Reporters sans frontières a annoncé, mardi 2 mars, le dépôt d’une plainte en Allemagne pour crimes contre l’humanité visant notamment le prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed ben Salmane, l’ONG dénonçant sa «responsabilité» dans l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi et l’emprisonnement d’une trentaine de ses confrères.
Déposée lundi «auprès du procureur général de la Cour fédérale de justice de Karlsruhe» en raison de sa compétence «sur les principaux crimes internationaux», la plainte «porte sur la persécution généralisée et systématique des journalistes en Arabie saoudite» et cible, outre le prince héritier, quatre autres hauts responsables saoudiens, a précisé RSF dans un communiqué.
Aux côtés du dirigeant de facto du royaume, «soupçonné d’avoir directement commandité l’assassinat» de Jamal Khashoggi, RSF attaque ainsi son ex «proche conseiller» Saoud al-Qahtani, l’«ancien directeur adjoint du renseignement» Ahmed al-Assiri, mais aussi Mohammed Al-Otaibi, ancien consul général à Istanbul, et Maher Mutreb, «officier du renseignement» à la tête de «l’équipe qui a torturé et tué» le chroniqueur du Washington Post.
Consultée par l’AFP, la plainte, inédite, également déposée contre X, détaille par ailleurs les exactions commises contre 34 journalistes emprisonnés dans le royaume, dont 33 sont toujours en détention, à l’instar du blogueur Raif Badawi.
«Torture», «violence» et «coercition sexuelle», «disparition forcée», «privation illégale de liberté physique»… Face à ce qu’elle qualifie de «crimes contre l’humanité», l’ONG estime que le système judiciaire allemand s’avère «le plus adapté» en vertu de la compétence universelle appliquée outre-Rhin, qui permet à un Etat de poursuivre les auteurs des crimes les plus graves, quels que soient leur nationalité et l’endroit où ils ont été commis.
Cette action, par laquelle RSF espère l’ouverture d’une enquête, qui serait une «première mondiale», survient quelques jours après la publication d’un rapport du renseignement américain indiquant que «MBS» a «validé» l’opération visant à «capturer ou tuer» Jamal Khashoggi.
Critique du pouvoir saoudien après en avoir été proche, Jamal Khashoggi, résident aux Etats-Unis, a été assassiné le 2 octobre 2018 dans le consulat de son pays à Istanbul par un commando d’agents venus d’Arabie saoudite. Son corps, démembré, n’a jamais été retrouvé.
Après avoir nié l’assassinat, Ryad a fini par dire qu’il avait été commis par des agents saoudiens ayant agi seuls.
À l’issue d’un procès opaque en Arabie saoudite, cinq Saoudiens ont été condamnés à mort et trois autres à des peines de prison.
Les peines capitales ont depuis été commuées. L’Arabie saoudite occupe le 170e rang sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.
Source: Avec AFP