La guerre en Syrie semble toucher à sa fin, la bataille d’Idlib, malgré les exhortations américaines de ne pas blesser leurs terroristes, se met en place et sous l’égide de la Russie une conférence internationale sur les réfugiés est prévue. Si tout cela arrive à son terme, ce sera la plus grande défaite, politique et militaire, du clan atlantiste, pouvant sérieusement remettre en cause la croyance en un monde unipolaire, ce qui explique la réaction de Trump.
Alors que des groupes terroristes importants se reconstituent dans la région d’Idlib, au risque de déséquilibrer la situation en Syrie, le Président américain, soutenu par les dirigeants européens, appelle Assad, la Russie et l’Iran à ne surtout pas intervenir. Leur mission était pourtant, notamment, de veiller à séparer les terroristes « modérés » des « terroristes-terroristes » qu’il faut combattre.
Et la presse de reprendre en chœur.
Un article du journal Le Parisien est un bijou en la matière. Tout d’abord, l’on apprend qu’il y a là-bas des « rebelles », non pas Daesh ou Al Nusra, et qu’ils sont les derniers à réellement présenter un danger dans le pays:
Cette province, où de nombreux civils et combattants insurgés ont été évacués par le régime de Damas au fur et à mesure de sa reconquête du pays, constitue le dernier bastion de la rébellion syrienne. La prise d’Idlib et de sa province constituerait donc une quasi-victoire finale pour Assad et ses partisans
Ensuite, dans toute l’objectivité journalistique requise, Assad est mentionné comme le « dictateur syrien » qui a l’outrecuidance de vouloir nettoyer son pays de groupes armés illégaux:
Le dictateur syrien souhaite lancer ses troupes à l’assaut de la ville le plus vite possible
Puis, une digression vers le représentant de l’ONU qui parle quand même de djihadistes en possession d’armes chimiques:
L’émissaire de la Syrie à l’ONU, Staffan de Mistura, s’est également inquiété de la présence de « 10 000 djihadistes » dans la ville, en possession d’armes chimiques. Idlib est en effet passée sous le contrôle du groupe salafiste Hayat Tahrir al-Cham, organisation liée à Al-Qaïda et considérée comme terroriste par les États-Unis.
Rappelez-vous les menaces des Etats-Unis de bombarder les forces militaires syriennes si une attaque chimique a lieu. Or, le représentant de l’ONU affirme que ces armes sont en possession des groupes terroristes … Surprenant, non?
Donc, si on relie ces différents éléments, que le journal ne veut surtout pas analyser, Assad, vilain dictateur soutenu par la méchante Russie, prépare une opération militaire contre un groupe de 10 000 extrémistes armés et en possession d’armes chimiques. Pourrait-on m’expliquer en quoi ce serait une mauvaise chose pour la population civile?
Les civils sont-ils plus en sécurité entre les mains de terroristes, qui peuvent à n’importe quel moment faire exploser une bombe chimique en toute impunité, Assad et la Russie seront, de toute manière, montrés du doigt, ou bien la population ne pourrait-elle vivre une vie normale sans ces terroristes qui tiennent la région?
Il semblerait que pour les Etats-Unis et la presse, très indépendante dans son unanimité, les peuples vivent beaucoup mieux sous le joug terroriste, qu’il faut donc préserver de toute intervention armée. C’est pourquoi Trump déclare qu’il serait vraiment « très fâché » si une intervention avait lieu à Idlib:
I think it’s a very sad situation in Idlib, the province, what’s going on there,” Trump told reporters in the Oval office on Wednesday as he met the emir of Kuwait. “If it’s a slaughter, the world is going to get very, very angry. And the United States is going to get very angry, too.”
« Je pense que c’est une situation très triste à Idlib, dans la province, ce qui se passe là-bas » , a déclaré M. Trump aux journalistes du bureau ovale mercredi alors qu’il rencontrait l’émir du Koweït. « Si c’est un massacre, le monde va devenir très, très en colère. Et les États-Unis vont se fâcher aussi. »
Pendant ce temps-là, la Russie a reconnu avoir bombardé des installations nécessaires aux terroristes le 4 septembre.
Pour enfoncer le clou de la prochaine victoire sur les terroristes pro-occidentaux en Syrie, la Russie annonce la préparation d’une Conférence internationale sur les réfugiés qui se tiendra en Syrie même et tous les pays qui ont accueilli des réfugiés syriens y sont invités, ainsi que les organisations de l’ONU qui gèrent cette question. Le but de cet évènement historique est de trouver par le discours direct un moyen de normaliser la situation en Syrie, de régler les problèmes techniques qui bloquent le retour des civils en Syrie.
Ceci marquerait non seulement la défaite militaire, mais aussi politique des Etats-Unis. Une défaite retentissante aux conséquences géopolitiques imprévisibles. Un monde unipolaire américano-centré n’est possible que tant que les Etats-Unis dominent politiquement et militairement la situation, or ce n’est plus le cas. En perdant leur bras armé, en plus de la remise en cause du dollar comme monnaie d’échange internationale suite à la politique hystérique des sanctions et à l’hypertrophie de l’extraterritorialité américaine, les Etats-Unis ont eux-mêmes scié la souche de leur pouvoir, fragilisé les instruments de leur puissance. Il ne reste donc plus que l’intimidation, signe de faiblesse. Or, les Etats se soumettent aux forts, pas aux faibles.
Par Karine Bechet-Golovko
source: Russie politics