Dans un entretien à Sputnik, Ali Benouari, ex-ministre algérien du Trésor, a adressé une mise en garde contre le risque d’une phase de transition de longue durée en Algérie qui ne prendrait pas en compte le temps compté qui reste au pays avant que la crise économique ne pèse de tout son poids. Il a appelé l’armée à accélérer le dénouement.
Si «la révolution populaire» que connaît l’Algérie depuis le 22 février dernier débouche sur une période de transition de longue durée, la crise économique qui s’approche à grands pas pourrait «annihiler son caractère pacifique» et faire basculer le pays dans la violence, a déclaré à Sputnik Ali Benouari, ex-ministre algérien du Trésor et expert international en finances.
«Le temps économique est en conflit avec le temps politique», a-t-il affirmé. «Nous n’avons pas le temps de faire durer la transition. La transition doit être la plus courte possible» a-t-il ajouté, avertissant que «si elle devait durer, la crise économique risque d’annihiler le caractère pacifique de la révolution et pousser les Algériens au désespoir et à la violence».
Ainsi, l’expert international donne un ordre de grandeur du temps qui reste, selon lui, à exploiter pour mettre en place des institutions républicaines à même de mener le pays à bon port. «À mon avis, il faut que cette année on ait résolu la question de la transition et qu’on passe vite à des élections libres pour avoir un gouvernement absolument légitime qui, lui, pourra affronter la crise économique de manière consensuelle», a-t-il déclaré, soulignant qu’il craignait «beaucoup pour l’avenir» du pays dans le cas où cette opportunité serait ratée.
Tout en indiquant qu’il y avait des mesures d’urgence à mettre immédiatement en œuvre pour affronter la crise économique, Ali Benouari s’est en même temps demandé «qui [allait] les prendre». «Je rappelle que nous n’avons pas de gouvernement. Nous n’avons pas de parlement légitime. Nous n’avons pas de Président», a-t-il indiqué, précisant que «toute la question de la transition et sa problématique [était] là».
«Donc, il pèse sur l’armée, qui a les clefs du pouvoir, une immense responsabilité: c’est d’écouter le peuple mais d’aller vite. On ne peut pas se permettre une transition qui dure deux ans ou plus», a-t-il averti.
Par ailleurs, M.Benouri estime que le chef d’État-major de l’ANP «va sans doute obtenir le départ du Premier ministre et du chef de l’État par intérim». «À ce moment-là, on quittera l’article 102 et il sera libre [le chef de l’armée, ndlr] de confier les rênes du pouvoir à une direction, probablement collégiale. Il lui appartient, à lui, de choisir parmi les hommes les plus sages et les plus honnêtes du pays», a-t-il conclu.
Dans le même sens, l’ex-ministre du Trésor a réaffirmé que l’Algérie devait «avoir une direction collégiale de transition qui soit suffisamment crédible pour que, dès le début, le gouvernement qui sera nommé puisse prendre les mesures pour endiguer la crise en stoppant la fuite des capitaux, poursuivant et contraignant les gens qui ont volé des milliards de dollars à les rapatrier». «Il devra entreprendre également quelques réformes structurelles qui permettent de mettre de l’ordre dans les finances intérieures et extérieures du pays», a-t-il conclu.
Dans un discours diffusé ce 24 avril, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah a affirmé lors de sa visite à la première région militaire à Blida, à l’ouest d’Alger, «que l’Armée nationale populaire demeurer[ait] engagée à préserver les nombreux acquis et réalisations de la nation, ainsi que l’accompagnement du peuple et de ses institutions à travers la mise en œuvre des solutions possibles, tout en approuvant toute proposition constructive et initiative utile allant dans le sens du dénouement de la crise et menant le pays vers la paix».
Source: Sputnik