Réélu face à une extrême droite qui ne s’est jamais aussi bien portée, Emmanuel Macron va faire face à une série de défis majeurs dans les cinq années qui viennent, du rassemblement d’une France fracturée aux répercussions de la guerre en Ukraine, en passant par l’urgence climatique.
« Les années à venir, à coup sûr, ne seront pas tranquilles », a reconnu le chef de l’État français, centriste libéral, dimanche soir, après son discours de victoire face à la candidate du Rassemblement national (RN) Marine Le Pen.
À l’heure où les effets catastrophiques du réchauffement climatique se font sentir à travers le monde, la question du climat s’annonce comme l’un des défis les plus urgents et délicats à relever.
Le temps presse : début avril, les experts climat de l’ONU (Giec) ont prévenu que l’humanité avait trois ans pour réformer totalement l’économie et faire plafonner les émissions, faute de quoi la planète ne serait plus « vivable ».
M. Macron aura pour principale tâche de mettre la France sur une trajectoire permettant d’atteindre l’objectif de réduction des émissions de 40% d’ici à 2030 par rapport à 1990, conformément à l’accord de Paris, traité international sur le climat adopté en 2015.
Dans l’entre-deux-tours, dans un geste appuyé en direction des électeurs écologistes, le président s’est engagé à aller « deux fois plus vite » pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et a assuré que son prochain Premier ministre serait « directement chargé de la planification écologique ».
Mais ses engagements peinent pour l’heure à convaincre écologistes et défenseurs de l’environnement qui pointent le bilan contrasté de son premier mandat et préviennent qu’ils jugeront sur pièces.
Préoccupation majeure des Français, la question du pouvoir d’achat devrait rythmer le début du quinquennat et les réponses apportées par le nouvel exécutif seront scrutées de près.
Déployée pendant la pandémie du Covid-19, la politique du « quoi qu’il en coûte » — un soutien massif de l’État aux secteurs les plus touchés – a permis de sauver, temporairement du moins, des entreprises et des emplois fragilisés par la crise sanitaire et économique. Mais l’inflation galopante, tirée notamment par le coût de l’énergie, continue de peser fortement sur le pouvoir d’achat. En mars, elle a bondi de 4,5% sur un an, un niveau inédit depuis le milieu des années 80.
M. Macron, qui a multiplié les mesures d’aides aux ménages comme aux entreprises pour une facture globale d’environ 26 milliards d’euros, a promis de faire des gestes supplémentaires. Reste à savoir si cela suffira à contenir la colère sociale et éviter une répétition du scénario du mouvement de protestation des Gilets jaunes de 2018-2019.
La marge de manoeuvre du président réélu est par ailleurs plus faible qu’à son arrivée il y a cinq ans. M. Macron s’est en effet engagé à ramener le déficit public sous les 3% d’ici à 2027, et de commencer à réduire le poids de la dette, qui a explosé sous l’effet de la crise Covid.
Le quinquennat qui s’achève et les résultats de la présidentielle dressent le portrait d’une France fracturée. Au-delà du mouvement des Gilets jaunes, les deux dernières années ont été marquées par le mouvement de contestation de la politique sanitaire – les « antivax ».
Le chef de l’État a également suscité des crispations tout au long de son mandat en multipliant les sorties jugées méprisantes et arrogantes par une partie des Français et de l’opposition.
M. Macron a promis dimanche que nul ne serait « laissé au bord du chemin » et lancé un appel à la bienveillance et au respect dans un pays « pétri de tant de doutes, tant de divisions ». S’il parvient à obtenir une majorité lors des élections législatives de juin, rien ne dit que l’horizon s’éclaircira pour le nouvel exécutif pour autant.
Les manifestations qui ont éclaté dimanche soir à Paris et Rennes notamment pourraient laisser augurer une forte résistance dans la rue, notamment à son projet contesté de réforme des retraites, sujet traditionnellement brûlant en France.
Le chef de l’État, qui a multiplié les tentatives de médiation entre Kiev et Moscou pour tenter d’obtenir la fin de l’offensive russe en Ukraine, devrait poursuivre sur sa lancée et utiliser, encore pendant deux mois, la présidence française du Conseil de l’UE, pour maintenir l’unité des 27 face à Moscou.
L’enjeu n’est pas mince au vu des différends qui persistent entre États membres sur la question d’un embargo sur le gaz russe, Berlin étant l’un des principaux opposants à un arrêt immédiat des achats.
Les conséquences diplomatiques de la guerre en Ukraine, qui a illustré les difficultés de l’Occident à rallier le reste de la communauté internationale à sa stratégie d’isolement de la Russie, pourraient également rebattre les cartes des alliances.
Source: AFP