Alors que la guerre entre les forces arméniennes du Haut-Karabakh et l’Azerbaïdjan se poursuit, les appels au cessez-le-feu des grandes puissances sont plus que jamais inaudibles. Rémy Makinadjian, chef d’entreprise et proche de Hovhannès Guevorkian, représentant du Haut-Karabakh en France, craint une internationalisation du conflit.
Sputnik France: Comment expliquez-vous la volonté de la Turquie de soutenir l’Azerbaïdjan?
Rémy Makinadjian: «La Turquie est particulièrement affaiblie aujourd’hui, que ce soit au niveau politique ou économique. Sans parler des relations internationales, où elle se trouve de plus en plus isolée. Erdogan, comme Aliev, cherche à redorer leurs blasons. Erdogan rêve de recréer l’Empire ottoman. Il n’en pas les moyens et de par sa folie des grandeurs il est en train de mettre la Turquie en péril. Il joue le tout pour le tout. Je pense que le moment choisi pour attaquer le Haut-Karabakh est tout sauf anodin. Nous sommes en pleine crise du Covid-19. Les nations tentent de résoudre leurs problèmes internes et sont focalisées sur le sort de leurs populations. Erdogan et Aliev ont saisi une opportunité.»
Sputnik France: La communauté internationale semble hésitante par rapport aux agissements de la Turquie. Comment l’expliquez-vous?
Rémy Makinadjian: «Je trouve très choquant le manque de réaction par rapport aux actes d’Erdogan. Jusqu’à quand va-t-on le laisser faire? Encore une fois, il est aussi très isolé. Il est en confrontation avec la Grèce, membre de l’Otan, il est en délicatesse avec plusieurs pays européens, dont la France. Il joue un double jeu avec les États-Unis et la Russie. Ceci ne peut pas bien finir.»
Sputnik France: Que va-t-il se passer maintenant?
Rémy Makinadjian: «Les combattants arméniens du Haut-Karabakh ne lâcheront rien. Le camp d’en face peut exploser nos maisons et nos écoles, mais nous défendrons nos femmes, nos enfants et nos aînés. Ceux qui se battent ont l’extrême conviction d’être sur leurs terres. Rien ni personne ne les fera partir du front.
Je pense que l’attitude de la communauté internationale vis-à-vis de la Turquie va être déterminante. L’Azerbaïdjan seul n’a pas les moyens de mener cette guerre. La position délicate d’Aliev dans son pays peut également jouer. Il va lui être de plus en plus difficile de justifier ce conflit et les pertes humaines qu’il entraîne. De plus, la position diplomatique de Bakou vis-à-vis de l’opinion publique va être de moins en moins tenable. Reste également l’hypothèse d’une intervention de Moscou.»
Sputnik France: Craignez-vous que le conflit s’internationalise?
Rémy Makinadjian: «La zone du Caucase, magnifique, est aussi une poudrière géopolitique. Je crains que nous assistions à un événement qui pourrait déboucher sur un conflit international. Nous sommes peut-être à l’aube d’une Troisième Guerre mondiale.»
Malgré le cessez-le-feu négocié à Moscou le 10 octobre entre les forces arméniennes du Haut-Karabakh et l’armée azérie, les combats font toujours rage pour le contrôle de cette région peuplée à majorité d’Arméniens, qui a fait sécession de l’Azerbaïdjan.
Les deux parties se rendent mutuellement responsables du conflit et les affrontements ont déjà fait au moins 600 morts, selon des bilans partiels, qui pourraient s’avérer très en dessous de la réalité. Ilham Aliev, Président de l’Azerbaïdjan et soutenu par la Turquie de Recep Tayyip Erdogan et Arayik Haroutiounian, à la tête du Haut-Karabakh, se rendent coup pour coup à travers des combats acharnés.
Source: Avec Sputnik