La télévision syrienne Syria TV a révélé les détails d’une rencontre à Damas entre le président syrien par intérim, Ahmad al-Charaa, et une délégation de Dar al-Fatwa, la plus autorité religieuse sunnite au Liban, pendant laquelle la question des détenus syriens dans les prisons libanaises a été au coeur des discussions.
Selon Syria TV, lors de la réception de la délégation conduite par le Grand Mufti de la République libanaise, Cheikh Abdel Latif Darian, al-Charaa a exprimé son profond mécontentement face à la réticence des autorités libanaises à aborder la question des détenus.
Il a souligné que « le mépris répété de Beyrouth pour cette question humanitaire n’est plus acceptable », selon ses propres termes.
Le président syrien aurait informé la délégation libanaise de sa décision de charger le ministre syrien des Affaires étrangères, Assaad al-Chaibani, de se rendre à Beyrouth dans les prochains jours afin d’aborder spécifiquement cette question. Ce ministre avait soulevé cette question le mois de mai dernier, avec le Premier ministre libanais Nawwaf Salam.
Selon Syria TV, le président syrien intérimaire aurait menacé que cette visite constituerait « la dernière opportunité diplomatique » avant que Damas ne s’engage dans une escalade politique et diplomatique progressive contre le gouvernement libanais. Sa résolution serait pour lui « une priorité absolue, précédant toute discussion sur la coopération, le rétablissement des relations, voire les itinéraires d’accueil des réfugiés ».
Dans ce contexte, Syria TV a rapporté que Damas envisage déjà des options d’escalade progressive, à commencer par le gel de certains canaux sécuritaires et économiques. Il est probable que Damas prenne ultérieurement des mesures plus drastiques, telles que la fermeture des points de passage terrestres, l’imposition de restrictions strictes au passage des camions libanais, voire la remise en question de la coopération conjointe en matière de sécurité frontalière.
La télévision d’Etat syrienne a rapporté que le ministère syrien de l’Information a nié vouloir prendre des mesures d’escalade à l’encontre du Liban tout en assurant que ce dossier constitue une priorité pour lui, insistant pour qu’il soit réglé via les canaux officiels des deux pays.
Le Président libanais Joseph Aoun a indirectement évoqué ce contentieux ce vendredi. Assurant que son pays veille a de bonnes relations avec les Etats voisins, il a mis l’accent sur deux constantes principales : la première consiste à entretenir de bonnes relations avec le nouveau gouvernement syrien et la non-ingérence dans les affaires internes des deux pays. Et d’assurer que la stabilité du Liban est partie intégrante de celle de la Syrie.
Plus de 2 100 prisonniers syriens sont incarcérés dans les prisons libanaises, dont 1 756 dans les prisons principales. Ils représentent environ 30 % de la population carcérale libanaise. Environ 350 d’entre eux ont été condamnés définitivement, et la majorité des prisonniers restants n’ont pas été jugés depuis des années.
Parmi eux figurent des centaines de prisonniers accusés de terrorisme, d’appartenance à des organisations djihadistes et à des factions armées, et d’attaques contre l’armée libanaise.
Avec la chute du régime de Bachar el-Assad, les discussions entre le Liban et la Syrie ont été rouvertes, mais elles n’ont pas encore atteint un stade avancé.
En mars 2025, un responsable judicaire avait assuré pour l’AFP que Beyrouth est prête à remettre à Damas plus de 700 prisonniers syriens.
Un accord judiciaire entre les deux pays remontant à 1951 sur les conditions d’extradition des prisonniers, stipule qu’elle soit individuelle et non collective. Ce qui exige que chaque prisonnier soit formellement demandé par le procureur général syrien au procureur général libanais. La personne extradée doit également être recherchée en Syrie. En outre, la justice libanaise a le droit de refuser l’extradition si le crime est de nature politique ou a été commis sur le territoire libanais.
Source: Divers