Une journaliste yéménite a lancé une pétition, qui a recueilli plus de 24 000 signatures, exhortant le président Emmanuel Macron à «renoncer à toute menace de poursuites» à l’encontre de trois journalistes convoqués par les services secrets après leur enquête sur l’utilisation d’armes françaises par la coalition saoudienne contre les Yémenites.
«Alors que la liberté d’informer est menacée partout dans le monde, il est d’autant plus inquiétant de voir que la France, qui se dit championne de la liberté de la presse, contribue elle aussi à la fragiliser», déclare Afrah Nasser, journaliste indépendante de 34 ans, exilée en Suède, et lauréate en 2017 d’un prix international sur la liberté de la presse.
«Il est honteux et scandaleux que dans un pays comme la France, où les gens ont bataillé très dur pour le respect des droits de l’Homme et de la liberté de la presse, ces trois journalistes soient sur le point d’être interrogés. C’est vraiment une honte que la France veuille cacher son implication dans le conflit yéménite», a renchéri ce 6 mai auprès de l’AFP Afrah Nasser, jointe par téléphone en Suède.
La pétition de soutien aux trois journalistes, Geoffrey Livolsi et Mathias Destal du nouveau média en ligne français Disclose et Benoît Collombat, de la cellule investigation de Radio France, a été lancée le 3 mai, lors de la Journée mondiale de la liberté de la presse.
La justice française a ouvert une enquête fin 2018 pour «compromission du secret de la défense nationale» après la transmission à Disclose d’une note classée «confidentiel défense», évoquant l’utilisation d’armes françaises au Yémen. Ces journalistes sont convoqués le 14 mai en vue d’une audition libre dans les locaux de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) française.
La note en question, un rapport d’une quinzaine de pages révélé le 15 avril par Disclose, aurait été rédigée le 25 septembre 2018 par la Direction du renseignement militaire (DRM). Elle répertorie notamment les armes vendues par la France qui seraient déployées par l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis au Yémen, théâtre d’un conflit très meurtrier qui fait rage depuis 2015.
La pétition demande aux autorités françaises de «renoncer à toute menace de poursuites à l’encontre de ces trois journalistes, et de respecter le secret des sources journalistiques».
Plus de 15 mille civils yéménites ont été tué depuis le début de la guerre lancée par la coalition saoudo-émirati-US contre le Yémen, en mars 2015.
Source: Avec AFP