Les dizaines de milliers de combattants irakiens mobilisés pour reprendre Mossoul au groupe terroriste wahhabite Daesh (EI) gagnaient du terrain mardi au deuxième jour de cette offensive d’une ampleur sans précédent.
Avançant en convois de véhicules blindés à travers les plaines arides entourant la deuxième ville d’Irak et appuyées par des bombardements aériens de la coalition internationale menée par les Etats-Unis, les forces irakiennes ont pénétré dans des villages où l’EI tente de résister, a constaté un journaliste de l’AFP.
De grandes colonnes de fumée s’élèvent dans le ciel depuis des puits de pétrole en feu, près de la base arrière des forces irakiennes à Qayyarah, à environ 70 km au sud de Mossoul. Le ciel est plombé de gris sur des kilomètres.
Un soldat irakien posté à un des nombreux check-points a expliqué que les terroristes avaient mis le feu aux puits de pétrole pour tenter d’empêcher la coalition de mener des raids aériens et de leur reprendre Qayyarah. Mais la ville est tombée aux mains des forces irakiennes le 25 août et les incendies n’ont cessé depuis.
Les forces loyales au gouvernement de Bagdad avancent depuis Qayyarah, ainsi que depuis Khazir à l’est, vers Mossoul, dernier grand bastion de l’EI en Irak.
« De nombreux villages ont été libérés », a indiqué à l’AFP Sabah al-Numan, le porte-parole des services de contre-terrorisme irakien, une des unités d’élite mobilisées.
« Nous avons atteint nos premiers objectifs et même davantage mais nous restons prudents et nous nous en tenons au plan », a-t-il ajouté.
« Nos forces utilisent une large palette de moyens à notre disposition contre les terroristes et nous avons encore plus de surprises pour eux quand nous atteindrons la ville même », s’est targué ce porte-parole.
Avant d’atteindre les abords directs de Mossoul où seraient retranchés entre 3.000 et 4.500 terroristes lourdement armés, les forces irakiennes doivent traverser des territoires contrôlés par l’EI autour de la cité.
‘Comme prévu’
L’opération a bien commencé et le « premier jour s’est déroulé comme prévu », a estimé de son côté le Pentagone.
Cinquante-deux cibles ont été détruites par les avions de la coalition au premier jour de l’offensive, selon un bilan donnée par celle-ci.
Située dans le nord de l’Irak et peuplée majoritairement de musulmans, Mossoul était tombée aux mains de Daesh en juin 2014 et son leader , Abou Bakr al-Baghdadi, avait alors proclamé un « califat » sur les territoires conquis de manière éclair par les terroristes en Irak et en Syrie.
-Participation des avions turcs-
Des avions turcs ont pris part aux opérations aériennes menées par l’armée irakienne et la coalition internationale contre Mossoul, a affirmé ce mardi le Premier ministre turc Binali Yildirim. Sans préciser l’envergure ni la nature de cette intervention.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan avait prévenu qu’il était « hors de question » que la Turquie reste à l’écart de l’opération lancée lundi par Bagdad pour reprendre Mossoul, avec l’appui aérien de plusieurs pays, dont les Etats-Unis.
Les préparatifs en vue de cette opération ont été marqués par de vives tensions entre Bagdad et Ankara, qui insiste pour être associé à l’offensive, ce que le gouvernement irakien voit d’un mauvais oeil.
La présence de centaines de soldats turcs sur une base à Baachiqa, dans la région de Mossoul, a cristallisé les tensions, Bagdad évoquant une « force d’occupation ».
« Nous nous opposerons à tout projet de conflit confessionnel centré sur Mossoul », a mis en garde lundi le président turc Erdogan dans un discours retransmis à la télévision à Ankara.
« Nous ne voulons pas laisser quiconque s’en prendre à nos frères arabes sunnites, ni à nos frères turkmènes », a-t-il ajouté.
Lundi, une délégation turque s’était rendue à Bagdad. Une délégation irakienne est attendue en Turquie cette semaine, a indiqué le chef de la diplomatie turque Mevlüt Cavusoglu, cité par l’agence de presse progouvernementale Anadolu.
Les forces turques assiégées
Parallèlement aux propos officiels turcs, le porte-parole du Hached Chaabi, Youssef Kallabi a annoncé la libération de Baachiqa, où sont déployées des troupes turques.
Selon lui, s’exprimant à l’agence d’informations iranienne Tasnim, Kallabi a expliqué que cette libération a éloigné les Turcs de la ville de Mossoul.
« Aujourd’hui, et par une opération éclair, les forces irakiennes ont libéré Baachiqa et coupé tout contact entre Mossoul et le camp turc. Ceci empêche les forces turques assiégées de toute mobilisation vers Mossoul », a-t-il dit.
Et d’ajouter : « La présence des forces turques ne nous affectera point surtout après les avoir paralysées. Eloigner les forces turques des zones de combat fait partie du plan de libération de Mossoul ».
-Boucliers humains-
Quelque 1,5 million de personnes vivent encore à Mossoul et pourraient se retrouver piégées par les violents combats ou être utilisées comme boucliers humains par Daech comme ils l’ont fait dans d’autres villes qu’ils ont récemment perdues en Irak ces derniers mois.
Plusieurs organisations humanitaires ont réclamé l’instauration de couloirs sécurisés pour que les civils puissent fuir les combats, d’autant que la ville pourrait être soumise à un siège par les forces irakiennes.
La coordinatrice humanitaire de l’ONU pour l’Irak, Lise Grande, a déclaré que les gens n’étaient pour l’instant pas très nombreux à fuir Mossoul mais a fait état de possibles « importants mouvements de populations (…) d’ici cinq à six jours ».
– ‘Préparer des refuges’ –
Environ 200.000 personnes pourraient être déplacées « dans les deux premières semaines », un chiffre susceptible d’augmenter de façon significative au fur et à mesure de l’avancée de l’offensive, selon l’ONU.
« Les agences humanitaires se concentrent pour préparer des refuges dans trois régions prioritaires au sud de Mossoul où seront hébergés les premiers déplacés », a indiqué l’ONU.
Pour l’instant, les camps existants ne peuvent accueillir que quelques dizaines de milliers de déplacés alors qu’ils pourraient être des centaines de milliers.
La milice wahhabite takfiriste a perdu beaucoup de terrain ces derniers mois en Irak et en Syrie, mais continue notamment de contrôler Raqqa, dans le nord-est de la Syrie, et de mener des attaques suicides.
La perte de Mossoul serait un revers très douloureux pour Daesh, mais elle pourrait aussi conduire à un afflux vers l’Europe de combattants terroristes « prêts à en découdre », a mis en garde mardi le commissaire européen pour la sécurité, Julian King, dans un entretien au quotidien allemand Die Welt.
Sources: AFP, Tasnim
Source: Divers