Aussi bien Bagdad qu’Erbil ont rejeté la tenue et l’appel lancé par un colloque organisé dans le Kurdistan irakien, plaidant en faveur de la normalisation entre l’Irak et ‘Israël’.
Selon l’AFP, quelque 300 Irakiens se sont réunis vendredi 24 septembre dans la capitale du Kurdistan irakien, dans le cadre d’une conférence parrainée par une organisation américaine, le Center for Peace Communications (CPC). Un think-tank new-yorkais engagé sur le dossier de la normalisation entre l’entité sioniste. L’Israélien Chemi Peres, président d’une fondation fondée par son père, le défunt président Shimon Peres, s’est exprimé lors du colloque par vidéo.
Gouvernement de Bagdad: « Réunion illégale »
« C’est une réunion illégale », a objecté ce samedi le gouvernement central de Bagdad qui a exprimé son « rejet catégorique » du colloque, estimant qu’il « ne représente pas (l’opinion) des populations et des habitants des villes irakiennes, au nom duquel ces personnalités tentent de parler ».
Le ministère de l’intérieur du gouvernement du Kurdistan a, quant à lui, assuré que la rencontre a été organisée à son insu, sans son consentement.
« Elle n’exprime nullement et en aucun cas la position du Kurdistan et des mesures appropriées seront prises pour savoir comment la réunion s’est tenue », a-t-il souligné dans un communiqué.
A noter que des médias occidentaux ont souvent rendu compte d’échanges et de liens étroits entre des dirigeants kurdes et l’entité israélienne.
« Sunnites et chiites à la conférence »
Selon le fondateur du CPC, Joseph Braude, expert américain d’origine juive irakienne, il y avait 300 participants à la rencontre « des sunnites et chiites qui sont venus « de six gouvernorats -Bagdad, Mossoul, Salaheddine, Al-Anbar, Diyala et Babylone », a indiqué à l’AFP. « Il y a aussi des chefs de tribus de ces gouvernorats, des intellectuels, des écrivains », a-t-il précisé, joint par téléphone par l’AFP.
« Nous demandons notre intégration aux accords d’Abraham. Tout comme ces accords prévoient des relations diplomatiques entre les signataires et ‘Israël’, nous aussi nous voulons des relations normales avec ‘Israël’ « , selon le communiqué de clôture, lu par une intervenante, Sahar al-Taï, directrice de recherches au ministère de la Culture à Bagdad.
« Aucune force, locale ou étrangère, n’a le droit de nous empêcher de lancer un tel appel », a-t-elle dit.
Parmi les intervenants irakiens, selon l’AFP, un ancien général et un des chefs de la « Sahwa », milices tribales qui avaient combattu les jihadistes aidées par Washington. « Assez d’animosité. Il faut ouvrir une nouvelle page de coopération et de paix », a indiqué à l’AFP cheikh Rissan al-Halboussi, venu d’Al-Anbar. « Tu ne vas pas pouvoir du jour au lendemain dire au citoyen +Allons normaliser avec Israël+ mais avec le temps les idées changent ».
Halboussi répond à Halboussi
La réponse à ce chef tribal sunnite est venue de la part de son proche, le chef du Parlement irakien Mohamad al-Halboussi qui a assuré que la position de l’Irak de la cause palestinienne est immuable.
« Notre position est de refuser ce qu’on appelle la normalisation avec l’entité sioniste et elle ne changera pas en raison d’une bande de harceleurs embauchés », a-t-il assuré sur Twitter.
« Il faut prendre les mesures juridiques fermes pour faire taire ces voix dissonantes et châtier tous ceux qui leur viennent à l’esprit de porter atteinte à nos constantes nationales »
Son premier adjoint Hassan al-Kaabi a quant à lui qualifié les participants « de rats » qui selon lui « veulent semer le chaos et normaliser les relations avec leurs soutiens », estimant qu’Erbil devrait empêcher ce genre de rencontres, rappelant que la loi irakienne pénalise de telles démarches.
A Bagdad, outre le gouvernement et le Parlement, responsables, partis et factions politiques opposés à ‘Israël’, aussi bien chiites que sunnites, ont condamné cette rencontre. Réclamant à l’unanimité de traduire en justice ses participants pour avoir violé la loi irakienne.
