Dans une chronique signée par son analyste Ghassan Saoud, le quotidien libanais al-Akhbar répond à la question qu’il pose dans son titre : « Comment le Hezbollah a-t-il développé ses tactiques sécuritaires et militaires ? ». Son titre avance aussi que « La résistance n’a utilisé que 20% de ce que l’ennemi connait ».
Il constate que le secrétaire général du Hezbollah sayed Hassan Nasrallah a limité les combats aux fronts de soutien, en frappant exclusivement l’ennemi israélien, sans élargir la bataille vers les Etats qui accueillent les bases américaines.
Selon Saoud, les grandes lignes qui ont dirigé l’action de la résistance libanaise durant les 7 derniers mois sont les suivantes :
En premier, estime-t-il, le Hezbollah a maintenu l’équilibre de dissuasion avec l’ennemi israélien, mais avec un bémol supplémentaire. Celui qui était de vigueur avant le 8 octobre, date de l’entrée en action des opérations de la résistance libanaise en soutien à Gaza, dissuadait les deux protagonistes à s’attaquer mutuellement. Dans celui qui en cours actuellement, depuis Déluge d’al-Aqsa, le Hezbollah a signifié qu’il n’a pas peur de la réaction israélienne sur le territoire libanais. En revanche, « Israël » a dépêché les responsables américains et européens pour le dissuader d’élargir le champ de guerre. Les propos du ministre de la Défense Yoav Gallant illustrent la validité de cette dissuasion : « La guerre aura un coût qu’il vaut mieux éviter ».
Toujours selon Ghassan Saoud, le Hezbollah a tracé un cadre géographique de la bataille qui ne dépasse pas les 7 km, avec l’éventualité d’un échange de violations bilatérales en profondeur.
Le troisième exploit est d’après lui, l’équation qu’il a établie à la frontière en contraignant les habitants israéliens des colonies frontalières à quitter leurs maisons, au même titre que les habitants libanais des régions frontalières libanaises. Une première dans le conflit israélo-libanais.
En outre et de l’aveu des généraux israéliens, le Hezbollah a pu maintenir une capacité d’action dans les villages frontaliers, en dépit de la supériorité technologique israélienne et américaine, assortie de satellites, des caméras les plus sophistiquées et de drones qui ne quittent pas l’espace aérien libanais. « La résistance a réussi à travers des capacités technologiques qui sont encore entièrement inconnues des Israéliens et des Américains de capter la plupart des mouvements de l’armée israélienne, avec une précision dans la zone de conflit, dans les tentes, les vallées, à l’intérieur des casernes, dans les maisons des colons, et les voitures civiles alors que l’armée israélienne, malgré ses capacités technologiques et tout ce qu’elle a développé comme caméras a capteurs et autres, n’a pu empêcher la résistance de réaliser ses opérations », a écrit l’auteur de l’article, selon lequel cet exploit n’aurait pu être réalisé sans les tirs contre les colonnes qui jonchent la frontière entre la Palestine occupée et le Liban.
Saoud a relevé ce qu’un haut général israélien a confié pour le quotidien israélien Yediot Ahronoth qu’il a été surpris par la rapidité de la prise de décision chez la résistance, indiquant qu’il lui suffit une demi-heure, après avoir identifié une cible, pour la frapper, ce qui inclut aussi les étapes d’informer les chefs, de choisir les cellules d’opérations appropriées pour l’attaque, l’armement convenable… Et d’en conclure que la prise de décision semble plus rapide que celle des formations militaires régulières.
Et le journaliste d’al-Akhbar de faire remarquer que l’interception du premier ballon d’espionnage était faisable pour le Hezbollah, dès les premiers moments de son lancement. Mais l’ordre de l’abattre a pris en considération la garantie qu’il tombe sur le territoire libanais de sorte que les équipes israéliennes ne puissent le repêcher. Le fait de cibler la salle d’opération à laquelle il est affiliée a pour but d’empêcher les Israéliens de recueillir les informations qu’il renferme.
