Le Sénat américain a approuvé mardi à une large majorité une mesure controversée censée permettre aux autorités publiques de rompre tout lien financier avec des entreprises boycottant ‘Israël’, mais l’adoption de cette loi à la chambre basse, à majorité démocrate, reste incertaine.
Présenté par le sénateur républicain Marco Rubio, ce texte vise à « combattre » le mouvement mondial BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) appelant au boycott économique, culturel ou scientifique d’Israël pour dénoncer l’occupation israélienne des territoires palestiniens.
Il permettrait à « un Etat ou un gouvernement local d’adopter des mesures pour désinvestir leurs actifs du capital d’entités utilisant des boycotts, désinvestissements ou des sanctions pour influencer les politiques d’Israël ».
Ce texte entre dans le cadre d’un projet de loi plus large sur la « sécurité au Proche-Orient » qui a été voté au Sénat par 77 voix pour et 23 contre.
Il autorise en outre « une assistance et des transferts d’armes à Israël », élargit la coopération militaire avec la Jordanie et inclut de nouvelles sanctions contre la Syrie.
Il critique également le « retrait précipité » des troupes américaines de Syrie et d’Afghanistan, en contradiction directe avec la décision annoncée en décembre par le président Donald Trump.
Les quatre sénateurs démocrates candidats à la présidentielle de 2020, Elizabeth Warren, Kirsten Gillibrand, Cory Booker et Kamala Harris, ont voté contre le texte.
Le projet de loi doit désormais être soumis à la Chambre des représentants, où certains démocrates s’y opposent en citant le droit au boycott, qui fait partie de la liberté d’expression protégée par la Constitution.
Parmi eux figurent les deux premières musulmanes élues en novembre: l’Américano-palestinienne Rashida Tlaib et Ilhan Omar, ancienne réfugiée d’origine somalienne, qui soutiennent le mouvement BDS.
Certains parlementaires les accusent, dans des termes parfois très virulents, d’ ‘antisémitisme’.
Droit au Boycott
La puissante organisation américaine de défense des droits civiques ACLU a critiqué l’adoption de ce texte, qui rappelle selon elle l’ère du « maccarthysme », la campagne lancée dans les années 1950 contre toute personne soupçonnée d’être militante ou sympathisante communiste.
« L’ACLU ne prend pas position sur les boycotts contre Israël ou tout autre pays étranger, mais nous défendons depuis longtemps le droit au boycott », avaient souligné fin janvier dans un article deux avocats de l’organisation.
Or, ce texte « encouragerait les Etats (américains) à mettre en oeuvre des lois qui violent ce droit fondamental ».
L’organisation libérale juive J-Street, pourtant opposée au mouvement BDS, a également dénoncé le texte, qui « ne fait rien pour aider Israël ou pour lutter efficacement contre » la campagne de boycott tout en menaçant les droits des Américains.
Le boycott a notamment été utilisé par le mouvement des droits civiques dans les années 1960.
Ce type de mesure est déjà en vigueur dans plusieurs Etats américains, où les entreprises sous contrat avec le gouvernement doivent stipuler par écrit qu’elles ne participent pas à la campagne de boycott d’Israël. Mais ces lois sont contestées en justice, au nom de la liberté d’expression.
Source: Avec AFP