Obstacle depuis la mi-mai à l’entrée de la Suède et de la Finlande dans l’Otan, le président turc Recep Tayyip Erdogan a fini par lever son veto mardi 28 juin, évitant un revers à l’Alliance qui ouvre son sommet à Madrid.
« Je suis ravi d’annoncer que nous avons un accord qui ouvre la voie à l’entrée de la Finlande et de la Suède dans l’Otan » et qui répond « aux inquiétudes de la Turquie sur les exportations d’armes et sur la lutte contre le terrorisme », a déclaré le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg devant la presse.
Les membres de l’Otan vont donc pouvoir « inviter » officiellement mercredi les deux pays nordiques à rejoindre l’Alliance, a-t-il ajouté, rapporte l’AFP.
Dans un communiqué publié par la Maison Blanche, le président américain Joe Biden a « félicité la Turquie, la Finlande et la Suède » pour la signature de cet accord.
L’intégration de la Finlande et de la Suède va « renforcer la sécurité collective de l’Otan et va bénéficier à l’ensemble de l’Alliance transatlantique », a écrit M. Biden.
« Alors que nous commençons ce sommet historique à Madrid, notre Alliance est forte, plus unie et plus déterminée que jamais », a-t-il poursuivi.
L’entrée formelle des deux pays, qui doit être ratifiée par les parlements des 30 Etats membres de l’Alliance, est un long processus qui prend des mois.
Après plusieurs salves de négociations ces dernières semaines, l’homme fort d’Ankara s’était réuni plusieurs heures dès son arrivée à Madrid avec son homologue finlandais Sauli Niinistö et la Première ministre suédoise Magdalena Andersson.
Avant la signature formelle d’un accord dont M. Stoltenberg a ensuite rendu compte devant la presse.
Ankara a eu « ce qu’elle voulait »
La Turquie bloquait l’adhésion de la Suède et de la Finlande car elle les accusait d’abriter des militants de l’organisation kurde PKK, qu’elle considère comme « terroriste ».
Elle dénonçait également la présence dans ces pays de partisans du prédicateur Fethullah Gülen, soupçonné d’avoir orchestré une tentative de coup d’État en Turquie en juillet 2016. Et exigeait par ailleurs la levée des blocages d’exportations d’armes décidés à son encontre par Stockholm après l’intervention militaire turque dans le nord de la Syrie en octobre 2019.
Selon M. Stoltenberg, dans le cadre de cet accord, les deux pays nordiques se sont engagés à « renforcer leur coopération » en matière de lutte contre le terrorisme avec Ankara et à s’entendre sur des « extraditions » de membres d’organisations kurdes que la Turquie considère comme « terroristes ».
« La Turquie a obtenu ce qu’elle voulait », c’est-à-dire la « pleine coopération » des pays nordiques contre le PKK et ses alliés, a déclaré la présidence turque dans son communiqué.
Dans un entretien avec l’AFP, Magdalena Andersson a salué une « étape très importante pour l’Otan » car les deux pays nordiques, qui ont décidé d’abandonner leur neutralité depuis l’invasion russe de l’Ukraine, « seront pourvoyeurs de sécurité au sein » de l’Alliance.
Concessions ou pas des USA ?
Ce feu vert d’Ankara à l’entrée des deux pays nordiques avait été immédiatement salué par un haut responsable de la Maison Blanche, selon lequel il donne un « élan puissant » à l’unité occidentale en cette période troublée par la guerre en Ukraine.
Le Premier ministre britannique Boris Johnson a estimé pour sa part que l’adhésion des deux pays nordiques allait rendre l’Alliance « plus forte et plus sûre ».
Washington a en outre dit que la Turquie n’a pas fait « de demande particulière de concessions aux Américains » pour lever son opposition à l’entrée de la Finlande et de la Suède dans l’Otan.
Erdogan doit rencontrer mercredi Joe Biden en marge du sommet.
Avant de partir pour Madrid, le président turc avait souligné que le « sujet le plus important » entre Ankara et Washington était « celui des F-16 », en référence aux avions de chasse commandés et partiellement payés par Ankara, mais dont Washington a suspendu le contrat de livraison après que la Turquie a acquis un système de défense russe S-400.
La dernière rencontre entre MM. Biden et Erdogan, après des mois de brouille entre Ankara et Washington, remonte au mois d’octobre dernier à Rome, en marge du G-20, le sommet des 20 pays les plus industrialisés.