Les mots « accord du siècle » sont fréquemment attribués au président américain Donald Trump et à son administration pour évoquer ce que représenterait la paix entre Israéliens et Palestiniens.
De grands médias internationaux, y compris l’AFP, ont mis dans sa bouche cette expression collant à une approche non-conventionnelle de la diplomatie qui serait celle de l’ancien homme d’affaires. En fait, l’AFP n’a pas retrouvé la trace de tels propos prononcés par M. Trump, tout du moins en public.
Les origines
Peu après sa victoire surprise à la présidentielle américaine en novembre 2016, M. Trump accorde un entretien au Wall Street Journal. Il qualifie le conflit israélo-palestinien de « guerre qui ne finit jamais ».
Il se réclame de son expérience de businessman pour dire qu’il aimerait réussir là où des décennies de présidents et diplomates ont échoué, et parvenir à « l’accord ultime ».
Le 3 avril 2017, il rencontre le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, dont le pays est un interlocuteur primordial sur le sujet. Dans ses en arabe, le dirigeant égyptien dit à M. Trump qu’il soutient pleinement ses efforts pour apporter une « solution à la question du siècle avec l’accord du siècle ».
Dans la traduction en anglais, la déclaration de M. Sissi parle de solution au « problème du siècle », sans aucune référence à un accord.
La postérité
« L’accord du siècle » commence ensuite à apparaître dans les médias arabes et sur internet.
En mai 2017, M. Trump reçoit le président palestinien Mahmoud Abbas. M. Abbas ne mentionne qu’un « accord de paix (qui serait) historique ». Les deux hommes se rencontrent à nouveau en septembre et M. Abbas parle en arabe d’un « accord de notre temps ».
Mais la traduction simultanée, reprise dans la de la Maison Blanche, fait parler M. Abbas d' »accord du siècle ». C’est peut-être la première fois que M. Trump entend l’expression en public. En novembre 2017, l’agence de presse officielle palestinienne Wafa reprend « accord du siècle » à son compte.
En décembre 2017, M. Abbas, ulcéré par la reconnaissance par M. Trump de Jérusalem comme la capitale d’Israël, coupe les ponts avec l’administration américaine. « L’accord du siècle » prend une connotation négative dans le langage officiel palestinien pour dénoncer la pratique diplomatique de l’ancien magnat de l’immobilier.
L’expression s’impose en arabe pour évoquer par défaut les futures propositions américaines. Elle émerge aussi dans la presse en d’autres langues, à commencer par l’anglais, et est imputée à M. Trump. Le 1er juin 2019, l’AFP écrivait ainsi dans une dépêche que le plan américain avait été « qualifié par Trump d’accord du siècle ». D’autres, l’agence Reuters, le New York Times ou le Wall Street Journal ont fait de même.
La conclusion
L’AFP n’a pas retrouvé de propos de hauts responsables américains parlant au moins en public d' »accord du siècle ».
L’expression pourrait faire florès à l’occasion d’une conférence organisée par les Etats-Unis la semaine prochaine à Bahreïn pour présenter ce que pourraient être les retombées économiques d’un accord de paix pour les Palestiniens. La conférence prélude à la présentation du plan politique à une date toujours indéterminée.
A Washington, plusieurs interlocuteurs officiels interrogés par l’AFP ont exprimé leur surprise et leur grande circonspection face à l’attribution d’une telle expression au président Trump, et au fait qu’elle se soit popularisée.
Dans une déclaration pour l’AFP, l’un des architectes de la conférence, Jason Greenblatt, conseiller de M. Trump, a lui aussi pris ses distances avec le terme « accord du siècle ».
« Ce n’est pas une étiquette que nous aimons utiliser. Certains médias et d’autres (en dehors des médias) l’ont utilisée de manière péjorative », a-t-il déclaré.
« Nous présenterons une vision réaliste et réalisable de la paix », a-t-il ajouté.
Source: AFP