À l’occasion de sa victoire à la Coupe arabe de la FIFA, l’équipe d’Algérie a exprimé son soutien inconditionnel à la cause palestinienne. Une solidarité liée à une histoire ressentie comme commune de lutte contre l’occupant.
Qui a dit que la cause palestinienne avait été abandonnée par les Arabes?
Alors que le Maroc, le Soudan, les Émirats arabes unis et Bahreïn ont normalisé l’année dernière leurs relations avec Israël, la Palestine se sentait trahie par « des pays frères ». Mais l’Algérie n’a pas bougé d’un iota sur cette question. En pleine coupe arabe de la FIFA organisée au Qatar durant le mois de décembre, l’équipe nationale algérienne victorieuse n’a eu de cesse d’arborer fièrement le drapeau palestinien à chacun de ses succès. En finale contre la Tunisie le 18 décembre, les Fennecs se sont imposés 2 à 0. Fêtant la victoire dans l’enceinte du stade, les joueurs et les supporters ont défilé avec des keffiehs (foulards à carreaux noir et blanc), symbole du nationalisme palestinien. D’ailleurs, des scènes de liesse ont également eu lieu à Gaza et dans plusieurs villes palestiniennes.
L’entraîneur algérien, Madjid Bougherra, a de surcroît déclaré qu’il dédiait ce titre au « peuple palestinien et à nos compatriotes à Gaza ». Ce positionnement algérien n’est en rien surprenant. « Il y a toujours eu ce sentiment de solidarité », rappelle au micro de Sputnik Saad Khiari, romancier et cinéaste algérien.
Algérie, Palestine, même combat?
En effet, en juin dernier, pour manifester son soutien au peuple palestinien et dénoncer la guerre contre Gaza qui avait fait 256 morts, l’équipe algérienne avait brandi une banderole « Free Palestine » lors d’un match amical contre la Mauritanie.
« Il y a un fait naturel dans ce sentiment de solidarité envers la Palestine qu’on peut retrouver auprès des autres pays arabes, des pays musulmans, voire ceux du tiers-monde également. Pour ce qui est du peuple algérien, c’est quelque chose d’enraciné chez eux », poursuit Saad Khiari.
Pourtant, la Palestine est à plus de 3.000 kilomètres du territoire algérien. Cette attache à la cause palestinienne résulterait surtout d’un passé qui a beaucoup en commun. « L’Algérie, du fait de son histoire récente avec l’occupation coloniale, est toujours solidaire des mouvements d’indépendance », souligne le spécialiste de l’Algérie. Il y fait référence au temps où le pays était une colonie française. Peu de temps après la guerre contre la France, Alger était surnommé « la Mecque des révolutionnaires ». En effet, dans les années soixante, l’Algérie s’est érigée en terre d’accueil des mouvements anticoloniaux et révolutionnaires du monde entier. Le pays accordait son aide, son assistance aux pays luttant pour leur indépendance contre les puissances coloniales de l’époque. C’est notamment le cas de « l’Angola, du Mozambique, de l’Afrique du Sud, mais surtout de la Palestine ».
L’Organisation de libération de la Palestine (OLP) de Yasser Arafat prenait comme modèle le Front de libération nationale (FLN) algérien dans sa lutte contre l’occupation israélienne.
Ainsi, au travers de la cause palestinienne, le peuple algérien « voit en le Palestinien le reflet de son propre combat contre l’occupation française », estime l’écrivain, « il y a quelque chose de sentimental, de culturel et de quasi romantique ».
Ainsi, dans la rhétorique du pouvoir algérien, Israël a spolié les biens de la Palestine et des Palestiniens. Le soutien est donc total. Alger a fourni des armes et entraîné des combattants de l’OLP. À ce titre, en 1967, lors de la guerre des Six Jours opposant plusieurs pays arabes à Israël, le FLN avait envoyé des troupes en Égypte. Compte tenu de la défaite expresse du Caire et de Damas, les soldats algériens n’avaient alors pas eu le temps de participer au conflit. Houari Boumédiène, un ancien président algérien, déclarait en 1974: « Nous sommes avec la Palestine, qu’elle ait tort ou raison. » L’année suivante, l’Algérie avait parrainé et voté en faveur de la Résolution 3379 de l’Onu qui assimilait le sionisme au racisme. Résolution révoquée une vingtaine d’années plus tard par l’Assemblée générale des Nations unies.
Alger se sent menacé par la nouvelle alliance entre le Maroc et Israël
Depuis, l’Algérie n’a eu de cesse de se tenir aux côtés du peuple palestinien en dénonçant les exactions israéliennes ou en condamnant les politiques répressives de l’État hébreu. Ce soutien politique s’inscrit donc dans la durée depuis l’indépendance algérienne. En effet, le 6 décembre dernier, lors d’une rencontre entre le président algérien Abdelmadjid Tebboune et son homologue palestinien, Mahmoud Abbas, en Algérie, Alger a rappelé son intention de proposer une médiation pour le règlement du contentieux inter-palestinien.
Le chef de l’État algérien a en effet annoncé « l’organisation prochaine d’une réunion des différentes factions palestiniennes à Alger ». De son côté, le chef de l’autorité palestinienne a affirmé que « cette visite intervient pour parachever la coordination entre l’État de Palestine et l’Algérie afin d’inscrire la cause palestinienne comme le point central de l’ordre du jour de la réunion de la Ligue arabe », qui se tiendra en mars prochain.
L’octroi d’une aide de 100 millions de dollars à la Palestine a été alors annoncé par son allié. De plus, Alger accordera 300 bourses d’études aux étudiants palestiniens pour rejoindre les universités algériennes. Une entente qui, par ricochet, a des conséquences sur les relations entre Alger et l’État hébreu. Et ce alors que le Maroc ne s’est pas empêché il y a un an de reconnaître Israël. « Le Mossad à nos frontières », titrait le 24 novembre le journal L’Expression, proche du gouvernement algérien, à l’occasion de la visite du ministre israélien de la Défense à Rabat.
Une situation qui inquiète le voisin algérien. Et pour cause: les deux nouveaux alliés ont signé un accord sécuritaire –officiellement intitulé Mémorandum d’entente en matière de défense. Le royaume chérifien a acquis quatre drones tactiques Hermes 900 conçus par le groupe israélien Elbit Systems. En outre, le Maroc va pouvoir perfectionner son système de renseignements et de surveillances aux frontières. Pas de doute pour Alger, cette nouvelle alliance la vise.
Source: Avec Spunik