Bachar al-Assad a annoncé que la libération de la ville de Raqqa serait désormais le prochain objectif prioritaire de l’armée syrienne. Elle poursuivra en parallèle la libération d’autres villes et localités de Syrie.
« Après Alep et Palmyre, Raqqa est notre nouvel objectif. À ce jour, nous sommes proches de Raqqa. Nos forces ont atteint l’Euphrate (pour la première fois depuis quatre ans, ndlr) qui est très proche de Raqqa, fief de Daech. Pour autant, cela ne signifie pas que les autres villes ne sont pas prioritaires, cela pourrait se dérouler parallèlement », a déclaré Bachar al-Assad lors d’une interview accordée à la chaîne hongkongaise Phoenix.
Parlons perspectives. Du point de vue stratégique, Raqqa représente peu. C’est une relativement petite ville dans un milieu désertique. Rien à avoir avec Alep, grande mégalopole et capitale économique de l’État syrien, ou encore Palmyre, la « Perle du désert », qui tout en étant peu peuplée, était et reste un grand symbole culturel pour la Syrie et pour toute l’humanité. Raqqa, elle, n’a de symbolique que son statut de « fief » de Daech, selon les déclarations mêmes du président Assad il y a quelques mois. Néanmoins, et au moment où les É.-U. Et leurs alliés s’activent pour tenter de remporter au moins une victoire digne de ce nom sur le théâtre syrien, Damas démontre qu’elle est amplement en mesure de libérer cette ville elle-même, avec l’aide de ses alliés, à l’instar d’autres parties du territoire.
Pour rappel, le gouvernement syrien contrôle les cinq plus grandes villes du pays: Damas, Alep, Homs, Lattaquié, Hama. D’autre part, et cela est tout aussi important, entre 70 et 80 % de la population de Syrie se trouve dans des territoires sous contrôle gouvernemental. Chiffres hautement symboliques lorsqu’on se souvient comment le mainstream médiatique et les élites politiques occidentales ont répété sur tous les tons que les civils fuyaient massivement « les troupes du régime »…
D’ailleurs, quelle sera la réaction du mainstream et des élites politiques face à une éventuelle reprise de la « capitale » de Daech par les forces gouvernementales? Réponse: très probablement la même que celle lors de la libération d’Alep et de Palmyre, à savoir révolte ou au moins une simple déception. Quoi qu’il en soit, cette hypocrisie ne stoppera pas le gouvernement syrien dans la poursuite de la libération du territoire du pays de la présence terroriste. La déclaration d’Assad n’a fait que le confirmer.
Mieux que cela, le leader syrien pense que le conflit qui déchire son pays depuis maintenant six ans pourrait être entièrement résolu cette année, tout en ajoutant que les forces étrangères présentes en Syrie sans invitation compliquent la situation. Par ces propos, il viserait clairement en premier lieu les É.-U., principaux instigateurs du chaos orchestré dans son pays, comme dans la région en général. La présence turque est également contestée, mais plus ou moins tolérée, car elle est coordonnée avec la Russie. Or, la Turquie continue de se rapprocher de la Russie à différents niveaux, la toute récente visite d’Erdogan à Moscou l’a bien confirmé. En Syrie, les deux capitales coordonnent leurs efforts diplomatiques avec le processus d’Astana et militaires en opérant des frappes conjointes contre Daech dans le nord de la Syrie, qui ont abouti à la libération d’Al-Bab. Dans ce contexte, il est raisonnable de penser que la présence de la Turquie en Syrie ne sera pas permanente, ni même un problème insurmontable.
Une fois encore, le problème majeur reste bien la politique étasunienne dans la région, celle qui consiste à diviser pour mieux régner, ou du moins pour mieux semer le chaos — l’élite US en est la championne absolue. Mais lorsqu’il s’agit d’en réparer les conséquences, le plus souvent catastrophiques, les É-U. et ses « alliés » ouest-européens sont presque toujours aux abonnés absents. Simple constat de la réalité.
Dernier point. L’armée syrienne reste en effet sur l’offensive, avec plusieurs objectifs stratégiques en vue: rompre l’encerclement des troupes d’élite syriennes à Deir ez-Zor et nettoyer la zone, avancer sur Raqqa, le fief de Daech, sans oublier évidemment Idlib, le fief de l’autre groupe takfiriste Hayat Tahrir al-Cham (ex al-Nosra et Fatah al-Cham, la filiale d’Al-Qaida en Syrie). Des efforts militaires qui s’ajoutent donc aux efforts diplomatiques d’Astana, lesquels reprendront dans les prochains jours, pour avancer vers la fin du conflit syrien, qui a été imposé par le néocolonialisme occidental s’appuyant une fois encore sur des extrémistes déclarés.
Par Mikhail Gamandiy-Egorov
Source: Sputnik