Le retrait israélien du Liban en l’an 2000, celui que les Libanais appellent fièrement la première défaite israélienne, s’est invité au cœur de la campagne électorale qui fait rage à quelques jours de l’échéance.
Un reportage lui a été consacré par une télévision israélienne, la chaine 13 et la télévision al-Manar en a rapporté les séquences les plus importantes. Cette chaine s’est vanté de vouloir révéler de nouvelles vérités, que le public ne connait pas. Mais que le public libanais connait très bien. Ces vérités étayent la version du Hezbollah selon laquelle les soldats israéliens se sont enfuis du Liban, à la hâte, laissant derrière eux leurs collaborateurs libanais de la milice de l’Armée du Liban-sud (ALS), à la merci de la résistance. Et sans les en avoir informés à l’avance.
Ces révélations nouvelles se veulent surtout embarrasser le commandant de l’unité de coordination, à cette époque, le général Benny Gantz. Celui-ci est e principal rival dans les élections du Premier ministre israélien sortant Benjamin Netanyahu, qui brigue ce poste une énième fois.
Selon la chaine 13, lorsque Gantz avait été interrogé, lors de la décision du retrait, si les miliciens libanais allaient résister après le retrait israélien, il a répondu par l’affirmative, en toute confiance. Alors qu’ils se sont effondrés au moment même du retrait.
Le collaborateur libanais Nabih Abi Rafea qui était alors le commandant du secteur oriental de la milice libanaise, communément appelé aussi la milice lahdéenne, en référence à son dirigeant Antoine Lahad, a donné sa version. Avec amertume.
« C’était durant la dernière nuit dans le Commandement de l’Unité de coordination à Marjeyoune (sud du Liban, ndlr), Benny Gatnz a dit : écoutez, j’ai été informé d’une décision définitive pour le retrait mais je ne sais pas quand. Un jeune officier m’a soufflé à l’oreille et m’a confirmé le retrait. Alors j’ai dit à Benny Gantz, toi tu dis quelque chose et les soldats autres choses. Et je lui ai dit c’est la fin. Vous nous avez trahis ».
Le reportage rapporte aussi des révélations inédites, pour le public israélien, sur l’arsenal militaire sensible qui avait été laissé sur place, lors du retrait hâtif. Il a fait état de soldats avaient été aussi abandonnés, sans égard qu’ils risquaient de tomber entre les mains des résistants libanais.
« Nous ne nous attendions pas à ce qu’il y ait des manifestations populaires, les choses étaient folles comme l’effondrement d’un château en cartes », a dit Gantz pour s’expliquer, rapporte la chaine 13.
Dès les premiers instants où l’armée israélienne a commencé son retrait, le 23 mai 2000, des milliers de Libanais originaires des régions occupées et venus de la capitale libanaise, ont déferlé vers leurs villages. Accompagnés par les combattants de la résistance islamique, ils voulaient surtout empêcher que les miliciens de l’ALS ne s’emparent de leurs bourgades. Les israéliens ont alors accéléré leur retrait et l’ont achevé le 25 mai. Déroutés, les collaborateurs libanais les avaient suivis mais en furent empêchés par les soldats israéliens qui avaient fermé derrière eux le seul passage entre le Liban et la Palestine occupée.
L’ex-commandant de l’Unité Igouz, Tchiko Tamir raconte ce qui s’était passé tout en reprochant à Benny Gantz d’avoir échoué dans sa mission :
« Le retrait aurait dû se dérouler conformément à des plans mis au point d’avance. J’ai vu les éléments de Lahad comment ils sont devenus des réfugiées et nous n’étions pas prêts à les absorber. C’est l’Unité de coordination qui aurait dû s’en charger. Toutes les positions de l’ALS ont été abandonnées avec toutes leurs armes israéliennes. Comment se fait-il qu’ils ne les ont pas retirées avant de partir. Surtout l’arsenal secret comme les ordinateurs, ainsi que les camions de l’armée. Même le bureau de Benny Gantz n’avait pas été évacué. Et à Hasbayyat, ils ont abandonné les appareils de radars. Les soldats ne devraient pas sortir comme des voleurs, à pieds ».
Le documentaire israélien rapporte aussi le point de vue d’un autre officier israélien qui a vécu ces moments sur place, lorsqu’il était l’un des commandants de la brigade de l’unité de coordination. Selon Noem ben Tsevi, ce qui s’était passé constituait bien une évasion et non un retrait.
« Le retrait a été une évasion et non pas un retrait. Il s’est déroulé d’une façon chaotique, un mois avant la date qui lui avait été fixée. Personne ne pouvait s’imaginer, même dans les rêves, que les choses allaient se passer de la sorte. L’armée israélienne ne peut prendre la fuite ainsi, cela ne fait pas partie de ce qu’on nous a appris. J’avais dit à Benny Gantz qu’il devrait quitter son poste ».
Le reportage israélien révèle aussi une autre bêtise des soldats israéliens. Alors qu’ils voulaient ouvrir un coffre-fort empli d’argent pour l’offrir aux collaborateurs, ils l’ont fait sauter aux explosifs, dilapidant tous les billets qui s’y trouvaient. Il faut croire que le mauvais sort les traquaient tous les deux. Pour les auteurs du reportage israélien, c’est Benny Gantz qui devrait payer le prix.