Sadr menace: Specimen orduriers
Le chef du puissant courant sadriste, Moqtada al-Sadr a condamné d’un ton menaçant.
« Erbil devrait interdire ce genre de rencontres terroristes sionistes et les croyants devaient attendre que nous donnions l’ordre de commencer à punir ces spécimens orduriers. L’Irak refuse la normalisation », a-t-il écrit sur sa page Twitter.
Le chef des Brigades Ahl al-Haq, cheikh Qaïs al-Khazaali est allé encore plus loin assurant que « la résistance ne se taira pas face à cette trahison » et elle « donnera une leçon aux normalisateurs de sorte qu’ils n’envisagent plus la normalisation ». Il a demandé aux autorités kurdes « une position plus claire et plus opérationnelle et de ne pas se contenter de dire qu’elles n’étaient pas au courant »
Parmi les voix critiques à la tenue de ce colloque et à son appel, celle sayed Ammar al-Hakim le président du Courant national de la sagesse: « nous condamnons et nous rejetons les conférences et réunions organisées sur le sol irakien et leurs appels à la normalisation avec l’entité sioniste usurpatrice »
« La cause palestinienne représente la cause première des Arabes et des Musulmans et nous renouvelons notre soutien entier au peuple palestinien à sa juste cause à sa lutte et la récupération de son droit usurpé. La cause palestinienne est un droit qui ne tombe pas dans l’obsolescence, mais s’enracine au contraire plus fermement dans la conscience des générations arabes et islamiques », a-t-il ajouté.
Faleh al-Fayyad, le chef du Hach al-Chaabi, coalition de factions ayant combattu Daech avec l’aide de conseillers iraniens a , pour sa part, décit les participants au colloque de « clique d’embauchés au souffle israélien qui appelle à la normalisation après le fiasco de Daech de faire tomber l’Irak »
Fatah: complicité d’Erbil?
Condamnant la rencontre « tribune de la traitrise », la coalition parlementaire al-Fatah dirigée par Hadi al-Ameri s’est dite étonnée que les services de sécurité d’Erbil aient permis sa tenue. Qualifiant de traitres ecux qui y ont participé ainsi que ceux qui ont facilité la tenue de la conférence.
La coalition Nasr qui a elle aussi condamné la tenue de colloque , a rappelé qu’il constitue « une violation de la Constitution et des valeurs irakiennes » et demandant aux forces politiques au le peuple irakien d’empêcher que l’Irak ne soit entrainé dans ce glissement.
Même réprobation de la part du parti Daawa, selon lequel les participants à la conférence « ne représentent qu’eux-mêmes et non le peuple irakien dans ses différentes composantes » réclamant de les poursuivre en justice. Qualifiant « d’accord de la honte » la normalisation avec l’entité sioniste, il a assuré que son sort n’est autre que « la déception et la défaite devant la volonté des peuples et de la résistance ».
Et le Leg et une tribu sunnites
Côté sunnite, le Leg sunnite a lui aussi condamné « dans les termes les plus fermes les démarches qui prônent la normalisation avec l’entité sioniste usurpatrice de la Palestine au nom de la paix et de la sécurité, jugeant qu’il s’agit d’une haute trahison à la cause de la Palestine ».
La tribu arabe sunnite Shommar, dont le nom a été signalée parmi les participants au colloque a tenu à assurer par la voix de son cheikh Anwar Ahmad Al-Yawar qu’aucun de ses cheikhs n’y a participé assurant son refus catégorique de la normalisation avec Israël.
Egalement du côté sunnite, le Parti islamique irakien a lui aussi condamné « ls vois dissonnantes qui reclament la normalisation avec l’entité sioniste », assurant que « l’Irak restera toujours le fer de lance face aux aspirations de l’entité sioniste usurpatrice de la terre de Palestine. »
Le Kurdistan (nord), une région autonome du pouvoir central à Bagdad, entretient de bons rapports avec l’entité sioniste dont le lobby soutient les efforts en vue de sa séparation . En 2017, quand les Kurdes d’Irak ont tenu leur référendum d’indépendance controversé, l’un de leurs rares soutiens était ‘Israël’. C’est une rencontre avec l’ex-chef de la force al-Qods des Gardiens de la révolution iranienne le général martyr Qassem Soleimani qui avait convaincu ls dirigeants kurdes d’y renoncer.
Sources: AFP, agence al-Sumaria, al-Manar