Les récentes attaques de drones contre des installations pétrolières saoudiennes, revendiquées par le mouvement houthi Ansarullah, ravivent la crainte d’attentats commis avec ces petits appareils sans pilotes, contre lesquels aucune parade efficace n’existe encore.
En janvier déjà, quand ils étaient parvenus à faire sauter un drone chargé d’explosif au-dessus d’une tribune pendant un défilé sur une base aérienne yéménite, tuant huit militaires pro Hadi dont le chef d’état-major adjoint, cela avait alarmé les services anti-terroristes du monde entier.
« C’est la menace dissymétrique par excellence: d’un côté un petit appareil simple, facile à fabriquer et à utiliser et d’un autre, pour lutter contre, un dispositif énorme. C’est quasiment mission impossible », déclare à l’AFP l’ancien chef d’un service français de renseignement, qui demande à rester anonyme.
De nombreuses entreprises, dans les pays les plus avancés, travaillent à mettre au point des parades, mais pour l’instant aucune n’a fait ses preuves, face à des appareils furtifs, petits, difficiles à repérer et encore plus à éliminer.
« Il y a des parades naissantes », ajoute la même source. « Des dispositifs anti-drones existent, mais ne sont efficaces qu’à courte distance. On sait protéger certaines zones bien précises, par exemple les centrales nucléaires, les Champs-élysées le jour du 14 juillet, le palais de l’ةlysée ».
« On peut perturber ou couper la transmission entre le drone et son pilote, s’il y en a une », ajoute-t-il. « S’il n’y en a pas, si le drone est programmé à exploser quand il parvient à un point GPS, on ne peut pas faire grand-chose. Il faut pouvoir le détecter et tenter de le descendre avec des moyens traditionnels : tirer dessus. Mais il faut le voir et avoir le temps de tirer. Pas facile ».
« Rustique mais efficace »
Un haut gradé de l’armée française, qui lui aussi demande à ne pas être identifié, précise : « Il y a une grande imagination à l’œuvre au Moyen-Orient et dans le Golfe. L’innovation est aujourd’hui largement employée par des groupes non-étatiques ou des etats qui veulent se différencier des grandes armées qui opèrent dans la région ».
« Nous pensions pendant des années avoir un avantage technologique mais nous le voyons se réduire », ajoute-t-il. Nous avons un effort de modernisation de nos doctrines à faire ».
Pendant qu’ils pouvaient travailler tranquillement dans les ateliers de leur « émirat » auto-proclamé en Syrie et en Irak, les artificiers du groupe Daech(EI) avaient mis au point, à partir de drones du commerce modifiés, des machines de mort capables de lâcher des grenades sur leurs cibles avec une précision parfois stupéfiante.
Les images de caméras embarquées, qu’ils diffusaient sur internet, d’obus ou de grenade tombant sur des blindés ou des soldats de l’armée irakienne ou des miliciens kurdes anti-EI avaient eu un effet dévastateur.
« Des contre-mesures universelles contre ça : c’est simple, il n’y en a pas », a admis le même ancien chef d’un service de renseignement.
Ce précédent est d’autant plus inquiétant que certains experts en drones de l’EI étaient des Occidentaux dont certains se sont fondus dans la nature après la perte par l’EI des territoires qu’il contrôlait, et sont susceptibles de rentrer dans leurs pays d’origine sans être repérés.
Pour l’expert Paul Guermonprez, auteur du livre « Les drones débarquent »(FYP Editions), « si, comme cela semble être le cas avec les drones des Houthis, ce sont des appareils envoyés un peu comme des missiles guidés, avec un point GPS à atteindre, il n’y a pour l’instant rien qu’on puisse faire pour les intercepter ».
« Ils explosent à l’arrivée sur le point GPS ou à l’impact. Les précurseurs étaient les V2 allemands pendant la 2ème guerre mondiale : ils avaient une direction, une distance, et au bout d’un moment ils tombaient et ils explosaient. Pas de système radio à intercepter. C’est rustique mais très efficace », ajoute-t-il.
Dans la liste des parades actuellement à l’étude, les experts citent des drones « tueurs de drones », qui s’approchent du drone agresseur et le capturent avec un filet, des systèmes radars embarqués à bord de drones chargés de détecter leurs cibles le plus tôt possible, des faisceaux lasers pour détruire ou endommager les drones agresseurs à distance.
L’emploi d’aigles pour capturer les drones, technique née aux Pays-Bas et testée sur une base aérienne française, n’a pour l’instant pas donné les résultats espérés.
Source: Avec AFP