Donald Trump est inculpé dans une affaire d’achat du silence d’une star du porno en 2016 et va devoir comparaître devant la justice pénale de New York, un fait historique sans précédent pour un ancien président américain, qui a dénoncé le jeudi 30 mars une « persécution politique ».
L’ancien locataire de la Maison Blanche, qui rêve de la reconquérir en 2024, est officiellement inculpé par le procureur de Manhattan Alvin Bragg, dépendant de la justice de l’Etat de New York, pour une affaire de versement et de remboursement, juste avant la présidentielle de novembre 2016, de 130.000 dollars à l’actrice et réalisatrice de films X, Stormy Daniels.
« Nous avons contacté ce soir l’avocat de M. Trump pour coordonner sa reddition devant le procureur du district de Manhattan pour une audience d’inculpation devant une cour suprême », un tribunal, a indiqué dans un communiqué un porte-parole du parquet local, après qu’un grand jury — panel de citoyens aux pouvoirs d’enquête qui travaille de concert avec des procureurs — eut voté cette inculpation de l’ex-président des Etats-Unis.
Cet acte et les poursuites restent pour l’instant « sous scellés » et la date de l’audience n’est pas encore connue.
CNN évoque une trentaine de chefs d’inculpation tournant autour de fraudes pour dissimuler la circulation et la comptabilité fin 2016 des 130.000 dollars.
Le 45e président des Etats-Unis a brocardé dans un communiqué une « persécution politique et une ingérence dans l’élection » présidentielle de 2024.
Il a dénoncé une « chasse aux sorcières » qui « se retournera contre Biden », le président démocrate élu en novembre 2020 et que M. Trump accuse depuis plus de deux ans d’avoir « volé » sa victoire.
Sur son réseau social Truth Social, le milliardaire, qui a bouleversé depuis 2015 le système politique et l’équilibre des pouvoirs aux Etats-Unis, a torpillé des adversaires qu’il n’a pas nommés: « Ils me poursuivent de manière bidon et honteuse parce qu’ils savent que je suis aux côtés du peuple américain et que je ne peux pas bénéficier d’un procès équitable à New York! », sa ville natale majoritairement démocrate.
L’un des rivaux républicains de Trump pour 2024, le gouverneur de Floride Ron DeSantis, a jugé cette inculpation « contraire aux valeurs de l’Amérique » et assuré que son Etat, où réside l’ancien président, ne répondrait pas favorablement « à une demande d’extradition » de l’Etat de New York.
Même soutien sans faille du président républicain de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, pour qui « le peuple américain ne tolérera pas cette injustice » et un « abus de pouvoir sans précédent » de la part du procureur Bragg.
Stormy Daniels, Stephanie Clifford de son vrai nom, qui a collaboré avec la justice depuis près de six ans, s’est exclamée sur Twitter qu’elle ne voulait « pas renverser son champagne ». Son avocat Clark Brewster a lancé: « personne n’est au-dessus de la loi ».
Du côté des démocrates, le parlementaire Adam Schiff, a jugé que « l’inculpation et l’arrestation d’un ancien président étaient uniques dans toute l’Histoire américaine ».
Depuis des années, la justice new-yorkaise cherche à déterminer si l’ex-président républicain de 76 ans s’est rendu coupable de fausses déclarations, une infraction mineure, ou de manquement aux lois sur le financement électoral, un délit pénal, en ayant versé de l’argent à Stormy Daniels, juste avant sa victoire à la présidentielle de novembre 2016.
Dans quel but? Pour qu’elle taise une supposée relation extraconjugale datant de 2006.
Dans les jours qui viennent — peut-être la semaine prochaine selon des médias locaux — M. Trump devra donc se « rendre » au tribunal de Manhattan pour se voir signifier son inculpation par un juge, être brièvement et symboliquement placé « en état d’arrestation », photographié et ses empreintes digitales relevées.
Il devra plaider coupable ou non coupable.
L’homme clé du dossier s’appelle Michael Cohen: ancien avocat de Donald Trump devenu son ennemi, il avait payé Stormy Daniels en 2016 et s’était fait rembourser. Après de la prison, il collabore à l’enquête à partir de fin 2018 et a témoigné plusieurs fois devant le grand jury.
La presse bruissait de rumeurs en mars d’une mise en cause du milliardaire républicain, cerné par ailleurs par d’autres dossiers judiciaires.
Il avait réussi un coup d’éclat politique, le 18 mars, en affirmant sur son réseau Truth Social qu’il serait « arrêté » et comparaîtrait à New York trois jours plus tard. Mais rien ne s’était passé.