La Turquie a annoncé jeudi de nouvelles manœuvres militaires en Méditerranée orientale et l’extension de ses recherches dans une zone riche en hydrocarbures, au risque d’aggraver des tensions déjà vives avec la Grèce.
Signe de son refus d’abandonner son bras de fer avec Athènes et ses soutiens, Ankara n’a par ailleurs pas hésité à accuser la France d’envenimer la situation en se comportant en « caïd ».
Face à cette escalade marquée par les manœuvres militaires rivales la veille de la Grèce et de la Turquie en Méditerranée, l’Allemagne, qui s’efforce de calmer les esprits par une médiation, a plaidé jeudi pour une « solution diplomatique ».
Mais, sur le terrain, l’heure est aux tambours de guerre : la marine turque a annoncé que le navire sismique Oruç Reis, dont la mission devait prendre fin jeudi, effectuerait des recherches d’hydrocarbures dans une zone revendiquée par la Grèce jusqu’au 1er septembre.
C’est justement le déploiement de l’Oruç Reis et de son escorte militaire au sud de l’île grecque de Kastellorizo, le 10 août, qui a suscité l’ire d’Athènes et déclenché l’accroissement des tensions toujours en cours.
L’extension des opérations de l’Oruç Reis permet de voir « qui veut une désescalade et qui ne la souhaite pas et qui prétend vouloir un dialogue et qui le souhaite vraiment », a commenté une source diplomatique grecque.
Signe que les choses ne risquent pas de s’améliorer, le ministre turc de la Défense Hulusi Akar a assuré jeudi que l’exploration gazière d’Ankara durerait « aussi longtemps » que ce serait « nécessaire ».
La marine turque a aussi annoncé jeudi qu’elle procèderait à des « exercices de tir » les 1er et 2 septembre au large d’Iskenderun, dans une zone située au nord-est de l’île de Chypre.
Mais ces manœuvres n’inquiètent pas Athènes car elles se déroulent loin de la Grèce, a dit une source militaire grecque à l’AFP.
Face à cette situation volatile, les manœuvres militaires rivales « doivent cesser » pour permettre le dialogue entre Athènes et Ankara, a déclaré jeudi le ministre allemand des Affaires étrangères Heiko Maas.
« Les parties ne vont pas s’asseoir à la même table alors que des bâtiments de guerre se font face » dans la région, a regretté M. Haas au début d’une réunion des ministres européens qui se prolongera vendredi.
Trump inquiet
Dans un entretien téléphonique avec le chef d’état turc Recep Tayyip Erdogan mercredi, Donald Trump a lui aussi exprimé son inquiétude à propos de « la hausse des tensions » entre la Grèce et la Turquie, toutes deux alliées au sein de l’Otan, selon la Maison Blanche.
M. Erdogan a affirmé au cours de cette conversation que son pays n’était pas celui qui « provoquait l’instabilité en Méditerranée orientale », d’après Ankara.
« La Grèce est prête à une désescalade significative à condition que la Turquie arrête immédiatement ses actions de provocation », a de son côté déclaré le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis qui s’est également entretenu mercredi avec le président américain au téléphone.
Ankara exprime régulièrement son agacement au sujet de l’intervention des pays européens, en particulier de la France, et des Etats-Unis dans son contentieux avec la Grèce.
Le différend sur les frontières maritimes entre la Turquie et la Grèce est ancien, mais il a pris une toute autre dimension avec la découverte, depuis une décennie, d’immenses réserves de gaz naturel en Méditerranée orientale.
Le ministre turc de la Défense a par ailleurs accusé jeudi la France de contribuer à l’escalade en déployant des avions de guerre à Chypre pour exprimer son soutien à Athènes.
« Le temps des caïds est révolu. Vous n’avez aucune chance d’obtenir quoi que ce soit de nous en agissant de la sorte », a affirmé M. Hulusi Akar, qui a en outre appelé la Grèce à un dialogue direct avec la Turquie.
« Nos voisins grecs devraient savoir qu’ils ne pourront rien obtenir en appelant les pays comme la France (…) Nous, les Turcs et les Grecs, devons régler nos problèmes nous-mêmes par le dialogue ».
La Grèce a plusieurs fois réclamé, sans succès, des « sanctions » de l’Europe à l’encontre de la Turquie.
Athènes pourrait reformuler sa demande à l’occasion de la réunion jeudi et vendredi des 27 de l’UE à Berlin.
Source: AFP