La presse russe estimait mardi que les expulsions coordonnées de diplomates russes par une vingtaine de pays après l’empoisonnement d’un ex-agent russe plongeaient les relations entre Moscou et les Occidentaux dans une nouvelle « période de Guerre froide ».
« La relation entre la Russie et l’Occident entre dans une période de Guerre froide à part entière », résume l’analyste Fiodor Loukianov dans les pages du quotidien Vedomosti, estimant que les expulsions « sont particulièrement destructrices pour les relations russo-américaines ».
« Ce n’est pas la fin de l’escalade, il est clair qu’elle va s’aggraver, on s’attend à des mesures encore plus sévères qu’avant, des sanctions économiques contre la Russie », prévient-t-il.
Il s’agit d’une « flashmob russophobe », titre le quotidien Izvestia, tandis que le journal Nezavissimaïa Gazeta rappelle qu' »il n’y avait encore jamais eu d’expulsions coordonnées ».
Selon le quotidien Kommersant, « ces mesures d’une rigueur sans précédent (…) sont un nouvel élément dans l’aggravation des relations entre la Russie et les Occidentaux ».
Pour la radio indépendante Ekho Moskvy, « toute la politique de la Russie concentre son énergie dans l’autodestruction depuis 2014 », année de l’annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée par Moscou, qui a été suivie par une série de sanctions occidentales.
« Plus la relation entre la Russie et l’Occident est mauvaise, mieux se porte le président » Vladimir Poutine, assure Ekho Moskvy. « Si vous êtes dans une citadelle assiégée, vous devez constamment provoquer des attaques (…) sinon votre légitimité est perdue. »
La télévision russe Pervy Kanal, la plus regardée en Russie, a dénoncé de son côté « une guerre d’informations transformée en guerre diplomatique » contre Moscou. « Pourquoi de telles mesures, alors qu’il n’y a pas eu de mort? », a-t-elle demandé.
« Le pire dans tout ça, c’est cette sensation d’irrationnel », a insisté la chaîne de télévision NTV, accusant « l’élite américaine » d’en être la cause .
Vingt-trois pays, dont 16 membres de l’Union européenne, ont décidé d’expulser au moins 116 diplomates russes, dans le cadre de représailles du camp occidental après l’empoisonnement de l’ex-espion russe Sergueï Skripal sur le sol britannique le 4 mars, imputé par Londres par Moscou.
Washington mène de loin le mouvement avec l’expulsion de 60 diplomates russes considérés comme des « agents de renseignement » et la fermeture du consulat de Russie à Seattle, sur la côte Ouest.
Moscou a aussitôt dénoncé un « geste provocateur » et promis de riposter à son tour. « La Russie n’a jamais eu et n’a rien à voir avec cette affaire », a répété le Kremlin.
Lundi soir, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères Maria Zakharova a appelé Londres et Washington à rendre publics les éléments « prouvant l’implication de (la Russie) dans un crime aussi terrible », selon l’agence de presse RIA Novosti.
« J’espère que tôt ou tard, le bon sens qu’ont conservé quelques responsables aux Etats-Unis concernant les relations avec la Russie, triomphera », a lancé pour sa part le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov, cité par RIA Novosti.
De nombreux observateurs éminents, dont l’ex-Chef d’état major du Commandement des 24 écoles de formation de l’Armée de Terre française, le général français Dominique Delaware suspectent les accusations britanniques contre Moscou et n’excluent pas que Londres aient orchestré cette attaque pour justifier des sanctions supplémentaires contre la Russie.
Source: Avec AFP