L’homme politique dano-suédois d’extrême-droite Rasmus Paludin a de nouveau froissé les sentiments des musulmans en s’attaquant a leur livre saint le Coran. Provoquant un nouvel incident avec la Turquie et une vague de protestations dans le monde musulman.
Le samedi 21 janvier, il a brûlé un exemplaire du Coran à proximité de l’ambassade de Turquie dans la capitale suédoise après avoir organisé une manifestation. Il était sous importante protection policière et à l’abri de barrières métalliques.
La police suédoise avait estimé que la Constitution et les libertés de manifestation et d’expression en Suède ne justifiaient pas l’interdiction de cette manifestation au nom de l’ordre public.
« Si l’on ne pense pas qu’il doit y avoir de liberté d’expression, il faut vivre ailleurs », a notamment affirmé Paludin cet habitué des autodafés du Coran, devenus sont principal mode d’action politique. S’adressant vraisemblablement aux Musulmans de ce pays.
L’islam est la troisième religion, par le nombre de fidèles, présente en Suède, après le christianisme luthérien et la foi orthodoxe.
Selon le Pew Research Center, en 2016, 8,1% de la population de la Suède était musulmane. Les Bosniaques et les Kosovars sont les plus majoritaires.
Mais son acte visait aussi à dénoncer les négociations des autorités suédoises avec Ankara sur l’Otan.
Le gouvernement suédois se démarque mais…
Pour sa part, le gouvernement suédois s’est démarqué de l’acte d’autodafé du Coran tout en assurant ne pouvoir l’interdire.
Son chef de la diplomatie a condamné « une provocation islamophobe épouvantable » et souligné que l’autorisation de la manifestation ne voulait pas dire qu’elle était soutenue par l’exécutif.
« La Suède a une liberté d’expression très étendue, mais cela n’implique pas que le gouvernement suédois, ou moi-même, soutiennent les opinions exprimées », a affirmé Tobias Billström sur Twitter.
Le gouvernement suédois est déconcerté par les conditions exigées par la Turquie pour lui permettre d’adhérer à l’OTAN. Les Turcs exigeant que Stockholm interdise les partis kurdes séparatistes tels que le PKK considérés comme terroristes et d’extrader leurs militants.
Turquie: Visite du ministre suédois de la Défense annulée
Justement en protestation à cet acte, Ankara a annulé une visite du ministre suédois de la Défense prévue le 27 janvier prochain et qui avait pour objectif de tenter de lever les objections d’Ankara à l’entrée de la Suède dans l’Otan.
Le ministre turc de la Défense, Hulusi Akara a estimé qu’elle « a perdu sa signification et son sens ».
A Istanbul, plusieurs dizaines de personnes se sont rassemblées, samedi, en fin de journée devant le consulat de Suède à Istanbul, où elles ont brûlé un drapeau suédois et appelé Ankara à rompre tout lien diplomatique avec Stockholm, a constaté un journaliste de l’AFP. D’autres ont manifesté près de l’ambassade de Suède à Ankara.
« Il faut punir ceux qui empiètent sur l’Islam »
Au Liban, des réactions d’aversion et de condamnation à l’acte d’autodafé du Coran et à l’autorisation accordée a son auteur de la part des autorités suédoises ont fusé de toutes parts.
Les deux muftis sunnite et chiite en font partie.
Le mufti de la République (sunnite), cheikh Abdel-Latif Dariane a condamné l’autorisation qui a été donné par les autorités suédoises a Paludin pour mener à bien son acte qualifié « d’agression contre l’Islam et les Musulmans » et « d’acte honteux qui renferme de la haine et du mépris pour les musulmans du monde ».
Selon cheikh Dariane, « il faut tenir responsable tous ceux qui empiètent sur l’Islam et nuisent au Saint Coran et leur imposer une punition appropriée, afin d’empêcher la poursuite de leurs idéaux sur les sacro-saints religieux islamiques ».
« La liberté, une couverture de la criminalité civilisationnelle »
Pour sa part, le mufti jaafarite cheikh Ahmad Qabalane (chiite) a estimé que cette affaire est « une question de criminalité, de tyrannie, de brutalité intellectuelle et d’un arsenal de propagande adopté par les bastions de l’Occident politique avec un fond obsédé par la vengeance, les guerres de religions et l’hostilité jurée envers les valeurs islamiques et même universelles ».
« Ce qu’ils appellent la liberté n’est rien de plus qu’une couverture d’une criminalité civilisationnelle et de l’incinération intellectuelle envers tout ce qui touche à l’islam au milieu d’un fléau occidental, qui va au-delà du nazisme d’Hitler”, a-t-il déploré.
