Au moins 71 policiers et rebelles ont été tués vendredi dans l’ouest de la Birmanie après des attaques que des musulmans rohingyas auraient commis contre plusieurs postes frontières, des violences sans précédent depuis des mois, selon les autorités birmanes.
Selon le dernier décompte publié par le gouvernement de la Prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi, 12 membres des forces de l’ordre et 59 « terroristes » rohingyas ont été tués.
« Militaires et policiers se battent ensemble contre les terroristes bengalis », avait déclaré un peu plus tôt le chef de l’armée, le général Min Aung Hlaing, sur sa page Facebook.
Les Rohingyas sont considérés comme des immigrés du Bangladesh voisin et appelés à ce titre « bengalis », le terme « rohingya » étant tabou en Birmanie, pays à majorité bouddhiste marqué par l’influence de moines radicaux qui dénoncent les musulmans comme une menace.
Il s’agit de l’épisode de violences le plus meurtrier depuis plusieurs mois dans cette région, l’Etat Rakhine, marquée par de fortes tensions entre musulmans et bouddhistes.
Y vivent des dizaines de milliers de Rohingyas, minorité musulmane victime de fortes discriminations en Birmanie, sans accès aux hôpitaux, aux écoles, au marché du travail.
Plus de 20 postes de police ont été attaqués par quelque 150 rebelles rohingyas tôt vendredi, a annoncé, avant l’armée, le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi.
Les combats se poursuivent
Le chef de l’armée birmane a souligné le fait que « les combats se poursuivaient » vendredi dans cette région frontalière du Bangladesh, notamment autour des postes de police des villages de Kyar Gaung Taung et Nat Chaung.
Des armes ont été dérobées dans plusieurs postes de police par les attaquants, équipés de poignards et autres objets contondants, a-t-il précisé.
Le mode opératoire ressemble à celui de la précédente série d’attaques meurtrières contre des postes frontières, en octobre 2016.
Ces affrontements avaient été suivis par la fuite au Bangladesh voisin de milliers de Rohingyas, qui avaient livré des récits des atrocités commises par l’armée après ces attaques: viols en réunion, tortures, meurtres et massacres.
Plusieurs des postes de police attaqués vendredi, à la frontière avec le Bangladesh, restaient encerclés vendredi dans la journée, selon des sources policières sur place interrogées par l’AFP.
« La situation est compliquée… Les militaires arrivent » en renfort, a témoigné vendredi matin un responsable policier de Buthidaung, non loin de la zone la plus touchée.
Le gouvernement birman a relevé vendredi « la coïncidence de ces attaques avec la publication du rapport final de la commission » dirigée par l’ancien secrétaire général de l’ONU Kofi Annan sur la situation dans l’Etat Rakhine.
La commission avait appelé jeudi la Birmanie à donner plus de droits à sa minorité musulmane des Rohingyas, notamment de mouvement, faute de quoi elle risquait de « se radicaliser ».
Kofi Annan a réagi aux attaques de vendredi, « inquiétante escalade dans la violence ». Il a appelé les forces de l’ordre à « la retenue » dans leur gestion de la crise.
Les dernières importantes attaques meurtrières contre des postes de police remontent à l’automne 2016. Elles avaient été suivies par un durcissement des actions de l’armée dans la région, avec incendies de villages et fuite massive de Rohingyas vers le Bangladesh voisin.
La nébuleuse des groupes rohingyas impliqués dans les violences n’est pas très claire. Se détache un groupe, l’Arakan Rohingya Salvation Army (ARSA), qui assure mener l’insurrection depuis les montagnes de la zone de May Yu, dans le nord de l’Etat Rakhine.
La situation est particulièrement difficile pour les 120.000 musulmans vivant dans des camps de déplacés en Etat Rakhine, d’où ils ne peuvent sortir qu’au compte-gouttes, sur laisser-passer.
Source: AFP