A en croire les révélations de sayed Hassan Nasrallah, dévoilées lors d’une interview accordée à une télévision iranienne en février 2020, personne au sein de la résistance, ni ses dirigeants politiques ni ses chefs militaires ne croyait en 1999 qu’Israël allait se retirer du sud-Liban. En mars de cette année, Ehud Barak qui venait d’être désigné comme Premier ministre s’était engagé à retirer les troupes israéliennes du bourbier libanais.
En 1982, à peine la résistance palestinienne avait été forcée à quitter le pays du cèdre à l’issue de l’invasion israélienne du Liban, qu’une résistance libanaise est née : la Résistance islamique. En 18 années, elle va mener aux forces israéliennes et à leurs collaborateurs de l’Armée du Liban-sud dans la bande frontalière qu’ils occupaient au sud du Liban et dans la Bekaa occidentale une véritable guerre d’usure.
A partir de 1998, cette résistance a intensifié ses opérations de résistance d’une façon considérable : quantitativement et qualitativement.
En 1999, le chiffre de ses opérations avait franchi le cap des 1500, lorsque deux délégations du Hezbollah, une politique et une militaire s’étaient rendues en Iran pour rencontrer le guide suprême. Selon sayed Nasrallah, cette rencontre avait été organisée par le chef de la force al-Qods du Corps des Gardiens de la révolution islamique, le général Qassem Soleimani.
« Nous avions rencontré son éminence le guide à la fin l’an 1999, c’est-à-dire quelque mois avant cette date (de la libération), et nous lui avions dit que nous écartions l’idée qu’ils (les Israéliens) se retirent à cette date parce qu’ils tentent d’obtenir des engagements sécuritaires du Liban et de la Syrie et certains acquis, que ni la direction syrienne ni les responsables libanais n’allaient leur fournir et qu’ils ont devant eux deux choix : soit ils laissent leurs troupes subir la pression des opérations de résistance, soit ils sortent sans acquis, ce qui va constituer une évolution stratégique énorme dans le conflit avec l’ennemi israélien et nous écartions cette éventualité. »
Et sayed Nasrallah de poursuivre : « Alors le guide a dit durant cette rencontre ‘n’écartez pas ceci mais posez-le comme une éventualité raisonnable et mettez au point vos plans en le prenant en compte. Supposez que l’ennemi israélien va sortir du sud sous les coups de la résistance et sans condition’ »
Selon le numéro un de la résistance, ces propos ont été tenus devant la première délégation du Hezbollah, les membres de la chourah, son conseil consultatif.
Il indique que dans la nuit, une deuxième rencontre a été organisée avec les dirigeants jihadiques, termes désignant ses chefs de guerre. Ils étaient 50 chefs.
Selon lui, le programme se limitait en principe à effectuer la prière derrière l’imam Khamenei, à lui embrasser la main et partir, sans discours.
« A la fin de la prière, les chefs militaires du Hezbollah qui étaient en tenus militaires étaient très impressionnés, certains ont même pleuré. C’était une scène émouvante très impressionnante. Le guide leur a demandé de s’assoir et de leur parler, il m’a demandé de leur traduire, ce qui n’était pas planifié. Il leur a dit « mes fils, vous êtes devant une grande victoire et elle est très proche ».
Sayed Nasrallah fait constater que durant la rencontre matinale avec les responsables politiques, l’ayatollah Khamenei n’avait pas un ton aussi tranché parce que les frères avaient un avis contraire. « Mais dans la soirée, il a dit que « la victoire était imminente, beaucoup plus tôt que certains le croient », et il m’a regardé puis tous les autres en disant : « vous tous, allez la voir de vos propres yeux », rapporte-t-il.
A entendre ces prévisions, sayed Nasrallah avoue avoir appréhendé qu’elles ne soient pas réalisées à la lettre.
« A vous dire franchement, après les propos du guide, j’étais plutôt inquiet parce que ces frères de la résistance sont très minutieux et ils pèsent chaque mot. Je m’étais dit que le guide leur a dit que vous tous allez voir la victoire de vos propres yeux, sachant que ces 50 chefs combattaient sur les premières lignes des fronts et risquaient à tout moment de tomber en martyrs. Si l’un d’entre eux ne voyait pas la libération, les autres pourraient douter des propos de guide », a-t-il dit durant l’interview.
Et sayed Nasrallah de conclure : « Et c’est là le miracle. A cette époque, les opérations de la résistance ont connu une forte recrudescence et ces frères étaient au cœur des batailles. Or le jour de la libération, tous ceux qui se trouvaient ce jour-là dans la rencontre étaient toujours vivants. Ils ont vu la victoire de leurs propres yeux. Certains sont tombés en martyrs plus tard ».
Source: Médias