La mère de la résistance, la meilleure des femmes de patience, la plus belle de toutes les mères, la mère de tous…De toutes les appellations qui lui sont attribuées, c’est celle de la Mère des martyrs qui lui va le mieux.
Connue le plus couramment sous le patronyme Hajja Oum Imad, mère d’Imad, elle est la mère du commandant militaire emblématique du Hezbollah, Imad Moughniyeh, le fondateur de la Résistance islamique au Liban, le commandant des deux victoires, en 2000 et 2006, tombé en martyr en 2008.
Deux autres de ses fils, également combattants dans la résistance étaient tombés en martyrs avant leur frère : Jihad (1984) et Fouad (1994), au Liban. Elle a aussi perdu un petit-fils aussi, Jihad fils de Imad, tué en Syrie en 2015.
Depuis son lancement, elle offrait à la Résistance un martyr, à chaque décennie. Sans jamais se plaindre. « Je les ai mis là où ils fallaient qu’ils soient, la meilleure des places sur terre : le martyre », disait-elle dans de ses interviews. Très fière.
Elle s’est éteinte dans la nuit du lundi 8 octobre à l’âge de 80 ans. « Elle a rejoint ses êtres les plus chers au Paradis », peut-on lire entre autre dans les messages de condoléances. Son mari, Abou Imad, l’avait précédée en décembre 2017.
Les Moughniyeh ont la réputation d’être une famille de résistants de père en fils. Au fil du temps, il s’est avéré qu’ils doivent la mèche à la hajja, la Mère de la résistance.
Pourtant, elle était restée dans la clandestinité jusqu’au martyre du Grand Imad. Date à laquelle le public de la résistance a commencé à la connaitre davantage. Ainsi que son fils d’ailleurs, et dont l’identité et la fonction au sein de la résistance sont restées un secret de polichinelle aussi.
C’est à ce moment qu’on a appris qu’elle faisait partie des premières femmes qui ont travaillé dans la Daawa islamique et dans l’ascension de la « Halat islamiyat ». Terme se traduisant par « phénomène islamique », désignant l’environnement religieux social du Hezbollah. C’était dans les années 70 du siècle dernier. Une éclosion qui était alors entrée en symbiose avec la révolution islamique qui triomphait en Iran.
Elle a fait partie des femmes qui ont pris part à la résistance civile contre l’occupation israélienne du Liban, en 1982, « lorsque les femmes jetaient de l’huile en ébullition sur les soldats israéliens à Ter Debba », son village natal situé dans la province de Tyr.
Entre temps, ses fils et leurs compagnons lançaient la résistance militaire.
On lui rapporte une histoire, à cette même époque, qui illustre sa patience et sa persévérance. C’était lors de la mort de son premier martyr, Jihad, qui avait succombé dans l’attentat à la voiture piégée, à Bir al-Abed, dans la banlieue sud de Beyrouth. Un attentat qui visait le grand religieux sayed Mohamad Hussein Fadlallah, en 1984.
Ce jour-là, tous les membres de sa famille étaient à jeun. Lors de la rupture du jeûne, à table, constatant leur manque d’appétit, elle les avait alors sermonnés : « Si nous sommes brisés par ce drame, il aura raison de nous. Il est interdit que nous faiblissions alors que nous ne sommes qu’au début de notre parcours. Allez, mangez. Demain sera un long jour ».
Pour Haj Imad, ces paroles ont été décisives dans son parcours de résistant : « c’est cette bouchée que tu m’as forcé à avaler qui m’a appris comment contrôler les moments difficiles que j’ai rencontrés », lui disait-il fréquemment, avait-elle rapporté.
Du coup, son discours adressé aux femmes a toujours été très élogieux: « cette grande lutte de la résistance, sa moitié vous est due », leur disait-elle , lorsqu’elle les rencontrait.
Lorsqu’Imad est tombé en martyr, dans un attentat près de Damas, c’est elle qui a consolé le chef du Hezbollah sayed Hassan Nasrallah. «Il était très chagriné. Je lui ai dit: nous serons tous derrière toi. Dommage que je n’ai plus de fils pour qu’ils combattent entre tes mains », raconte-t-elle dans l’une de ses interviews.
Pour tous ceux qui ont côtoyé Oum Imad, lors des rencontres, des interviews, des colloques, des visites chez elle, sa maison étant devenue une destination incontournable pour les innombrables délégations, la Résistance était sa vocation. Elle en était devenue la porte-parole par excellence. Elle savait très bien la défendre, présenter ses atouts et ses apports.
Dans une interview dans sa maison au village, elle a cueilli un citron et l’a offert à la journaliste qui l’interviewait : « Prends ce citron. Sans résistance, il n’y aurait pas de citron », lui avait-elle dit.
C’était comme si elle entretenait avec cette résistance une relation matriarcale. « Tous les martyrs sont Imad », se plaisait-elle à dire aussi. Nombreux sont ceux qui croient sincèrement qu’elle mérite le nom de la mère du Hezbollah.
Source: Divers