Au Liban, le rôle du général martyr Qassem Soleimani s’est illustré dans deux phases cruciales : la guerre de la libération jusqu’en l’an 2000 et la guerre 2006.
Concernant la première, il faut rappeler que ce n’est qu’en 1998 que le général Qassem Soleimani est venu au Liban, l’année de sa nomination à la tête de la force al-Qods, l’unité charge des opérations extérieures du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI).
La résistance, avant Soleimani
16 années étaient passées depuis l’invasion israélienne du Liban en 1982 et le déclenchement de la résistance. Dès les premiers jours, à la demande des Libanais qui l’ont fondée, les Iraniens ont entrepris d’apporter leur soutien aux Libanais.
Les combattants iraniens qui vont être envoyés au camp de Janta, à Baalbek, pour les former, faisaient partie des gardiens de la révolution qui avaient participé à la bataille de libération de la ville de Khorramchahr dans le Khuzestân, occupée par les forces de Saddam les premiers jours de l’offensive irakienne en 1980.
Etaient venus au Liban les meilleurs, les plus brillants, dont Ahmad Tawassolian et Hassan Bagheri, le frère aîné du chef d’état-major actuel du CGRI, Mohamad Bagheri. Hassan qui est tombé en martyre depuis 39 ans pendant la guerre de Défense sacrée est considéré comme l’un de ses génies.
L’expertise et la formation qu’ils vont fournir aux Libanais sera conjuguée à celle des combattants libanais acquise pendant les années de guerre civile, avec les différents mouvements de résistance palestiniens, dont le Fatah, le FPLP, le FDLP et les mouvements libanais.
C’est ainsi que les opérations de la résistance islamique ont été lancées. Avec des moyens artisanaux pour fabriquer les engins piégés, usant d’armes légères, et au plus de RPG. Et surtout les opérations martyres, pour pallier à la supériorité militaire israélienne.
Un fil conducteur dans cette résistance, le sacrifice de soi alimentée par le culte du martyre est une arme de guerre en soi. Elle ne peut être comprise dans sa globalité sans la constater.
Au fil des ans, la Résistance islamique avec l’aide de la force al-Qods a accumulé une expérience militaire importante.
Il aimait venir au Liban
Le rythme des opérations a connu une hausse graduelle. D’une centaine par an, elles sont passées à plusieurs centaines. Près de 700 en 1997, selon Aurélie Daher dans son livre «Hezbollah ». L’année qui a précédé la venue de haj Qassem. Il confiait à ses amis qu’il souhaitait travailler dans ce pays. Aussitôt désigné, il s’y est rendu directement.
« C’est lui qui venait constamment au Liban et n’attendait pas qu’on aille en Iran pour le voir », a précisé sayed Nasrallah après son martyre, vantant ses spécificités et son modus operandi.
Ceux qui l’ont connu ont remarqué qu’il se déplaçait comme si la géographie n’existait pas et pouvait entreprenre 4 à 5 voyages en 24 heures!
Peu de temps après sa venue, le Hezbollah opérait un changement structurel dans la résistance, fusionnant ses deux branches sécuritaire et militaire en une seule. Et c’est haj Imad Moughniyeh qui a été désigné pour la diriger, sous le titre « responsable jihadique ».
« Haj Qassem a été très ravi de l’apprendre », rapporte sayed Nasrallah.
Haj Imad, l’âme soeur
On peut supposer que ce changement structurel a été opéré sous la dynamique de Haj Qassem. On le soupçonne d’avoir proposé le nom de Imad Mougniyeh. Il a dit sur lui après son martyre qu’il était « le meilleur que les Iraniens connaissent ». Il est devenu son âme soeur.
C’est avec lui qu’il va tout savoir sur le Liban, dont il reconnaissait ne rien savoir. Et ils vont tout faire ensemble.
Sayed Nasrallah rapporte qu’ils venaient ensemble pour proposer les idées, pour les discuter, pour parler des missions à accomplir. Il ne savait jamais qui avait fait la suggestion d’abord. Tous deux n’en avaient cure de se faire distinguer. pour des raisons purement religieuses : travailler pour Dieu seulement répugne l’ostentatoire.
Un chef de résistance a raconté toutefois que c’est Soleimani qui lui a donné la chance d’expliquer et de tester l’efficacité d’une nouvelle arme qu’il avait proposée à la résistance, après avoir essayé en vain parmi ses compères. Haj Qassem écoutait tout le monde et savait très bien détecter les bonnes idées qui font la différence, diront de lui ceux qui l’ont connu.
Il faudra beaucoup de temps pour connaitre la part de chacun des chefs résistants, notamment Haj Qassem et Haj Imad dans les efforts qui seront déployés durant ces deux années de guerre et qui se couronneront par le retrait israélien du Liban en 2000.
