Rien ne freine les ambitions turques en Syrie et en Irak. Alors que la bataille de Mossoul bat son plein, et que l’Irak s’efforce de chasser les miliciens terroristes de Daech de leur dernier bastion, Ankara cherche à s’imposer politiquement et militairement chez son voisin de l’Est.
C’est dans ce contexte que s’inscrivent les déclarations du ministre turc de la défense, Fikri Isik, au cours de son entretien avec ses homologues américain Ashton Carter et français Jean-Ives le Drian, en marge d’une réunion des pays de l’Otan à Bruxelles.
Selon Isik, dont les propos sont rapportés par l’agence de presse turque Anatolie, « il est primordial de maintenir la répartition démographique à Mossoul, Tallafar (en principe les premières cibles du Hached Chaabi) et Raqqa, et de remettre leur direction à la population locale après leur libération de Daech ».
Des sources diplomatiques et militaires ont de leur côté souligné que « les responsables américain et français précités sont d’accord avec Isik ».
Pour ce dernier, « il est normal que la Turquie soutienne la bataille de Mossoul dès le premier jour, dans le cadre de la coalition dont elle fait partie. De plus, aucun obstacle n’existe sur notre participation aux raids aériens en Irak. Nos avions sont prêts à y prendre part ».
Le ministre turc de la défense a insisté sur l’importance « d’écarter à tout prix les forces du Hached Chaabi de la bataille de Mossoul, parce que la population locale ne tolèrera aucune force extérieure »!
Erdogan: « nous n’abandonnerons pas nos frères à Mossoul et Kirkouk »
Les propos du responsable turc ont coïncidé avec un discours du président turc Recep Tayyep Erdogan, qui a dit entre autre: « Lorsqu’on parle des droits historiques, de la convention de Lausanne, certains nous disent: avez-vous des ambitions dans les territoires irakiens et syriens? Ce sont des faits historiques. C’est ce que dit l’histoire. Ce n’est pas moi qui le fait. Est-ce que vous oubliez ces faits? Est-ce interdit d’en parler? ».
Et de poursuivre: « Je le répète encore une fois: la Turquie doit être au coeur des développements en cours en Irak et en Syrie… nous sommes présents en Irak, et nous allons renforcer cette présence. Nous n’allons point abandonner nos frères à Mossoul et à Kirkouk, avec lesquels nous avons des liens historiques, culturels voire familiaux ».
Pendant ce temps, les Etats-Unis observent un mutisme suspicieux face à la position turque.
Mais de l’autre côté de l’Irak, les choses ne passent pas inaperçues. Commentant les propos turcs, un dirigeant éminent du Hached Chaabi, Hadi al-Amiri, a affiché ses craintes de voir la ville de Mossoul se transformer en une « deuxième Alep ».
D’après ses propos, »la bataille de Mossoul sera longue, et elle n’est certes pas une promenade comme certains le pensent. Le Hached Chaabi entrera à Mossoul sur ordre du Premier ministre… Mossoul est une ville irakienne et nous ne tolèrerons aucune ingérence turque sur notre territoire », a-t-il fait savoir.
Au moment où la Turquie et les Etats-Unis tentent d’opposer un veto sur la progression du Hached Chaabi vers Tallafar, ville proche de la frontière syrienne, une source du Hached a indiqué au journal libanais al-Akhbar que « les préparatifs militaires du Hached Chaabi sont finalisés pour entamer dans les prochains jours la campagne terrestre sur l’axe de l’ouest (à Tallafar). Cet axe est un point central dans la bataille et permettra de resserrer l’étau sur les groupes de Daech et les empêcher de fuir vers la Syrie ».
Par ailleurs, une source militaire irakienne a confié à al-Akhbar que « les forces conjointes mènent une bataille pour reprendre à Daech la région Zawiya à l’Est de Mossoul. Ainsi, les forces seront aux abords de Kokjali, le premier quartier de la ville, à une distance de six kilomètres seulement ».
Et de poursuivre: « Les forces s’approchent de Hamam Al-Alil au sud de Mossoul (front sud) », confirmant que la population là-bas s’est soulevée contre Daech.
Source: Traduit du journal AlAkhbar