Après avoir annoncé ce lundi l’adoption de la chloroquine pour les «cas aigus», le ministre algérien de la Santé a ordonné qu’elle soit désormais administrée en traitement à tous les cas confirmés.
Le 30 mars, l’Algérie a annoncé dans un communiqué officiel avoir adopté la chloroquine pour les «cas aigus» et relancé sa production locale. Mardi 31 mars, le bilan est passé à 715 infectés et 44 décès, et les autorités sanitaires du pays ont décidé d’appliquer ce médicament, utilisé habituellement comme thérapie contre le paludisme, pour tous les cas confirmés.
Cette annonce a été faite le jour même par le ministre algrien de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Abderrahmane Benbouzid, sur la Chaîne 3 de la Radio algérienne.
«Le Comité scientifique installé auprès du ministère de la Santé, s’appuyant également sur l’avis d’autres spécialités et experts, a décidé de démarrer le traitement à la chloroquine sur tous ceux qui sont déclarés positifs au Covid-19 ainsi que sur tous ceux qui auront des signes de contamination», a-t-il déclaré, cité par Algérie Eco.«À nos yeux, et sur la base des expériences vécues, nous espérons que cette méthode permettra de réduire le nombre des personnes atteintes.»
L’usage de la chloroquine défendu par le ministre
Un membre du Comité scientifique installé auprès du ministère de la Santé, Smail Mesbah, avait annoncé le 24 mars le début de l’usage de la chloroquine pour traiter certains malades infectés par le coronavirus.
Tandis que le traitement à la chloroquine fait débat en France, le ministre algérien de la Santé a défendu le 26 mars ce choix lors d’une visioconférence avec un expert du ministère chinois de la Santé.
«Le choix de cet antipaludique pour soigner les malades atteints du Covid-19 s’est fait au regard des expériences menées dans d’autres pays qui ont un système de santé de qualité», a-t-il expliqué, citant l’exemple de la Chine.
L’OMS appelle à la prudence
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a cependant appelé à la prudence concernant la chloroquine, en raison notamment du faible nombre de patients traités jusqu’à présent par ce biais.
Après une série d’essais en Chine, la France a décidé lundi d’administrer ce traitement aux malades souffrant de «formes graves» du nouveau coronavirus, mais pas aux formes «moins sévères».
Le CHU d’Angers a annoncé mardi le lancement d’une vaste étude «aux standards scientifiques et méthodologiques les plus élevés», portant sur 1.300 patients atteints du Covid-19, afin de «clore le débat» sur l’efficacité d’un dérivé de la chloroquine.
UE : La chloroquine et ses dérivés réservés aux “programmes d’urgence”
Le traitement contre le paludisme chloroquine et son dérivé l’hydroxychloroquine ne doivent être utilisés pour traiter le Covid-19 que dans le cadre d’essais cliniques ou de « programmes d’urgence », a averti mercredi l’Agence européenne du médicament (EMA).
Plusieurs pays dans le monde ont ouvert la possibilité d’administrer à des patients atteints par le coronavirus ces médicaments connus pour avoir des propriétés antivirales, sans attendre les résultats d’essais cliniques actuellement menés sur leur efficacité.
Si des études préliminaires en France et en Chine ont conclu à des résultats prometteurs, l’efficacité de la chloroquine et de l’hydroxycholoroquine « reste à démontrer », et ces molécules ne doivent être utilisées dans le traitement du Covid-19 qu’en cas d’absolue nécessité, insiste l’autorité de régulation européenne.
« Il est très important que les patients et les professionnels de santé n’utilisent la chloroquine et de l’hydroxycholoroquine que dans les indications autorisées ou dans le cadre d’essais cliniques ou de programmes d’urgence au niveau national pour le traitement du Covid-19 », détaille-t-elle.
En effet, tant la chloroquine, dérivé synthétique de la quinine, que l’hydroxychloroquine, utilisée habituellement pour le traitement du lupus et de la polyarthrite rhumatoïde, peuvent avoir de graves effets secondaires, en particulier s’ils sont pris en quantité supérieure à la dose recommandée ou en association avec d’autres médicaments.
« Ils ne doivent pas être utilisés sans ordonnance et sans surveillance médicale; et les prescriptions ne doivent pas se faire en dehors des indications autorisées sauf dans le cadre d’un essai clinique ou de protocoles validés dans chaque pays », ajoute l’EMA.
L’engouement suscité par l’espoir placé dans ces traitements fait aussi craindre l’apparition de tensions d’approvisionnement pour les patients habituellement traités par hydroxychloroquine.
La chloroquine provoque une dizaine d’hospitalisations en Nouvelle-Aquitaine
En une semaine seulement, la prise de chloroquine en automédication a entraîné l’hospitalisation de 10 patients de Nouvelle-Aquitaine en soins intensifs de cardiologie, selon les autorités sanitaires régionales.
Après la diffusion d’un communiqué exposant les dangers de la prise d’hydroxychloroquine en automédication contre le Covid-19, l’Agence régionale de Santé de Nouvelle-Aquitaine apporte des précisions quant aux cas recensés dans la région, rapporte ActuBordeaux.
Le Dr Daniel Habold, directeur de l’agence, affirme avoir eu connaissance de 10 cas souffrant de troubles cardiaques après s’être administrés de la chloroquine en Nouvelle-Aquitaine. Tous les patients ont fait un séjour plus ou moins long en soins intensifs de cardiologie, détaille-t-il avant d’évoquer «d’autres cas» potentiels.
«En tous cas, pour tous, cela doit être une invitation à la prudence!», insiste M.Habold.
Risque de crise cardiaque
Dans son communiqué, l’ARS rappelle que «comme pour tout médicament, il est indispensable pour les patients de respecter la prescription médicale et de ne pas l’associer à d’autres médicaments sans avis médical».
Pour sa part, le Dr Habold explique que l’hydroxychloroquine, qui étaient en vente libre il n’y pas si longtemps en France sous le nom de Plaquénil, peut entraîner «des troubles graves comme ce que nous appelons le syndrome de QT long, qui est un allongement de l’espace de repos du battement cardiaque, qui derrière amène des torsades de pointes, et potentiellement des crises cardiaques».
Source: Avec AFP