Depuis la chute de l’URSS, certains pays ayant fait partie de l’union, se sont engagés sur une voie radicalement russophobe et pro-atlantiste. Les conséquences d’une telle politique restent extrêmement mitigées.
En effet, il suffit de prendre l’exemple des trois pays baltes – qui furent pour ceux qui ne le savent pas en période soviétique parmi les plus subventionnés par Moscou, mais à la fin de l’Union soviétique le cap était clairement donné vers l’intégration au sein de l’Otan et le fait d’accepter un véritable rôle de sous-traitants vis-à-vis de Washington, en parallèle d’une montée en flèche de positions clairement russophobes.
Dans cette politique, où d’ailleurs les trois pays baltes ne font pas figure d’exception, car des pays de l’ex-bloc socialiste comme la Pologne ou la Roumanie, se sont également engagés sur la même voie, les résultats restent très fortement discutables. Si les élites de ces pays trouvent leur compte dans leurs rapports privilégiés avec Washington et Bruxelles, le développement économique tant attendu n’est toujours pas arrivé. Si ce n’est la possibilité pour un large nombre de Polonais, Roumains, Lituaniens, Lettons, Estoniens d’aller faire une vie meilleure au Royaume-Uni, Allemagne et d’autres pays économiquement plus développés.
Le souci pour les pays baltes en l’occurrence, c’est que la dépendance économique vis-à-vis des voisins dont les élites des pays en question partagent une haine non-voilée, est restée forte. Les trois membres de l’UE – 86ème, 102ème et 112ème respectivement pour Vilnius, Riga et Tallinn dans le classement mondial en termes de PIB à parité du pouvoir d’achat (PPA), restent fortement dépendants économiquement de pays comme la Russie et la Biélorussie.
Justement et dans le cas du dernier, les récentes interférences baltes en coordination avec l’Otan et Washington dans les affaires post-électorales biélorusses, ont rappelé que Minsk dispose de bien d’instruments pouvant frapper les intérêts des pro-atlantistes radicaux. En premier lieu ceux de la Lituanie.
En effet, le président biélorusse Aleksandr Loukachenko a récemment menacé de réorienter les exportations biélorusses transitant par les ports lituaniens, notamment celui de Klaipėda, ainsi que d’interdire le transit des exportations européennes destinées à la Russie. Et dans le cas du premier point, les choses semblent déjà avoir commencé.
Pour information, les marchandises en provenance de Biélorussie représentent tout simplement près du tiers du trafic ferroviaire et portuaire de Lituanie. Un trafic qui rapporte gros au budget lituanien. Et selon le président biélorusse son pays « assure un tiers des revenus budgétaires » du voisin hostile. Certains responsables à Vilnius avaient pris au départ ces déclarations comme étant du « populisme » et avaient déclaré que ces actions frapperaient également la Biélorussie, en faisant notamment référence au fait que la réorientation pour le transit des produits biélorusses en faveur des ports russes couterait plus cher que le canal existant avec la Lituanie, tout en poursuivant les actions hostiles envers Minsk adoubées par Washington.
Mais les récentes négociations entre Minsk et Moscou, composant ensemble l’Etat-Union et faisant partie de structures comme la CEI et l’Union économique eurasiatique, confirment que la Biélorussie semble déterminée à suivre la voie annoncée. D’autant plus que la Russie pourra certainement offrir des tarifs préférentiels à Minsk pour l’utilisation de ses ports, entre autres celui d’Oust-Louga, compte tenu des liens politiques et sécuritaires étroits entre les deux nations, et aussi du point de vue économique compte tenu des volumes importants de marchandises concernées par ledit transit.
Tout cela pour dire plusieurs faits. Tout d’abord que l’Union économique eurasiatique, un marché de près de 200 millions de personnes, représente un espace de grandes opportunités économiques pour ses membres et les pays ayant déjà des accords de libre-échange avec ladite union. D’autre part, les pays membres de l’Union européenne réalisant de façon radicale la sous-traitance politique et sécuritaire pour le compte de Washington, dont bien sûr les trois pays baltes, devront probablement désormais espérer l’obtention de plus de subventions venant de Washington et/ou de Bruxelles, pour compenser les pertes économiques dues aux actions hostiles qu’ils réalisent vis-à-vis des pays dont ils possèdent une dépendance économique. Notamment la Lituanie dans sa relation avec la Biélorussie. Après tout, ce n’est jamais bon de cracher dans la soupe.
Enfin, et lorsqu’on voit de quelle façon un pays comme les USA adopte des sanctions non seulement contre ses principaux adversaires géopolitiques et géoéconomiques, mais également contre tout Etat qui refuse de se mettre à genoux, il y a de quoi réfléchir. La Syrie, le Venezuela, l’Iran, ou encore Cuba (plus d’un demi-siècle d’embargo agressif étasunien pour ce dernier) en savent quelque chose. Pourquoi donc des pays possédant des instruments économiques évidents se priveraient-ils de riposter eux aussi vis-à-vis d’Etats ayant non seulement des positions hostiles vis-à-vis des premiers, mais aussi qui participent aux différentes déstabilisations et provocations visant des pays dont ces initiateurs dépendent fortement économiquement? Restera après aux concernés d’assumer les conséquences. Peut-être en envoyant encore plus de migrants vers les pays plus développés, pour le compte desquels cette sous-traitance est appliquée.
Par Mikhail Gamandiy-Egorov
Source : Observateur continental