’accord.
Dans sa note, l’amiral Shamkhani évoque la lassitude de Téhéran vis-à-vis des promesses des Européens –qui disent vouloir sauver l’accord depuis le retrait unilatéral des Etats-Unis en mai 2018– mais peinent à trouver les moyens de cette ambition.
L’amiral Chamkhani a affirmé que la récente déclaration des trois pays européens (France, Royaume-Uni, Allemagne) révélait une « insolence politique » et une absence de la volonté chez les Européens pour braver les diktats de Washington.
« Les Européens n’ont accepté jusqu’ici de payer aucun prix pour sauver le PGAC, accord qu’ils sont censés voir comme un acquis historique pour l’Union européenne. Il paraît qu’ils sont plutôt contents de voir perdurer la situation actuelle, marquée surtout par des pressions américaines anti-iraniennes qui permettraient — semble-t-il — à l’Europe d’en tirer des bénéfices politico-sécuritaires. La récente déclaration de la troïka européenne et le ‘jeu de sanctions’ de Trump représentent les deux faces d’une même pièce dont les détails se révèlent chaque jour un peu plus, après une année de négociations stériles avec l’Europe. »
La décision de Téhéran de se délier encore plus de l’accord intervient surtout dans un contexte d’extrême tension avec Washington, que l’Iran a accusé mardi d’avoir « fermé de façon permanente la voie de la diplomatie », au lendemain de l’annonce de nouvelles sanctions américaines.
La réaction de l’Iran est « insultante », a à son tour proclamé le président Trump, en prévenant que toute attaque iranienne ferait l’objet de représailles « écrasantes ».
Les sanctions américaines de lundi, d’une portée essentiellement symbolique, visent le numéro un iranien l’Ayatollah Sayed Ali Khamenei tandis que le chef de la diplomatie Mohammad Javad Zarif, visage de la politique iranienne de détente avec l’Occident, devrait être placé sur la liste des sanctions « cette semaine ».
Ces sanctions viennent s’ajouter à une spirale d’accusations et d’incidents, dont des attaques d’origine inconnue contre des pétroliers et la destruction le 20 juin d’un drone américain par l’Iran dans la région stratégique du Golfe persique.
« En même temps que vous appelez à des négociations, vous cherchez à sanctionner le ministre des Affaires étrangères! Il est évident que vous mentez », a déclaré le président iranien Hassan Rohani, répondant aux affirmations des Etats-Unis selon lesquelles un dialogue reste possible.
« Cette Maison Blanche souffre de troubles mentaux. Elle ne sait plus quoi faire! », s’est exclamé M. Rohani.
Le président américain a par ailleurs été l’objet de railleries d’internautes iraniens mardi, après avoir annoncé la veille des sanctions financières contre « l’ayatollah Khomeiny »… mort en 1989.
Au lendemain de la destruction du drone, M. Trump avait dit avoir renoncé in extremis à des frappes contre des cibles iraniennes. Selon des médias américains, il a en revanche autorisé des cyberattaques contre des systèmes de lancement de missiles et un réseau d’espionnage iraniens. Téhéran a dit n’avoir subi aucun dégât.
Les Bourses européennes ont réagi mardi sur fond de tensions grandissantes entre les Etats-Unis et l’Iran. Paris a terminé en baisse de 0,13%, Francfort de 0,38%, Milan de 0,73%, Madrid de 0,36%, Amsterdam de 0,31% et Lisbonne de 0,44%. Seul Londres a grappillé quelques points (+0,08%).
Sources: AFP + PressTV