Haj Qassem avait derrière lui l’expérience de la guerre Irak-Iran de 8 années, à laquelle il participé à ses batailles les plus cruciales, puis la lutte contre les bandes de narco-trafiquants qui infestaient le sud-est de son pays, à la frontière avec le Pakistan et l’Afghanistan.
Et Haj Imad était riche d’une expérience avec le Fatah, sécuritaire et militaire, de la guerre civile et de guérillas, sans compter les années de combats contre l’occupation israélienne au sud du Liban.
De 700 à 1500. Des opérations en une seule opération
On sait toutefois que le chiffre des opérations a presque doublé pour passer de 700 à 1500 en un an, à partir de 1998, selon le livre « Hezbollah ».
Les opérations avaient aussi doublé d’intensité, d’audace. Tout était visé. Les convois israéliens et ceux de leurs collaborateurs de la milice de l’Armée du Liban-sud (ALS), connue par l’armée de Lahad ou lahdéenne. Tous leurs mouvements et déplacements étaient scrutés puis visés.
Et les positions israéliennes, surtout celles de l’ALS. Une nouvelle stratégie est exécutée : détruire ces positions de sorte que les collaborateurs ne puissent plus y revenir.
Des opérations spéciales ont vu le jour avec la participation de plusieurs groupes en même temps entre lesquels les besognes étaient départagées, dans un effort méthodique spécifique: elles se sont marquées par le déclenchement d’attaques simultanées contre les positions de l’ALS dans une même région, pour couvrir une attaque centrale contre la position visée et destinée à la destruction intégrale, pendant que d’autres groupes étaient chargés de bombarder ou de tirer les routes qui y mènent, pour empêcher l’envoi de renforts ou l’évasion des miliciens, et assurer le retrait des résistants qui avaient pour mission de piéger la position centrale visée.
Liquidations et décapitations
En un an, 1999, et en deux mois, janvier et février, deux opérations de liquidation d’un grand impact ont eu lieu. Celle du numéro deux de l’ALS, Akl Hachem, tué dans l’explosion d’un engin piégé sur l’allée menant à sa maison. Une zone ultrasécurisée. Puis celle du commandant des forces israéliennes au Liban Erez Gerstein.
Les collaborateurs de l’ASL étant à bout de leurs peines, pendant que sayed Nasrallah les sommait dans ses discours solennels de se rendre pour sauver leur peau, l’élimination de ce dernier aurait poussé le commandement de l’occupation israélienne à décider de se retirer du Liban.
La prédiction du Guide
Sayed Nasrallah raconte que personne parmi les chefs de la résistance n’y croyait. Seul le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, y croyait profondément.
Qassem Soleimani était en contact continu avec lui, depuis sa désignation. Il était son bras, ses yeux, ses oreilles. Il lui rédigeait des rapports détaillés sur la situation, lui fournissant son évaluation et celle du commandement de la résistance et rapportait les siennes à la direction de la résistance.
Sayed Nasrallah relate que quelques mois avant ce retrait, Haj Qassem lui a fait parvenir une demande de réunion de la part de l’imam Khamenei, avec tous les chefs militaires de la résistance. C’était la première rencontre du genre. « Une rencontre emplie d’émotions », la décrit sayed Nasrallah. Avant d’indiquer qu’il leur avait dit qu’ils devaient se préparer au retrait israélien du Liban.
Face à leur scepticisme il leur avait dit : « si vous n’y croyez pas, gardez toutefois ceci dans vos suppositions ».
Qassem Soleimani dans ses discours vantait sa sagacité et sa clairvoyance et répétait qu’il est « un soldat de la wilayat ».
On ne sait pas non plus très bien qu’elle a été l’apport spécifique de l’ayatollah Khamenei, en comparaison à celui du général Soleimani. Son rôle aussi est l’une des grandes inconnues. En plus de celui sayed Nasrallah.
L’avenir en dévoilera peut-être certaines parties.
Une chose est sure: une certaine accélération de l’histoire a été perçue entre les 23 et 25 mai 2000, lorsque les troupes israéliennes ont entrepris à la sauvette leur retrait, sans même en informer leurs collaborateurs. Alors qu’il était prévu en juillet.
Qassem Soleimani devait se trouver au sud-Liban, aux côtés de haj Imad, parmi les gens qui célébraient cet exploit, dans une euphorie sans précédent, partagée par tous les Libanais, toute confessions confondues. Tous les deux devaient se préparer pour guerre suivante contre ‘Israël’. Celle de 2006.
Contre toute attente, ils avaient entrepris ses préparations au lendemain de ces festivités.
A SUIVRE
Source: Divers