Nouvelle évolution dans le dossier de la présidence libanaise en vacance depuis octobre 2022 : des partis libanais chrétiens se seraient mis d’accord ces derniers jours pour soutenir la candidature de Jihad Azour, face au candidat du tandem Hezbollah et du mouvement Amal, Sleiman Frangiyeh, le chef du courant des Marada.
Une entente a été conclue entre le parti des Forces libanaises, les Kataeb, et le Courant patriotique libre. Au sein de ce dernier, certaines voix semblent toutefois s’opposer à ce choix.
En visite à Paris, lundi 30 mai, le patriarche Béchara Rai a fait part de cette candidature au président français Emmanuel Macron. Avant son voyage, il s’était félicité « d’une entente autour d’une personnalité qui ne représente un défi pour personne ». De retour, il a entamé des contacts politiques
Connu pour être un proche de l’ex-Premier ministre Fouad Siniora, Azour a été le ministre des Finances du gouvernement que ce dernier avait dirigé entre 2005 et 2008. Ce gouvernement avait été éclaboussé dans plusieurs affaires. L’une d’entre elles concerne l’évaporation de 11 milliards de dollars des dépenses publiques. Siniora a été accusé de les avoir décaissés sans documents légaux.
On reproche aussi à Azour des politiques financières d’impôt qui ont eu des séquelles sur les couches les plus défavorisées et qui sont derrière la crise qui a éclaté en 2019.
Il a fait partie de ceux qui ont suivi une politique d’endettement du Liban sous couverture des conférences de donations. Durant son mandat de ministre des Finances, Azour a assuré la coordination de la préparation et la mise en œuvre de la Conférence internationale pour le Liban – Paris III, une conférence de donateurs qui a réuni plus de 45 pays et les principales institutions financières internationales et a mobilisé 7,6 milliards de dollars US.
Depuis 2017, Azour occupe le poste de directeur du département Moyen-Orient et Asie centrale du Fonds monétaire international (FMI), Les mesures prônées par ce dernier pour le règlement de la crise économique et financière au Liban sont rejetées par le Hezbollah.
« Qui peut assumer la responsabilité d’augmenter les impôts de tout le peuple libanais, de vendre les biens de l’État au secteur privé, de tout privatiser et d’expulser un grand nombre d’employés de l’État ? », avait déploré en 2020 le député du bloc parlement Fidélité à la Résistance Hassan Fadlallah. Évoquant la nécessité d’un règlement national basé sur des réformes cruciales réelles, il avait ajouté : « Une telle solution exige que toutes les forces politiques assument leur responsabilité, arrêtent les divisions et les débats, acceptent de laisser la main libre au pouvoir judiciaire, s’abstenant d’exercer des pressions politiques sur lui, afin qu’il puisse mettre en œuvre des lois qui combattent la corruption pour récupérer des milliards de dollars qui ont été pillés par des personnalités influentes au pouvoir depuis plus de trente ans, ou ceux qui ont été détournés récemment hors du Liban ».
Dans une première réaction à la candidature d’Azour, le chef du Parlement Nabih Berri l’a qualifié de « démarche qui n’est pas sérieuse et ne peut mener nulle part ».
« Cette candidature a pour but de prolonger la crise et l’état de vacance et d’entraver l’élection d’un président et de couper la voie à Sleiman Frangiyeh. C’est un candidat de défi et de provocation qui affectera le partenariat national et la stabilité interne », a-t-il dit selon le journal libanais al-Bina’.
Cuieusement, en parallèle à l’annonce de la candidature, les Etats-Unis ont brandi de nouveau leur spectre des sanctions.
Le mercredi 31 mai, la secrétaire d’État adjointe aux affaires du Proche-Orient Barbara Leaf avait annoncé que l’administration Biden envisageait la possibilité d’imposer des sanctions aux responsables libanais, si un chef d’État n’est pas élu.
Rapportant que le blocage politique au Liban est « une source d’énorme frustration » pour l’administration américaine, elle a indiqué que cette administration coopère avec des « partenaires régionaux et européens pour pousser le Parlement libanais à faire son travail ». Critiquant « les élus qui ne font pas leur travail » et le président du Parlement, Nabih Berry, « qui n’a pas convoqué de séance électorale depuis janvier », la secrétaire d’Etat adjointe a affirmé que Washington « cherche des moyens » de sanctionner les responsables du blocage, sans fournir plus de détails. Elle a encore affirmé « mettre la pression » sur les parlementaires libanais qu’elle est amenée à rencontrer lorsqu’ils sont en visite aux Etats-Unis. A savoir que Washington affichait précédemment appuyer la candidature du chef de l’armée libanaise Joseph Aoun. La candidature d’Azour ne devrait pas non plus les gêner.
« La candidature d’Azour face à Franjieh va déplacer le dossier présidentiel vers une nouvelle confrontation au sein de la Chambre des représentants, et inciter les deux partis à se mobiliser pour s’assurer des voix ou pour perturber le quorum, avec les soubresauts qui l’accompagneront au cas où le président du Parlement, Nabih Berri, s’abstient de convoquer une séance sur fond de menaces les forces de l’opposition que ses options pour affronter cette affaire seront ouvertes », a appréhendé le journal al-Akhbar.
Source: Divers