Le rédacteur en chef du journal Al-Akhbar, Ibrahim al-Amine, a mis en garde contre l’éclatement d’une guerre civile au Liban car certaines forces locales sont disposées à entreprendre une telle aventure.
« Il y a une réelle inquiétude au sujet de la possibilité de guerre civile car certaines forces locales, compte tenu de leur expérience ces trente dernières années, peuvent entreprendre de telles aventures », a-t-il affirmé lors d’une interview dans le cadre de l’émission Panorama Today sur al-Manar TV consacré à l’analyse du récent scrutin législatif libanais du 15 mai.
« Il y a de grands leaders dont la gloire politique est basée sur des aventures militaires », a-t-il précisé.
Selon al-Amine, la bataille du parti des Forces libanaises n’est pas l’arme de la résistance, mais la privatisation de l’Etat libanais.
« Le véritable défi pour le parti des Forces libanaises, c’est la privatisation de l’État. Il y a un travail assidu pour que des entreprises britanniques et américaines s’accaparent certains grands secteurs, dont celui de l’électricité », a-t-il précisé.
Le rédacteur en chef du journal al-Akhbar considère que « le schisme politique au Liban est toujours fortement présent », ajoutant que « la crise du système libanais s’aggrave, dans la mesure où cela détruit la stabilité sociale ».
Selon lui, à la lumière des résultats des élections, il n’y a que des « allégations » de changement dans le système politique.
« Ce s’est passé pourrait être un changement dans la direction politique, pas dans le système. Le vote a été largement sectaire, à un taux supérieur à 60% », a-t-il indiqué.
Et de poursuivre : « les forces du changement venues de milieux extérieures au club traditionnel ont certes réalisé des percées interconfessionnelles et régionales, mais elles sont embourbées dans la grande scission politique et son contexte ».
Concernant la réalité chrétienne qui a émergé des élections, le rédacteur en chef du journal Al-Akhbar a déclaré que « il y a ceux qui considèrent que les chrétiens devraient s’engager dans l’État et restaurer leur place au sein de la fonction (de l’Etat), et il y a ceux qui considèrent que l’État n’est pas pour eux et qu’ils devraient en sortir ».
A noter que deux partis se sont partagés à égalité la représentation parlementaire de la communautés chrétienne au Liban, le Courant patriotique libre (CPL) et le parti des Forces libanaises (FL).
Selon al-Amine, le CPL a réalisé un score important voire même surprenant, compte tenu de la campagne dont il a été victime ainsi que son chef Gibran Bassil.
« Ce à quoi Gibran Bassil a été exposé, personne ne l’a été. Il a subi une guerre politique lors des élections comme la guerre de juillet», a-t-il ajouté.
Dans les milieux de la communauté druze où le grand gagnant a été le Parti socialiste progressiste, M. al-Amine juge que son chef Walid Joumblatt, a utilisé les voix protestataires de la communauté druze, en faveur de son parti politique.
« Joumblatt les a utilisées pour éliminer ses rivaux, il a commis une erreur historique majeure au sein de la communauté druze », a-t-il affirmé, estimant que cela « coûtera très cher à Joumblatt, car l’élimination (de ses rivaux) ne le protègera pas mais déclenchera un incendie au sein de la communauté druze ».
Evoquant le rôle de l’Arabie saoudite pendant ce scrutin, son ambassadeur ayant fait campagne en faveur des Forces libanaises surtout au sein de la communauté sunnite, le rédacteur en chef du journal Al-Akhbar a estimé que le prince héritier saoudien, « Mohammed ben Salman ne veut pas du bien du Liban ».
« Il ne voulait pas de Saad Hariri, (le chef du courant du Futur), et il l’a poussé au choix qu’il a adopté, en passant du repli à la vengeance qu’il a utilisée contre les Saoudiens, et il a réussi. »
Saad Hariri a refusé de participer au scrutin législatif, sommant les membres de son parti de faire de même. Ceux qui se sont portés candidats ont essuyé un revers important, à leur tête Fouad Siniora, un cacique du courant du Futur qui s’était présenté au côté des Forces libanaises dans sa ville natale Saida.
« Les résultats des élections n’ont pas produit une personnalité sunnite qui puisse être acceptée dans cette communauté. Le taux de participation sunnite était en baisse significative à Beyrouth, à Saïda, au nord et dans la Bekaa. Il y a un défi réel auquel seront confrontées les forces politiques qui représentent les communautés libanaises, comment vont-elles traiter avec les sunnites ? Hariri est capable d’être en dehors de la scène électorale tout en étant un candidat sérieux pour le gouvernement, et il n’a pas besoin d’élections législatives ou de bloc parlementaire pour être Premier ministre », avancé al-Amine.
Le rédacteur en chef du journal Al-Akhbar a mis en garde au cas où « nous ne parvenons pas à un compromis qui puisse rétablir la considération à l’État, que nous soyons confrontés à une fédération des services comme un fait accompli mené par toutes les forces, à commencer par l’électricité, en passant par les routes et les déchets».
Source: Al-Manar