En automne 2015, les autorités russes et israéliennes se sont rencontrées pour trouver un mécanisme destiné à éviter les « collisions de chasseurs » dans le ciel syrien.
À partir de cette date, la Russie s’est engagée militairement en Syrie et Israël a continué, en dépit des mises en garde de Damas, ses frappes aériennes contre des cibles en territoire syrien sous prétexte de vouloir contrer le transfert d’armes de la Syrie à destination du Hezbollah.
Cette « entente tacite » était de rigueur jusqu’au 22 mars 2017, date à laquelle l’État syrien a tenu à riposter à des frappes israéliennes contre une base militaire dans la banlieue de Palmyre. Des missiles S-200 syriens ont réussi, une fois les chasseurs israéliens de retour dans l’espace aérien d’Israël, à abattre l’un d’entre eux, chose inédite depuis le début de la guerre en 2011 en Syrie.
L’un des missiles syriens a été détruit dans le ciel et ses éclats ont été retrouvés en Jordanie. Quant au second missile, il se serait écrasé dans un terrain vague en Israël. La riposte syrienne a poussé Tel-Aviv à reconnaître pour la première fois depuis 2011 avoir bombardé le sol syrien et avoir fait l’objet d’une riposte de la part de la DCA syrienne. Peu de temps après, Moscou a convoqué l’ambassadeur israélien en poste en Russie pour lui signifier ses protestations au sujet du raid anti-syrien de l’aviation israélienne. La réponse syrienne a donc littéralement changé la donne, ce qui n’est pas sans rapport avec les récentes victoires militaires de l’armée syrienne et de ses alliés iraniens et russes en Syrie.
Israël n’a jamais caché son vif désir de « mettre à la porte de la Syrie l’Iran et le Hezbollah », ce qui ne l’avait pas empêché, du moins jusqu’ici, d’avoir de bonnes relations avec la Russie. Mais les bons rapports israélo-russes pourraient rapidement péricliter.
Selon Michael Cappello, stratège militaire israélien, « ce qui importe désormais n’est plus la manière dont le mécanisme de coopération Russie/Israël a jusqu’à présent fonctionné. Car il y a une contradiction au cœur même des relations qui unissent la Russie à Israël en Syrie : la présence iranienne en constitue la ligne rouge pour Tel-Aviv. Or pour la Russie, c’est l’absence de l’Iran et de sa force militaire en Syrie qui constitue la ligne rouge à ne pas franchir ».
L’ambassadeur de la Syrie à l’ONU a d’ailleurs été très clair : la riposte syrienne aux frappes israéliennes a ouvert un nouveau chapitre dans les relations Moscou/Tel-Aviv. « Moscou a informé Tel-Aviv qu’il ne pourrait désormais plus faire ce que bon lui semble dans le ciel syrien », a-t-il indiqué. Aussitôt après les propos de Bachar al-Jaafari, Daniel Shapiro, ex-ambassadeur d’Israël à Washington, a envoyé une série de tweets où il disait : « Les frontières entre Israël et la Syrie se situent désormais là où commence et finit l’influence de Poutine au Moyen-Orient. C’est l’immense défi auquel se trouve confronté Donald Trump. »
Cependant, Israël dit vouloir poursuivre ses raids en Syrie et son ministre des Affaires militaires a même menacé de détruire la DCA syrienne. Mais Israël peut-il être sûr comme par le passé du feu vert russe ? Rien n’est moins sûr. Même Netanyahu le sait, lui qui en visite en Chine a tenté de prouver par A + B que « la politique russe n’avait pas changé d’un iota envers Israël », sans pourtant convaincre personne. Tout porte à croire que les garanties données en 2015 par la Russie à Israël ne sont plus d’actualité, car une riposte syrienne aux frappes aériennes de Tel-Aviv n’aurait jamais pu avoir lieu sans l’aval des Russes. Au cas où la Russie aurait demandé à Israël de mettre un terme à ses violations du ciel syrien, le coût des frappes futures contre le territoire syrien serait très élevé. Cette perspective réduira le nombre d’options pour Netanyahu et le poussera davantage dans les bras des Américains.
Dans les jours suivant la riposte syrienne, un haut officier de l’armée syrienne a perdu la vie dans l’attaque d’un drone israélien. Le lendemain, ce fut le tour de la DCA syrienne d’abattre un drone israélien dans le sud de la Syrie. Une chose est sûre : les prochaines réactions russes aux frappes anti-syriennes d’Israël ne ressembleront pas aux précédentes. En visite en Russie, le président iranien aura largement le temps de les évoquer avec Vladimir Poutine.
Source: PressTV