Selon le journal libanais al-Akhbar, l’Arabie saoudienne semble opter pour une politique plus sournoise en Irak, afin de contrer l’influence iranienne. Après l’échec de ses anciens procédés basés sur les attentats terroristes perpétrés par des agents jihadistes takfiristes issus de l’école au wahhabite, sa religion d’état, elle a choisi d’utiliser les procédés de la guerre douce : argent, projets et accords mutuels.
Cette politique a été amorcée à partir du mois de février 2017, lors d’une visite officielle du ministre saoudien des Affaires étrangères Adel A-Jubeir.
Son terrain d’action favori est plus précisément les régions chiites du sud d’Irak, avec lesquelles elle partage des frontières communes et où l’impact iranien est considérable. Et plus précisément dans la ville de Bassorah qui est la troisième ville d’Irak, et sa capitale économique, d’autant que sa province renferme sa zone la plus pétrolifère.
Riad n’a pas seulement ré ouvert son consulat. Mais elle s’est aussi mise à acheter de grandes surfaces de terre de la ville, via des agents locaux
Lors de sa visite en Egypte, le prince héritier saoudien Mohamad Ben Salmane s’était targué qu’au cours d’un match de football entre les deux équipes nationales irakienne et saoudienne « 70.000 irakiens arboraient des drapeaux saoudiens dans la province chiite Bassorah ».
Ce jour-là, le 28 février, c’était le premier match du genre depuis 40 ans. Il a été adoubé d’une campagne médiatique pro saoudienne, dans laquelle Riyad répétait sans cesse aux Irakiens qu’elle avait choisi leur pays au détriment de bien d’autres afin d’obtenir que soit levé l’embargo imposé par l’Union internationale du football.
Dans le stade étaient apparentes les pancartes de bienvenue à l’Arabie et sur les réseaux sociaux, circulait le hashtag « c’est ta maison o vert ». Le thème de cette campagne a tourné autour de l’arabité et du nationalisme. Et le tout a été clôturé par la toute récente décision de Mohamad Ben Salmane d’offrir un stade à l’Irak.
Le lendemain, a été annoncée par le conseil de coordination ministériel irako-saoudien la prochaine signature de 13 ententes qui s’ajoutent aux quatre conclues précédemment.
L’Arabie a aussi fait part de sa volonté d’offrir 20 millions de dollars aux organisations de secours irakiennes.
Alors qu’à la mi-février dernière, elle avait fait un don de 500 millions de dollars dans le cadre de la Conférence internationale de la reconstruction de l’Irak et via la Caisse saoudienne de développement afin de financer les exportations saoudiennes vers ce pays.
En même temps, les sociétés saoudiennes ouvraient des bureaux en Irak à l’issue de la participation de 60 d’entre elles à la 44ème foire internationale de Bagdad. Dont le géant de l’industrie pétrochimique saoudienne Sabic.
Des activités culturelles escortent cette offensive saoudienne. Des poètes ont pris part à une cérémonie poétique organisée dans les vieux marchés de Bassorah. Une délégation des rédacteurs en chefs de journaux saoudiens officiels ont plus tard effectué une visite officielle en Irak, où ils ont été accueillis en grandes pompes.
L’Arabie s’est aussi engagée à édifier une zone libre entre son territoire et celui de l’Irak. Il est aussi à prévoir qu’elle tente de séduire les Irakiens afin qu’ils réactivent le pipeline stratégique qui relie les puits de pétrole de la Mésopotamie au port Yanboa sur la Mer rouge. Il avait été fermé par une décision saoudienne au lendemain du déclenchement de la seconde guerre du golfe.
Après des années d’échecs successifs, la nouvelle stratégique saoudienne pour l’Irak commence à prendre forme.
Quoique détenant d’importants atouts de force, selon al-Akhbar, trois facteurs font toutefois défaut au plan saoudien.
Il nécessite une politique de longue haleine et sur le long terme, surtout que les Irakiens ne sont pas prêts d’oublier les années de terreur imputées au saoudiens. Sachant que MBS semble bien pressé.
Le deuxième défi réside dans la concurrence iranienne qui est toujours aussi présente. A la fin de l’an 2017, l’Iran a lui aussi inauguré son projet commercial dans le marché irakien. Plus est-il que Téhéran détient dans ce pays d’importantes relations, avec des forces de poids sur la scène irakienne, dont le Hachd al-Chaabi et d’autres liées à Bagdad par des intérêts stratégiques.
Quant au troisième enjeu, il porte sur la nature de l’Irak lui-même, dont les complications politiques sont similaires au bourbier yéménite, dans lequel l’Arabie là-aussi risque de s’empêtrer.