Après plus de cinq mois de guerre, le Conseil de sécurité de l’ONU a enfin adopté lundi une résolution exigeant un « cessez-le-feu immédiat » à Gaza, un appel bloqué plusieurs fois par les Etats-Unis qui se sont cette fois abstenus, accentuant la pression sur leur allié israélien.
La résolution adoptée sous les applaudissements par 14 voix pour, et une abstention, « exige un cessez-le-feu immédiat pour le mois du ramadan » – qui a déjà commencé il y a deux semaines -, devant « mener à un cessez-le-feu durable », et « exige la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages ».
A noter, que cette résolution n’est pas contraignante au sens propre du terme à l’entité sioniste car d’une part elle n’est pas enregistrée sous le chapitre 7 de la charte de l’ONU qui consiste à régler un différend ou un conflit en imposant une solution accompagnée de mesures contraignantes. Ce qui n’est pas le cas dans cette résolution. D’autre part, le Conseil de sécurité ne peut imposer ses décisions que pour les questions liées à la sécurité et à la paix internationales qui sont obligatoirement votées à l’unanimité des membres permanents.
« Depuis cinq mois, le peuple palestinien souffre terriblement. Ce bain de sang a continué trop longtemps. C’est notre obligation d’y mettre un terme. Enfin, le Conseil de sécurité prend ses responsabilités », s’est félicité l’ambassadeur algérien Amar Bendjama, même si les résolutions du Conseil, contraignantes ou non , sont régulièrement ignorées par les Etats concernés.
Le projet de résolution américain rejeté
Contrairement au texte américain rejeté vendredi par des vetos russe et chinois, il ne lie pas ces demandes aux efforts diplomatiques du Qatar, des Etats-Unis et de l’Egypte, même s’il « reconnait » l’existence de ces pourparlers visant à une trêve accompagnée d’un échange d’otages et de prisonniers palestiniens.
Vendredi, la Russie et la Chine avaient mis leur veto à un projet de résolution américaine soulignant la « nécessité » d’un « cessez-le-feu immédiat » à Gaza en lien avec les négociations pour la libération des otages capturés lors de l’attaque sanglante et sans précédent du Hamas le 7 octobre sur le sol israélien. Certains observateurs y avaient vu une évolution substantielle de la position de Washington, sous pression pour limiter son soutien à « Israël » alors que l’offensive israélienne a fait plus de 32.000 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas.
Les Etats-Unis s’étaient en effet jusqu’alors systématiquement opposés au terme « cessez-le-feu » dans les résolutions de l’ONU, bloquant trois textes en ce sens. Mais le texte américain rejeté n’appelait pas explicitement à un cessez-le-feu immédiat, utilisant une formulation estimée ambiguë par les pays arabes, la Chine et la Russie, laquelle a dénoncé le « spectacle hypocrite » des Etats-Unis.
La résolution adoptée lundi est issue du travail des membres non-permanents du Conseil, qui ont négocié tout le week-end avec les Etats-Unis pour tenter d’éviter un nouvel échec, selon des sources diplomatiques. La résolution réclame d’autre part la « levée de tous les obstacles » à l’aide humanitaire.
Le Conseil, largement divisé sur le dossier israélo-palestinien depuis des années, n’avait pu jusqu’alors adopter depuis le 7 octobre sur cette question que deux résolutions (sur huit soumises au vote), essentiellement humanitaires. Sans grand résultat: après cinq mois et demi de guerre, l’entrée de l’aide à Gaza, assiégée, reste largement insuffisante et la famine plane.
La nouvelle résolution condamne d’autre part « tous les actes terroristes », mais sans mentionner les attaques du Hamas du 7 octobre qui ont entraîné la mort d’au moins 1.160 personnes, pour la plupart des civils, selon un décompte de l’AFP établi à partir de données officielles israéliennes. Aucune résolution adoptée par le Conseil ou l’Assemblée général de l’ONU depuis le 7 octobre n’a condamné spécifiquement le Hamas, une absence systématiquement fustigée par « Israël ».
C’est la première fois depuis le début de la guerre qu’une proposition de résolution appelant à un « cessez-le-feu immédiat « à Gaza est votée au Conseil de sécurité de l’ONU – bien qu’elle précise pour cela le cadre temporel du « mois de ramadan ».
Rendue possible grâce à l’abstention de Washington, l’adoption de cette résolution intervient quelques jours après les vétos russe et chinois opposés à un texte présenté par les États-Unis, appelant à la « nécessité d’un cessez-le-feu ».
Si le vote n’aura probablement pas de conséquences directes sur le terrain avant la potentielle conclusion d’un accord de trêve accompagné d’une libération d’otages, le message envoyé par les États-Unis à leur allié israélien n’a jamais été aussi fort. Dimanche, la vice-présidente Kamala Harris avait menacé l’entité sioniste de « conséquences » en cas d’offensive à Rafah.
Après l’abstention américaine, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annulé le déplacement de son proche conseiller Ron Dermer, ministre des Affaires stratégiques, et du chef du conseil de sécurité nationale, Tzachi Hanegbi, qui devaient se rendre à Washington pour discuter notamment de l’opération militaire sur Rafah.
Reste que le ministre israélien de la Guerre Yoav Gallant se trouvait déjà à Washington, dans le cadre d’une délégation distincte. Il aura probablement eu le temps de rencontrer ses homologues américains pour discuter entre autres de la livraison d’armes des Etats-Unis à « Israël », alors que la pression se fait de plus en plus forte sur Joe Biden pour contrôler la conformité au droit international humanitaire de l’utilisation des armes destinées à Tel-Aviv.
Hamas salue… mais reste à l’exécuter
Le Mouvement de la Résistance Islamique – Hamas a salué l’appel du Conseil de Sécurité de l’ONU à un cessez-le-feu immédiat dans la bande de Gaza.
Le mouvement a souligné la nécessité de parvenir à un cessez-le-feu permanent qui conduirait au retrait de toutes les forces d’occupation de la bande de Gaza et au retour des déplacés dans leurs foyers d’où ils sont partis.
Le Hamas a affirmé qu’il était prêt à s’engager dans un échange immédiat de prisonniers qui conduirait à la libération des prisonniers des deux côtés.
Et de poursuivre : » Dans le contexte du texte de la résolution, nous soulignons l’importance de la liberté de mouvement des citoyens palestiniens et de l’accès de tous les besoins humanitaires à tous les résidents, dans toutes les zones de la bande de Gaza, y compris les équipements lourds pour transporter les décombres, afin que nous puissions enterrer nos martyrs qui sont restés sous les décombres pendant des mois ».
Le mouvement a appelé le Conseil de sécurité à « faire pression sur l’occupation pour qu’elle adhère au cessez-le-feu et mette fin à la guerre de génocide et de nettoyage ethnique contre notre peuple ».
Parallèlement, le Hamas a noté » le droit de notre peuple palestinien à établir son État palestinien indépendant et souverain avec alQods pour capitale, ainsi que le droit au retour et à l’autodétermination, conformément aux résolutions internationales et au droit international ».
Elle a exprimé son appréciation pour « les efforts de l’Algérie et de tous les pays du Conseil de sécurité qui ont soutenu notre peuple et œuvrent pour mettre fin à l’agression et à la guerre d’extermination ».
Source: Médias