Le Premier ministre libanais par intérim, Hassan Diab, a menacé samedi 6 mars de cesser d’exercer ses fonctions pour faire pression sur les responsables politiques afin qu’ils forment un nouveau gouvernement.
« Si l’isolement aide à la formation du cabinet, je suis prêt à y recourir, même si cela va à l’encontre de mes convictions car cela perturbe tout l’État et nuit aux Libanais », a dit Hassan Diab lors d’un discours.
Il a affirmé que les Libanais paient le prix d’ambitions politiques et d’hérésies. Le Liban est sur le point d’exploser après son effondrement, a-t-il encore averti.
Il a, dans ce contexte, appelé les politiciens à mettre de côté leurs divergences afin de former un nouveau gouvernement capable de résoudre la crise économique due à la corruption et aux sanctions occidentales.
Qui utilise notre pays comme arène pour régler des comptes étrangers ? « Qu’attendez-vous, plus d’effondrement ? Plus de souffrance ? Le chaos ? » s’est exclamé Diab, fustigeant les hauts responsables politiques, sans les nommer, qui s’intéressent plus au nombre et à l’affiliation des ministres qu’au pays qui s’effondre.
« Quelle différence cela fera-t-il d’avoir plus ou moins de ministres (au sein du cabinet) si tout le pays plonge?», a-t-il réagi.
« Le Liban fait face à un grave danger et les Libanais en paient le prix.
Chantage de Hariri
Le cabinet d’Hassan Diab a démissionné à la suite de l’explosion du port de Beyrouth, le 4 août dernier, qui a dévasté des pans entiers de la capitale.
Le Premier ministre désigné Saad al-Hariri a été nommé en octobre 2020 mais n’a jusqu’à présent pas réussi à former un nouveau cabinet, en raison du chantage qu’il pratique.
Les négociations actuelles entre présidence de la république et premier ministre désigné semblent butter sur la nomination des ministres chrétiens du prochain cabinet. Ainsi si les communautés sunnites et chiites nommeront leurs ministres, le premier ministre désigné Saad Hariri – sunnite – souhaiterait également nommer les ministres chrétiens au grand dam de la Présidence de la République.
Cette dernière souhaiterait également obtenir le contrôle des ministères de l’intérieur et de la justice, appelés à jouer un rôle clé dans les enquêtes à venir concernant les détournements de fonds alors que des proches de Saad Hariri, comme le gouverneur de la Banque du Liban lui-même, Riad Salamé, font l’objet d’enquêtes à l’étranger comme en Suisse.
Pour l’heure, certains experts proches du dossier notent avec inquiétude que les intérêts politico-économiques sont plus importants pour certains partis que l’intérêt général. Et d’ajouter : « les divisions traditionnelles des partis politiques se sont effacées au sein du parlement en faveur du parti des banques et des autres…Certains partis sont allés même jusqu’à brandir le spectre de la guerre civile en cas des réformes économiques ».
La crise a abouti à l’effondrement de la livre par rapport au dollar. Ce dernier s’échangeait à un moment donné à 10 500 livres libanaises sur le marché noir pour la première fois de son histoire.
Face à cette chute, les manifestations se multiplient depuis quelques jours, les protestataires dénonçant la dégradation des conditions sociales et économiques actuelles et la perte de pouvoir d’achat.
Ainsi, le salaire minimum n’atteindrait plus que 2.33 USD par jour alors que le seuil de pauvreté est estimé à 6 USD par jour. Plus de 65% de la population se trouverait désormais vivant sous ce seuil symbolique.
Sources: Reuters + Libnanews + ANI