Le Premier ministre Hassan Diab a adressé vers 19 h30 samedi soir 8 aout un message aux Libanais. Il a notamment dit :
« Quatre jours se sont écoulés depuis l’explosion qui a frappé le port de Beyrouth.
Comme je l’ai dit, quelques heures après l’explosion, le Liban a été frappé par une énorme catastrophe.
Nous vivons sous le poids de cette catastrophe qui a eu des effets dévastateurs, non seulement en termes de pertes humaines, y compris les martyrs et les blessés, ou bien de pertes matérielles touchant les maisons, les institutions, les magasins et divers secteurs; mais aussi en termes d’effets psychologiques énormes et persistants sur le peuple libanais.
J’ai promis aux Libanais que je n’accepterais pas que cette catastrophe passe sans que les responsables soient tenus de rendre des comptes.
Aujourd’hui, je veux affirmer fermement que la responsabilité n’épargnerait personne.
Tous les responsables de cette catastrophe doivent faire l’objet d’une enquête, et répondre aux questions des gens avant celles de la justice.
Comment se fait-il qu’un entrepôt aussi dangereux soit conservé depuis 2013 sans qu’aucune mesure ne soit prise!
N’est-il pas étrange que la question ne soit mentionnée dans aucune séance du Conseil suprême de la défense, sur une période de 7 ans?
Pourquoi les matériaux sont-ils restés pendant 7 ans au port dans un entrepôt qui ne répond pas aux spécifications de stockage de ce type de matériaux? Qui a bénéficié du stockage des matériaux au port?
L’enquête révélera les faits, et elle ne prendra pas trop de temps; les mesures prises par la justice jusqu’à présent sont révélatrices du sérieux de l’enquête. Elles montrent également que les enquêtes seront menées à terme et s’étendront à tous les acteurs de cette catastrophe qui a infligé une profonde blessure et une grande douleur à tous les Libanais.
Nous agonisons tous. Nous souffrons tous.
Gérer la calamité qui a frappé le pays relève d’une grande responsabilité.
Une seule partie ne pourrait pas, seule, supporter la situation actuelle.
Le pays ne peut pas tolérer les surenchères politiques. La douleur est trop grande, et chacun est tenu de laisser de côté ses comptes électoraux et son discours populiste. Aujourd’hui, nous devons assumer notre responsabilité nationale. Le pays vit une catastrophe massive, dépassant de loin sa résilience.
Nous témoignons d’une grande calamité, et nous traversons une étape très difficile. Pourtant, pendant 4 jours, de fausses nouvelles ont tenté de couper l’aide acheminée au Liban! Comment se fait-il qu’une personne ayant un minimum de patriotisme et de sens des responsabilités puisse consacrer tout son temps à diffuser de fausses nouvelles? C’est honteux !
Le Liban est en deuil, le peuple souffre, le pays a besoin de toute l’aide et de tout le soutien possible, et le gouvernement remercie tous ceux qui se sont tenus aux côtés du Liban pendant cette épreuve difficile.
Nous ne nous accrochons pas au pouvoir. Nous cherchons une solution nationale à même de sauver le pays.
Nous sommes entrés en fonction dans des circonstances exceptionnelles, au lendemain de la révolution du 17 octobre qui a exprimé la colère des Libanais face à la réalité qu’ils vivent, entachée de décennies de corruption; l’explosion qui s’est produite par la suite, il y a 4 jours, est l’un des résultats de cette corruption.
La corruption et la mauvaise gestion nous ont conduits au désastre actuel.
Le gouvernement, avec sa déclaration ministérielle, sur la base de laquelle il a obtenu la confiance du Parlement, s’est conformé aux exigences de la révolution.
Nous avons assumé nos responsabilités et nous savions que le pays était dans un état d’effondrement politique, financier et administratif.
En réalité, cependant, nous ne pouvons sortir de la crise structurelle du pays qu’en organisant des élections législatives anticipées afin de générer une nouvelle classe politique et un nouveau parlement.
Aujourd’hui, à la lumière de la catastrophe que nous vivons, nous avons besoin d’une solidarité commune pour surmonter cette étape critique.
Je suis conscient des préoccupations et des questions des citoyens concernant les conséquences et la gestion de la catastrophe.
Quant aux martyrs, rien ne les compense. Malheureusement, nous les avons tous perdus, mais la perte de leurs parents, de leurs familles et de leurs enfants est certainement plus grande. Des familles ont perdu leur gagne-pain, des mères et des pères ont perdu leurs enfants, des enfants sont devenus orphelins…
L’ampleur de la catastrophe est plus grande que ce que l’on pourrait imaginer.
Il y a des blessés; certaines blessures laisseront des traces pour toujours.
Des maisons ont été détruites; d’autres se sont effondrées ou ont été endommagées. Des gens sont devenus des sans-abri.
Il y a des gens qui ont perdu leurs biens; il y a des gens qui ont perdu leur emploi et leurs moyens de subsistance.
Nous sommes en état d’urgence, pas seulement au niveau de la catastrophe et de sa gestion. L’état d’urgence a trait au destin et à l’avenir du pays.
C’est pourquoi j’invite tous les partis politiques à se mettre d’accord sur la prochaine étape. Ils n’ont pas beaucoup de temps. Je suis prêt à assumer la responsabilité pendant deux mois supplémentaires jusqu’à ce qu’ils se mettent d’accord.
La mise en œuvre des réformes structurelles ne doit pas être entravée afin de sauver le pays.
Lundi, je soumettrai au Conseil des ministres un projet de loi pour la tenue d’élections parlementaires anticipées.
Notre tragédie est grande, et nous avons besoin de décisions exceptionnelles pour y faire face.
Je pense qu’il est grand temps de faire preuve d’audace pour affronter les faits tels qu’ils sont.
Les Libanais ne feront preuve d’aucune pitié envers tous ceux qui entravent le processus de réforme du pays.
En toute honnêteté, je suis entré en fonction, guidé par cet esprit et ces principes, et je soutiens les aspirations des Libanais au changement…
Que Dieu bénisse les âmes de nos martyrs et guérisse nos blessés.
Que Dieu bénisse le Liban !
Source: Avec ANI