Un autre exploit que seuls les experts militaires peuvent diagnostiquer, est rapporté par Ghassan Saoud : pendant la guerre 2006, le Hezbollah n’a changé qu’une seule fois ses tactiques militaires. Alors que cette fois-ci et jusqu’à présent, il les a changées 7 fois.
Un 7eme aspect de l’exploit de la résistance libanaise : jusqu’à présent le Hezbollah n’a pas encore investi la totalité de ses forces dans la bataille alors que l’armée israélienne a mobilisé toutes ses brigades depuis plus de 100 jours et sans répit. Pour sa part, le Hezbollah se comporte avec cette bataille comme étant dans un front de soutien mais non en guerre : il mobilise une force pendant plusieurs semaines puis la remplace par une autre et ainsi de suite.
De même pour l’arsenal militaire, « Israël » a dévoilé tous ses équipements dès les premières semaines de la guerre alors que le Hezbollah s’abstient de toute ostentation. Il n’a utilisé que 20% de son arsenal qu’Israël connait selon des observateurs israéliens, et se réserve le recours à ses armes de qualité qu’Israël ne connait pas encore.
« L’on peut dire que le Hezbollah s’est infligé des pertes qu’il aurait pu éviter. De même il aurait pu adresser des frappes spéciales plus douloureuses pour « Israël ». Mais sa tactique principale est de ne pas se laisser entrainer à révéler ce qu’il ne veut pas révéler si ce n’est au moment voulu. Cette stratégie a fait ses preuves aujourd’hui où le temps est en faveur du Hezbollah qui a pu réduire ses pertes humaines après avoir trouvé les solutions convenables pour la machine de guerre israélienne et a développé ses propres moyens pour franchir les dômes diverses », a-t-il indiqué.
Selon Saoud, la dernière opération de la résistance à l’est de Tabarayya (Tibériade) qui se trouvent à 32,5 km de la frontière, « a avorté la théorie du nord et du sud du Litani ». Le Hezbollah atteste à travers elle que sa pénétration en profondeur n’a pas de limite et qu’il a développé ses drones qui peuvent franchir tous les moyens de défense aériens et maritimes israéliens.
Selon les médias israéliens, les antis aériens israéliens parvenaient les deux premiers mois de la guerre à abattre 3 drones sur les 3 drones envoyés par la résistance. Par la suite, ils n’arrivaient à abattre que 2 sur les 3 et depuis deux mois ils n’arrivent qu’a en abattre un seul sur trois.
De quoi faire craindre le pire scénario si 1000 drones sont lancés : il faudrait s’attendre à ce que 600 d’entre eux frappent leur cible.
Selon Saoud, le Hezbollah a aussi pu remédier à certaines lacunes diplomatiques sans que cela lui coûte une bataille « en faisant preuve, à ceux qui lui vouent une animosité, qu’il est plus sage et surtout qu’il veille plus qu’eux à la stabilité de la région ».
Sur le plan militaire, estime-t-il, « son entière aptitude et son sérieux ont pu garantir que les choses ne dégringoleront pas vers une guerre globale ». Le Hezbollah est aujourd’hui plus rassuré que jamais sur le fait qu’Israël est dissuadé, calcule minitieusement ce qui l’attend au Liban, et n’osera pas étendre le conflit, assure-t-il.
Citant un responsable du Hezbollah Ghassan Saoud conclut: « « La folie a des limites en Israël. Ils savent que cent mille personnes déplacées valent incomparablement mieux qu’un million de personnes déplacées, et que le fait que les soldats tombent au carrefour, selon la nouvelle stratégie israélienne consistant à ne pas annoncer les morts et les blessés, est incomparablement mieux que de voir des casernes entièrement brûlées, comme le montrent les capacités de projectiles du Hezbollah, et le fait de garder les choses dans le cadre du soutien est incomparablement mieux au choix d’aller en guerre»
Source: Médias