Vaut mieux mourir que partir, tel semble être le dernier mot d’ordre du million de Palestiniens qui vivent à Gaza-ville, les survivants temporaires des 23 mois de guerre génocidaire israélienne.
Ce qui était les précédents jours un souhait exprimé par certains d’entre eux est devenu un engagement de masse. « Nous ne partirons pas » ont scandé les milliers de Gazaouis qui ont manifesté mardi dans cette ville où Israël massacre et détruit sans pitié, suivant la politique de la terre brûlée, pour les pousser à partir, tout en préparant sa plus grande offensive terrestre de la guerre.
« Nous resterons à Gaza jusqu’au dernier souffle », c’est aussi en ces termes écrits sur les pancartes qu’ils ont brandies pour exprimer leur décision unanime de rester, coûte que coûte.
De Gaza… au ciel
Dans leur ton, plus aucune supplication, plus aucun regret, plus aucune sollicitation à personne. Ils ont arrêté de demander de l’aide. « On immigrera de Gaza uniquement vers le ciel », peut-ont lire sur une banderole portée par un enfant.

« Ils ont détruit notre tour, nous ne partirons pas d’ici. Nous allons mourir à Gaza. Nous allons mourir dans nos tentes ici. Sache Netanyahu que nous allons mourir ici. Nous n’irons ni au sud ni vers aucun Etat arabe ou autre », a dit l’un des Palestiniens, refusant catégoriquement tout le projet du Premier ministre israélien de chasser les Gazaouis de la bande de Gaza.
C’est d’ailleurs la première fois que Benjamin Netanyahu appelle, en personne, les Gazaouis à partir. « Je dis aux habitants de Gaza : Partez maintenant ».
Mardi, le porte-parole arabophone de l’armée d’occupation israélienne, Avichay Adraee, qui avait l’habitude à lancer le premier les ordres d’évacuation, lui a pris le relai. « Message urgent aux habitants de la ville de Gaza, de la vieille ville et du quartier al-Touffah à l’est jusqu’à la mer à l’ouest : pour votre sécurité, dirigez-vous immédiatement vers al-Mawasi via la rue Rashid », a-t-il écrit sur la plateforme X. Il a ajouté qu’il était extrêmement dangereux pour les habitants de rester dans la ville, avertissant que l’armée israélienne interviendrait avec une force considérable dans la zone.
Dans la journée, des millions de tracts contenant les mêmes ordres ont été largués sur la ville.

Marche des linceuls sans linceul
La manifestation était baptisée « Marche des linceuls » alors que la plupart n’en portait pas, serait-ce parce qu’ils n’en ont pas. D’ailleurs, les Gazaouis n’ont plus rien. Plus rien. Mais ce n’est pas une raison pour partir!
Elle était menée par des mukhtars, des dignitaires, des chefs tribaux ainsi que par des représentants du secteur de la santé à Gaza, dont le directeur général du ministère de la Santé de la bande de Gaza, Mounir al-Barch.
« Nous sommes un peuple musulman, un peuple arabe qui aime la vie. Nous ne laisserons pas Gaza seule. Nous sommes du nord de Gaza, du sud de Gaza, mais nous ne laisserons pas Gaza seule », a lancé l’un de ces dignitaires, comme s’il parlait d’une bien-aimée. « Soit nous serons des martyrs soit nous vaincrons inchallah », a-t-il dit aussi avec amour.
Le mort d’ordre s’est diffusé dans toute l’enclave, loin de la manifestation. Comme pour cet habitant du camp al-Chati’, situé à l’est de Gaza-ville.

Les quartiers ouest les plus visés, les plus surpeuplés
Cette marche intervient alors que l’armée israélienne poursuit depuis dix jours ses violents bombardements aériens et d’artillerie sur la ville de Gaza, détruisant des dizaines de tours résidentielles, toutes les infrastructures, des centaines de tentes des déplacés etc…
Ces derniers jours, ce sont les quartiers ouest de la ville qui étaient les plus visés. Selon le bureau médiatique du gouvernement de Gaza, la plupart des habitants de Gaza, de ses quartiers Est et des provinces nord sont entassés dans cet ouest. Ils sont près d’un million trois cent mille.
L’armée d’occupation y a détruit mardi les tours Égyptiennes dans le quartier du projet Amer.
Elle a tué dans un raid les déplacés dans une tente sur la place al-Maliya au sud-ouest de Gaza-ville.
Elle a blessé des enfants dans une attaque contre une tente de déplacés dans le port de Gaza à l’ouest de la ville.
Elle a amputé d’autres enfants dans une autre tente, quelque part à Gaza-ville. Les adresses n’ont plus aucune importance. Tous les lieux se ressemblent et mènent au même destin : la mort. Mais pour les Gazaouis, c’est le martyre par le ciel de Gaza!
Les feux du ciel
Justement, dans la nuit sombre de Gaza, où l’obscurité enveloppe la détresse, le ciel s’est allumé ce mardi soir, par les feux des fusées éclairantes intensives lancés par l’armée, sur plusieurs régions de la bande de Gaza, notamment au nord-ouest de Gaza-ville et au-dessus des tours d’al-Karama. Elles escortaient les vols intensifs d’avions de reconnaissance qui guideront les tirs des avions et drones israéliens pour les bombardeements. C’est aussi facilement que la mort s’invite à Gaza. D’en haut. Mais pas question de la quitter!

« Nous ne quitterons pas Gaza quel que soit le danger qui nous guette. Nous avons décidé de mourir ici, à Gaza, parce que le sud n’est pas plus sécurisé que Gaza et Gaza n’est plus sécurisé que le sud. C’est pour cela que nous allons rester ici », c’est ainsi qu’un autre dignitaire qui a participé à la Marche des linceuls a expliqué les raisons du refus de partir.
A peine 10% des Gazaouis sont partis ces 10 derniers jours. Certains seraient même revenus, selon le bureau.
En effet, les deux régions d’al-Mawasi à Khan Younes et Rafah que les autorités de l’occupation présentent comme étant « des zones sécurisées » et où s’entassent déjà quelque 800 mille personnes ont fait l’objet de 109 raids aériens israéliens qui ont tué plus de 2000 martyrs, selon le bureau médiatique.
Israël veut entasser un million 700 mille Gazaouis dans cette zone qui ne représente que 12% de la superficie totale de l’enclave, a-t-il déploré condamnant « la poursuite des crimes de génocide et de déplacement forcé », encore une fois, une énième fois et peut-être une dernière fois.
Au bout de plus 64.650 martyrs et de plus de 163 mille blessés et mutilés, les Gazaouis semblent désormais persuadés que là où ils iront, la mort israélienne les poursuivra. Ils ont choisi d’aller à sa rencontre… de leur plein gré. Depuis Gaza et Gaza seule.
Car rester à Gaza est leur ultime triomphe.
Source: Divers