Selon lui, les Etats islamiques et arabes devraient prendre des mesures punitives contre le gouvernement suédois car l’autodafé du Coran s’est fait sur un fond de sélectivité politique, sous protection sécuritaire et (grâce à) un agenda de l’Etat suédois qui classe ces actes dans le cadre de la liberté d’expression ».
« Une attaque contre tous les messages célestes »
Le chef du Parlement libanais Nabih Berri a condamné l’autorisation accordée à Paludin par les autorités suédoises.
« La répétition d’une telle profanation de lieux saints comme cela s’est produit hier, d’autant qu’elle constitue une attaque contre les sentiments et les sacro-saints de plus d’un milliard et demi de musulmans dans le monde, est aussi une attaque contre tous les messages et livres célestes”, a-t-il souligné dans un communiqué publié par l’Agence nationale de l’Information.
Et de poursuivre : « tolérer de tels actes honteux et garder le silence à leur sujet sous prétexte de liberté d’expression consacre la diffusion du discours de haine et un retour à l’ignorance haineuse au moment où le monde et l’humanité ont pressement besoin de convergence, de dialogue et de recourir aux règles établies par le Saint Coran sur la liberté, la justice et l’égalité autour d’une parole qui unit”.
« Une atteinte scandaleuse à toutes les religions »
Le Premier ministre libanais par intérim Najib Mikati a quant à lui condamné l’autodafé du Coran qui constitue « une atteinte scandaleuse et méprisante portée contre toutes les religions célestes et contre ce que l’islam représente comme valeurs suprêmes et comme modération », estimant que « de telles actions malveillantes n’atteindront pas leur objectif d’offenser la vraie religion islamique et son essence ».
« Cherchez les doigts de Sion »
Même condamnation de la part du ministre de la Culture Mohamad Wissam al-Mortada, qui a qualifié l’acte de Paludin « de feu de la haine qui brûle dans le cœur des malveillants ».
Il a ajouté dans son communiqué : « C’est une tentative misérable de réveiller la discorde entre musulmans et chrétiens, commise par des mains qui n’ont rien à voir avec le Messie lequel vient de nos régions, et qui n’a rien à voir avec le vrai christianisme originaire de notre terre. Mais le plus important est qu’elle n’atteindra pas les résultats auxquels elle aspire car la foi en le Dieu unique, et l’espace humain des valeurs supérieures partagées entre les deux sont plus forts que tous les feux des haineux ».
Et le ministre de la Culture de conclure : « En tout cas, cherchez les doigts de Sion”, en allusion aux liens de plus en plus accentuées entre les organisations d’extrême-droite islamophobes en occident et « Israël ».
« Une action qui s’inscrit dans le contexte d’une série d’attaques »
Le Hezbollah a lui aussi fermement condamné l’autodafé du Saint Coran le traitant d’acte « criminel et odieux contre la religion islamique et les saints symboles islamiques ».
« Cette action s’inscrit dans le contexte d’une série d’attaques honteuses contre le grand messager d’Allah Mohammad (que la paix et les bénédictions d’Allah soient sur lui), et contre les références religieuses (maraji’), et contre les symboles et lieux saints des musulmans. Ce qui constitue une grave insulte à la nation de l’Islam à travers le monde…, laquelle ne peut nullement être tolérée ».
Le texte du Bureau médiatique du Hezbollah fait sans doute allusion à l’attaque médiatique qui a visé depuis une dizaine de jours le guide suprême iranien l’ayatollah Ali Khamenei dans le journal satirique français Charlie hebdo.
« Le Hezbollah tient le gouvernement suédois entièrement responsable de cet acte odieux et nous l’appelons à prendre immédiatement l’initiative de punir les auteurs et d’œuvrer pour empêcher la répétition de tels crimes », a-t-il poursuivi.
Dans sa déclaration, le Hezbollah a appelé les gouvernements islamiques, les autorités, les organes et institutions islamiques à condamner ce grand abus et à œuvrer pour former une opinion publique internationale qui empêche que de telles violations graves ne se reproduisent.
De nombreux autres pays musulmans ont exprimé leur indignation. Le Maroc a exprimé dimanche son étonnement que les autorités suédoises aient permis cet acte « inacceptable » et « odieux », « qui s’est déroulé devant les forces de l’ordre suédoises ».
L’Indonésie, l’Arabie saoudite, les Emirats Arabes Unis ont également exprimé leur condamnation, tout comme le Conseil de coopération du Golfe (CCG) et l’Organisation de la coopération islamique (OCI).
Source: Divers