Netanyahu se trouve face à un véritable dilemme. Les divergences sur la réforme judiciaire visant à accroître le pouvoir des élus sur celui des magistrats persistent pour la 12eme semaine consécutive et prend une tournure encore plus dramatique.La contestation se fait sentir même dans le parti de Netanyahu et son gouvernement de coalition risque l’éclatement.
Manifestations marquées par des heurts avec les forces de l’ordre, grèves des services publics et des syndicats, le mouvement de contestation qui appréhende une dérive antidémocratique et un affaiblissement du pouvoir juridique ne cesse de s’amplifier et semble prendre le dessus.
Mais la coalition au pouvoir ne baisse pas les bras. Les partisans à la réforme adoptent la voie de la crispation et se préparent pour passer à l’acte et investir à son tour les rues.
Divergences dans le Likoud
Au sein du Likoud, le coup de massue est venu du ministre de la Défense, Yoav Gallant.
Vendredi 24 mars, il avait dit craindre qu’une poursuite des divisions au sein de la population sur ce dossier engendre une « vraie menace pour la sécurité d’Israël », et réclamé une pause d’un mois dans le processus.
Le lendemain, samedi, il a été limogé par Netanyahu.
Sans tarder, l’annonce de son renvoi a entraîné la démission du consul général d’Israël à New York, Asaf Zamir. Le diplomate a qualifié sur Twitter le limogeage du ministre de « dangereuse décision » qui l’a « convaincu qu'(il) ne pouvait plus continuer de représenter ce gouvernement ».
Deux députés du Likoud ont par ailleurs exprimé sur Twitter leur soutien à M. Gallant samedi, soulevant ainsi la question de savoir si le gouvernement pourrait compter sur la majorité s’il procédait à un vote.
Sous le couvert de l’anonymat, un responsable du Likoud a affirmé que Netanyahu a perdu le contrôle.
Bibi dégage
Le Dimanche 26 mars, des milliers de manifestants ont convergé, selon la police, vers la rue Kaplan dans le centre de Tel-Aviv, épicentre des protestations depuis la présentation en janvier du projet de réforme.
Contestant aussi bien le limogeage de Gallant que la réforme judiciaire, d’autres rassemblements spontanés ont eu lieu devant la résidence du Premier ministre à Jérusalem ainsi que dans d’autres villes du pays comme à Haïfa (nord) et à Beer Sheva (sud), selon les médias locaux.
Munis de drapeaux bleu et blanc, des manifestants ont scandé des slogans comme « Bibi dégage! », reprenant le surnom de Benjamin Netanyahu en se rendant vers sa demeure.
La nuit a été particulièrement violente. Des observateurs ont fait état qu’elle a été la plus dramatique jamais vue.
Grève générale
Le mouvement de contestations s’est poursuivi ce lundi, assorti par des appels à la grève générale qui a paralysé l’entité.
Des dizaines de milliers de protestataires se trouvent devant le bâtiment de la Knesset. 115 mille cet après-midi selon la police israélienne qui a rendu compte de la présence de 115 mille manifestants dans la ville sainte d’al-Qods /Jérusalem. Dans la matinée, le Parlement avait rejeté une motion de censure proposée par l’opposition par 59 voix contre 53.
De même la centrale syndicale israélienne Histadrout, plus gros syndicat de travailleurs israéliens, a annoncé « une grève générale » immédiate.
Ont également rejoint la grève, entre autres, le syndicat de l’ordre des avocats, des juges du service public, la Société d’électricité israélienne, le Conseil des travailleurs de la compagnie aérienne Alal, les Comités des ouvriers du port d’Ashdod, des propriétaires des restaurants en séries, des chefs d’autorités locales etc…
L’organisation des aéroports israéliens a annoncé l’arrêt des voyages entre Tel Aviv et l’étranger. Les universités ont fermé leurs portes sine die.
Les médias ont rapporté que mêmes les ambassades ont reçu des prescriptions les sommant de rejoindre la grève.
Pour une constitution israélienne
« Netanyahu peut renvoyer Gallant, mais il ne peut pas renvoyer la réalité et ne peut pas renvoyer le peuple d’Israël qui s’oppose à la folie de la coalition », a tweeté le chef de l’opposition, le centriste Yaïr Lapid.
« Le Premier ministre d’Israël est une menace pour la sécurité d’Israël », a-t-il ajouté.
Dans son dernier discours ce lundi, il a présenté de nouvelles revendications.
« Nous n’arrêterons pas jusqu’à ce qu’il y ait une constitution pour Israël. Nous poursuivrons le combat dans les rues et la Knesset et partout. Nous ne capitulerons pas » a-t-il clamé lors d’une manifestation ce lundi.
Il est question de divergences profondes au sein de la Commission constitutionnelle israélienne.
“Israël” ne dispose pas de constitution écrite.
Les partisans de la réforme dans les rues
Netanyahu se trouve aussi tiraillé par le camp de la droite et des ultra-orthodoxe favorable à la réforme. Celui-ci commence à se manifester et assure vouloir recourir à la rue.
Le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir a appelé à des manifestations dans toutes les régions pour soutenir la réforme judiciaire.
« Aujourd’hui, nous arrêtons notre silence », a-t-il lancé.
Il avait évoqué auparavant l’éventualité de présenter sa démission.
Des rabbins ont demandé au gouvernement de ne pas geler les réformes judiciaires.
Des affrontements entre les deux publics pourraient éclater, compromettant davantage la sécurité, fragilisée d’autant que les policiers sont d’ores et déjà débordés. Faisant craindre la concrétisation du spectre d’une guerre civile.
Ce lundi, un israélien a tenté d’écraser des manifestants israéliens dans la rue Ayalon à Tel Aviv, ont rapporté les médias.
Des représentations diplomatiques étrangères ont mis en garde leurs ressortissants contre l’escalade des protestations et les retombées de la grève.
Crispation dans le gouvernement
Au sein du cabinet, les positions des ministres sont aussi crispées et leurs déclarations n’admettent qu’une suspension temporaire de la réforme pour dégonfler la colère.
Le ministre de la Justice a modéré sa position : après avoir fait part qu’il pourrait démissionner si la réforme est suspendue, Yariv Levin a dit ce lundi qu’il allait respecter toute décision prise par Netanyahu pour empêcher l’effondrement du Likoud.
Le ministre des Finances Bezalel Smotrich s’est dit favorable à une suspension temporaire de la réforme puis il a déclaré dans l’après-midi que les réformes devraient entrer en vigueur.
Lui et Ben-Gvir vont participer à la manifestation ce soir.
Alors que le président israélien Isaac Herzog a appelé le gouvernement à « stopper immédiatement » le travail législatif sur le projet de réforme judiciaire.
Mais, signe que le processus législatif n’a pas encore été enrayé, la Commission parlementaire des lois a voté lundi matin en faveur d’un des éléments centraux de la réforme, au coeur des inquiétudes de ses détracteurs : le projet de loi modifiant le processus de nomination des juges.
Dernière évolution cet après-midi: des affrontements ont éclaté entre les partisans de la réforme et ses contestataires dans la ville sainte d’al-Qods, selon Channel 12.
Signe de confusion : Netanyahu a reporté son discours prévu ce lundi après-midi dans lequel il devait donner son avis final.
Source: Divers