Dentifrice, chocolat, déodorant, lessive, cacahuètes, boîtes de thon, etc: ces produits habituellement en libre-service se retrouvent de plus en plus sous clef aux Etats-Unis face à la recrudescence des vols, d’une ampleur telle que la santé financière de certains groupes est affectée.
«La délinquance en bandes organisées et le vol en général représentent un risque important pour de nombreux distributeurs», a commenté Lauren Hobart, patronne de la chaîne d’articles de sports Dick’s Sporting Goods.
«La part des vols dans notre démarque a été importante à la fois sur nos résultats du deuxième trimestre et sur nos prévisions pour l’ensemble de l’année», a-t-elle déploré, annonçant un avertissement sur résultats. Le bénéfice par action annuel — référence pour les marchés — devrait atteindre entre 11,33 et 12,13 dollars (12,90 à 13,80 dollars auparavant).
Dans ce contexte, la démarque représente la différence entre les volumes commandés aux fournisseurs et l’inventaire réel, inférieur à cause des vols des clients et du personnel, de la casse.
Le géant de la grande distribution Walmart, son concurrent Target, les chaînes de pharmacies CVS et Walgreens — qui font aussi supérettes –, la chaîne de bricolage Home Depot ou encore le distributeur de chaussures de sport Foot Locker font partie des nombreuses enseignes s’inquiétant de la hausse des vols, en particulier avec violence, et de l’impact sur leurs finances.
«Au cours des cinq premiers mois de l’année, nos magasins ont constaté une hausse de 120% des vols accompagnés de violence ou de menaces de violence», a dénoncé Brian Cornell, patron de Target.
Délinquance en bande organisée
«Nos équipes continuent à faire face à une quantité inacceptable de vols à l’étalage et de délinquance en bande organisée » (ORC), a-t-il relevé, signalant une démarque au deuxième trimestre « bien au-dessus de ce qui est soutenable sur le long terme ».
Les taux d’intérêts ont bondi de près de zéro à 5,50% en dix-huit mois — un plus haut en vingt-deux ans — pour freiner une inflation ayant atteint 9,1% en juin 2022 (un record en quatre décennies), rendant les fins de mois difficiles pour beaucoup d’Américains.
Selon la dernière enquête de la Fédération nationale de la distribution (NRF), la démarque atteignait 94,5 milliards de dollars en 2021 (90,8 milliards en 2020). Elle recensait un bond de 26,5% de l’ORC. Selon 88% des distributeurs interrogés, «la pandémie a entraîné une augmentation des risques», en particulier des agressions contre clients et personnel.
Résultat: de plus en plus de magasins installent des parois transparentes avec serrures sur les rayonnages — parfois des chaînes cadenassées sur les réfrigérateurs — et disséminent des boutons d’appel dans les allées pour une ouverture par le personnel.
Les rayons non-protégés sont souvent peu garnis, voire vides, pour limiter les velléités chapardeuses.
Cambriolage au chalumeau
Des mesures pas toujours dissuasives. Un homme, portant capuche et masque sanitaire, a fondu avec un chalumeau — devant clients et employés — le plexiglas d’un Walgreens du Queens, à New York. Il remplit ensuite tranquillement un grand sac, selon une vidéo publiée par plusieurs médias.
C’est justement dans le Queens que des habitants ont signé une pétition se plaignant de l’insécurité dans plusieurs CVS. D’après plusieurs médias, des enseignes demandent à leur personnel de ne pas intervenir en cas de vol ni de contacter la police, pour leur sécurité.
Certaines envisagent de fermer des magasins à l’instar de la chaîne de supermarchés Giant, à Washington, «où le vol et la violence sont importants, et empirent».
«Il est de plus en plus difficile d’opérer dans ces conditions», a indiqué un porte-parole à l’AFP, soulignant que d’autres implantations étaient concernées.
La menace des «Flash robs»
Walgreens a fermé cinq magasins de San Francisco en 2021 à cause des vols, et Walmart quatre à Chicago cette année, officiellement faute de rentabilité.
«La démarque a progressé cette année. Elle avait progressé l’an dernier. C’est inégal dans le pays», a relevé John Rainey, directeur financier de Walmart.
«Nous ne voulons pas que cela augmente parce que ça pourrait entraîner une hausse des prix».
Mais les internautes signalent de plus en plus de «Flash Robs»: un groupe déferle dans un magasin, s’empare en quelques minutes d’articles à portée de mains et s’enfuit.
Comme le 12 août dans un magasin de la chaîne Nordstrom à Los Angeles, où une trentaine de personnes masquées ont volé pour plus de 300.000 dollars d’articles de luxe et aspergé l’agent de sécurité de gaz anti-ours, selon la police.
Source: Avec RT