La Bulgarie a reporté aujourd’hui sa décision concernant l’extradition vers le Liban du propriétaire du navire impliqué dans l’explosion du port de Beyrouth en 2020, exigeant des autorités libanaises qu’elles confirment qu’elles n’appliqueront pas la peine de mort, selon l’Agence France-Presse. D’après les chiffres officiels, l’explosion a fait 220 morts, environ 6 500 blessés et causé des destructions massives dans la capitale libanaise.
Un porte-parole du tribunal de Sofia a expliqué à l’AFP que « les juges bulgares ont pris cette décision lors d’une audience tenue aujourd’hui, considérant les déclarations des autorités libanaises sur ce sujet comme très vagues ». Des représentants des ambassades du Liban et de Chypre ont assisté à l’audience.
Plus tôt dans la journée, lors d’une conférence de presse à Sofia, le président libanais Joseph Aoun a souligné « l’importance de la coopération judiciaire et pénale entre les deux pays, notamment concernant l’explosion du port de Beyrouth », affirmant sa détermination à « faire la lumière sur cette affaire et à révéler la vérité ».
L’explosion est considérée comme l’une des plus importantes explosions non nucléaires au monde. Sa force a brisé des vitres dans une grande partie de Beyrouth, dévasté des zones entières autour du port et a été entendue à 70 kilomètres de distance. Sa fumée était visible depuis la frontière libano-syrienne, à 80 kilomètres de là.
L’Institut d’études géologiques des États-Unis (USGS), basé en Virginie, a indiqué que l’explosion était équivalente à un séisme de magnitude 3,3 Richter.
En septembre dernier, la Bulgarie a arrêté Igor Grechushkin, un citoyen russo-chypriote, propriétaire du navire Rhosus, qui transportait en 2014 une cargaison de nitrate d’ammonium qui a explosé dans le port de Beyrouth 6 ans plus tard dans des conditions suspectes.
Le navire devait transporter ce nitrate d’ammonium de Batoumi, en Géorgie, au Mozambique, en passant par la Turquie, mais à Beyrouth, les inspecteurs l’ont jugé inapte à la navigation et l’ont empêché de partir.
Selon Russia Today, les autorités mozambicaines ont assuré que l’usine d’explosifs au Mozambique n’a même pas payé pour cette cargaison, même par virement bancaire. Son gouvernement a nié être au courant de l’existence de cette transaction. De plus, les responsables de l’usine géorgienne qui produisait l’engrais explosif ont déclaré que cette usine appartenait auparavant à un autre groupe de personnes et qu’ils ne pouvaient pas répondre à ses questions pour le moment, car ils n’y travaillaient que depuis trois ans.
Le parquet bulgare avait expliqué que Grechushkin était recherché par les autorités libanaises pour « importation d’explosifs au Liban, un acte terroriste ayant entraîné la mort d’un grand nombre de personnes, et d’avoir mis hors service des machines du navire dans le but de le faire couler ».
Vivant à Chypres, la destination prisée des Russes fortunés, il avait acquis le navire en 2013, un an avant le voyage, de la part d’une société anonyme, la Briarwood Corp. Certaines sources affirment qu’il l’a acheté, d’autres qu’il l’a loué.
Le navire avait été immobilisé après avoir été inspecté par les autorités portuaires de Beyrouth, en raison de « faux documents », selon le bulletin d’information sur les arrestations. Il transportait 8 Ukrainiens et un Russe. Grâce à l’intervention du consul ukrainien, 5 Ukrainiens ont pu rentrer dans leur pays, laissant quatre membres d’équipage pour s’occuper du navire.
Après avoir ordonné la libération de l’équipage du navire pour des raisons humanitaires en 2014, un juge libanais a ordonné que la cargaison mortelle soit transférée à l’entrepôt 12. Elle y est restée jusqu’au jour de l’explosion.
Les agents des Etats-Unis au Liban et ailleurs impliqués dans une campagne infeste contre la résistance avaient lancé des accusations sans fondement selon lesquelles la cargaison revenait au Hezbollah, arguant qu’il en avait besoin dans sa participation à la guerre en Syrie. Ce que son ex-secrétaire général le martyr suprême avait fermement démenti dans un discours.
Le capitaine du navire, Boris Prokoshchev qui était resté ainsi que trois autres membres d’équipage bloqués pendant 11 mois dans le port de Beyrouth a indiqué qu’il n’avait pas pu franchir le canal de Suez car l’armateur lui avait indiqué ne plus disposer des fonds nécessaires et lui avait ordonné de se rendre au port de Beyrouth pour y charger des machines afin de réunir les sommes requises pour la traversée.
Prokoshev a déclaré qu’à son arrivée à Beyrouth, deux mois après son départ de Géorgie, il avait constaté que le navire, âgé de 30 à 40 ans, était incapable de charger les machines et ne pouvait supporter de charge supplémentaire.
Selon lui, les autorités libanaises ont jugé le navire inapte à la navigation et l’ont immobilisé pour non-paiement des droits de port. Lorsque l’équipage a tenté de contacter l’armateur pour obtenir de l’argent pour le carburant, la nourriture et autres produits de première nécessité, il est resté injoignable. Prokoshev a conclu : « Il semble qu’il ait abandonné le navire qu’il avait affrété. »
« Grichushkin m’a dit qu’il avait fait faillite, mais je ne le crois pas. La vérité est qu’il a abandonné le navire et l’équipage, ainsi que la cargaison de nitrate d’ammonium », a-t-il dit aussi.



