Une réunion se déroulait mercredi à La Haye au siège de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) sur l’empoisonnement de l’ex-espion russe Sergueï Skripal, dont Moscou accuse désormais les Britanniques et les Etats-Unis d’être responsables.
Les représentants des 41 Etats membres du Conseil exécutif de l’OIAC, qui supervise l’application de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques visant à débarrasser le monde de ces armes, sont réunis depuis 10H00 (08H00 GMT) pour une nouvelle passe d’armes dans l’une des pires crises entre la Russie et l’Occident depuis la fin de la Guerre froide.
La réunion, demandée par la Russie, intervient au lendemain de l’annonce par un laboratoire britannique qu’il n’avait pas de preuve que la substance utilisée contre un ex-espion russe en Angleterre provenait de Russie.
La délégation britannique a de son côté qualifié de « perverse » la proposition russe d’une enquête conjointe sur l’empoisonnement à l’aide d’un agent innervant de M. Skripal et de sa fille en Angleterre, ajoutant qu’il s’agissait d’une « tactique de diversion ».
Alors que l’ambiance se faisait de plus en plus lourde derrière les murs de l’organisation à La Haye, le chef du renseignement extérieur russe Sergueï Narychkine a haussé le ton, affirmant que l’affaire Skripal avait été « grossièrement fabriquée par les services spéciaux de Grande-Bretagne et des Etats-Unis ».
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov avait déjà affirmé lundi que l’empoisonnement « pouvait être dans l’intérêt du gouvernement britannique » pour détourner l’attention du Brexit au sein de la population du pays.
« Impliquer la Russie »
« Nous sommes prêts à coopérer tant avec l’OIAC qu’à l’intérieur de l’OIAC », a déclaré Georgy Kalamanov, vice-ministre russe de l’Industrie et du Commerce, présent à la réunion de l’OIAC, cité sur Twitter par l’ambassade russe aux Pays-Bas.
« 14 Etats membres ont soutenu la déclaration conjointe faite à l’OIAC en lien avec l’incident de Salisbury: nous considérons qu’il est nécessaire de veiller à ce que ce problème soit résolu dans le cadre juridique international », a ajouté l’ambassade russe.
Une source diplomatique, qui a souhaité ne pas être nommée, a déclaré à l’AFP que la Russie avait présenté une motion demandant à l’OIAC « d’impliquer la Russie d’une manière ou d’une autre dans l’enquête ».
L’atmosphère de la réunion était « lourde », a indiqué cette même source, ajoutant que les discussions devaient se poursuivre après une pause déjeuner.
Quelques jours après l’empoisonnement de Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia, survenu le 4 mars à Salisbury (sud-ouest de l’Angleterre), la cheffe du gouvernement britannique Theresa May avait mis en cause Moscou, estimant qu’il s’agissait de « la seule explication plausible ».
Un rappel de la Guerre froide
Le président Vladimir Poutine, qui a dénoncé une « campagne antirusse », a dit espérer que la réunion à l’OIAC mettrait « le point final » à cette affaire qui a abouti à une vague historique d’expulsions réciproques de diplomates.
La Russie, qui clame son innocence depuis le début, s’estime renforcée par les déclarations du laboratoire britannique ayant analysé la substance utilisée contre l’ex-espion. Ce dernier l’a identifié comme étant du Novitchok, un agent innervant de type militaire dont l’origine serait un laboratoire soviétique, mais a reconnu ne pas avoir de preuve qu’elle provenait de Russie.
L’OIAC avait été sollicitée par Londres pour « vérifier l’analyse du gouvernement » britannique. Ses experts se sont rendus au Royaume-Uni pour obtenir des échantillons de la substance utilisée lors de l’empoisonnement, qui doivent être analysés dans des laboratoires internationaux indépendants.
Sergueï Skripal, 66 ans, et sa fille Ioulia, 33 ans, étaient toujours hospitalisés mardi. L’état de santé de cette dernière « s’améliore rapidement », elle « n’est plus dans un état critique », contrairement à son père, qui est dans un état « stable », selon l’hôpital.
Source: AFP