Plus les experts scrutent les facteurs qui ont contribué à la faillite économique du Liban, plus ils se rendent compte de l’importance du rôle américain.
Selon l’économiste libanais Ziad Nasredddine, c’est celui qui possède les décisions économiques qui a provoqué l’effondrement. C’est-à-dire celui qui mettait au point les politiques économiques, monétaires et financières. Il fait allusion surtout à l’équipe du courant du Futur du clan des Hariri. C’est lui qui a présidé la majeure partie des gouvernements depuis la fin de la guerre civile. C’est l’un des partis libanais le plus pro américain, aux côtés des Forces libanaises et des Kataeb (Phalanges) qui avaient pendant la guerre civile collaboré avec l’entité sioniste.
M.Nasredddine constate surtout que toutes ces politiques sont américaines et qu’elles ont été exécutées sous la supervision des Américains. Et ces derniers semblent continuer dans leurs manoeuvres .
Se référant à une rencontre qui avait été organisée entre le 26 mai et le 4 juin derniers, par l’institut Washington pour le Proche-Orient, intitulé La conférence de préparation à la politique du Liban, il constate qu’elle avait été consacrée pour discuter du nouveau programme politique pour ce pays.
« Elle permet d’avoir une idée claire sur les plans futurs des Etats-Unis concernant le Liban », fait-il remarquer dans un article qu’il a écrit pour le site web de la télévision d’information libanaise al-Mayadeen.
La première démarche d’après lui consistera à investir dans l’effondrement jusqu’à l’échéance législative qui devrait se tenir en 2022.
Les ONG que les Américains financent et commanditent au pays du Cèdre se préparent pour occuper la tribune législative. Ils misent surtout sur celles qui œuvrent contre le Hezbollah et contre le Courant patriotique libre du président Michel Aoun.
L’autre objectif à réaliser concernera la délimitation des frontières maritimes avec l’entité sioniste et la distribution et le partage avec elle des ressources gazières maritimes. Durant les dernières années, les pourparlers sur ce dossier, parainnés par l’ONU avec la participation des USA ont toujours achoppé sur la parti pris américain en faveur des revendications des Israéliens qui veulent confisquer des zones maritimes libanaises de sorte qu’il puisse avoir le plus gros lot de gaz.
Or selon le plan américain, l’exploitation de cette ressource sur laquelle misent les Libanais pour sortir de la crise devrait relever du ressort des compagnies internationales qui pourront imposer la version israélienne de la délimitation.
L’économiste libanais dit aussi dans son article s’attendre à une intensification des sanctions contre ceux qui entravent ces plans, et là, « il faudra prévoir un jeu de rôle entre la France et l’Europe d’une part et les USA de l’autre » pour maximaliser leur efficacité.
Il perçoit de même dans le plan américain une fédéralisation des institutions économiques libanaises et à l’achèvement des institutions étatiques libanaises pour les remplacer par des institutions occidentales ou soi-disant internationales. Ceci avait commencé avec l’affaire de l’assassinat de l’ex-Premier ministre Rafic Hariri qui a été confiée à un Tribunal spécial international, qui a excellé dans ses déboires aussi bien pendant le cours de l’enquête que dans son verdict.
Selon Nasreddine, les USA ont œuvré pendant ces trois dernières décennies pour s’assurer de l’échec des institutions économiques et étatiques libanaises afin de pouvoir par la suite les confisquer.
De même pour la Banque du Liban, elle devrait être capitalisée de nouveau, puis partiellement privatisée et reliée au système banquier numérique sous la supervision des Etats-Unis.
Se référant toujours à la rencontre qui a eu lieu aux Etats-Unis, il évoque qu’une aide de 25 milliards de dollars est prévue pour ce plan. Elle devrait servir entre autres à changer les équations électorales en faveur des ONG financées par les Américains, à gagner le dossier du gaz en faveur des compagnies qu’ils parrainent, et à privatiser les ports.
Le tout avec pour objectif final d’en finir une fois pour toute avec la résistance, de prendre le contrôle du Liban et de l’introduire dans le processus de normalisation avec ‘Israël’. De quoi rappeler d’après lui le fameux projet du Nouveau Moyen-Orient dont l’annonce avait été faite pour la première fois par l’ex secrétaire d’état américaine Condoleza Rice, pendant la guerre 2006. La victoire du Liban l’avait alors avorté.