Le nom de l’ancien journaliste, Jamal Khashoggi, assassiné à Istanbul par les services spéciaux saoudiens, a été proposé à la Mairie de Paris pour baptiser une rue de la capitale. Une initiative qui serait loin d’être spontanée.
Bientôt une rue Jamal Khashoggi à Paris? Six mois après sa mort, la mairie de Paris envisagerait de baptiser une rue de la capitale du nom de l’ancien journaliste et opposant, assassiné par un commando saoudien le 2 octobre 2018 dans le consulat saoudien d’Istanbul. Une initiative de la part de l’équipe Hidalgo qui représenterait à ses yeux un signal fort de soutien aux droits de l’Homme, régulièrement bafoués dans la péninsule Arabique.
Toutefois, l’idée ne serait pas venue d’elle-même aux édiles parisiens. Selon nos informations, c’est le Qatar qui pousserait pour qu’une rue de Paris soit baptisée du nom de Jamal Khashoggi. Le média Intelligence Online en parlait dès le 17 avril au soir. Une idée qui pourrait même faire prochainement l’objet d’une tribune dans Libération.
Un tweet du 18 avril de Romain Caillet, islamologue et consultant, spécialiste de la mouvance djihadiste mondiale, généralement bien informé, fait référence à l’action dans ce sens de Jean-Pierre Duthion, lobbyiste proche du Qatar:
Sollicité par Sputnik, Jean-Pierre Duthion n’a pas souhaité faire de commentaire à ce sujet. Il est toutefois intéressant de relever que Jamal Khashoggi a été membre des Frères musulmans*, un mouvement islamiste soutenu par le Qatar et considéré comme terroriste par l’Égypte, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, la Russie, la Syrie et Bahreïn.
Si elle était avérée, cette action de lobbying s’inscrirait donc logiquement dans la guerre d’influence que se livrent le Qatar et l’Arabie Saoudite, notamment depuis l’embargo imposé par Ryad en juin 2017 à Doha. Une hypothèse que Romain Caillet juge tout à fait crédible:
«Il y a du lobbying intense qui se fait des deux côtés […] dans le cadre d’une lutte d’influence entre les pays du Golfe et chacun pousse soit à trouver de nouvelles affaires sur l’adversaire soit à faire briller ses casseroles […] Le Qatar se défend et essaie d’insister sur les casseroles de l’Arabie saoudite. De la même manière, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis font de même avec le Qatar […] Il y a un enjeu en Occident, c’est à celui qui va essayer de plus salir la réputation de l’adversaire», détaille Romain Caillet au micro de Sputnik France.
Une lutte d’influence qui s’étendrait donc jusque dans les rues du XVIIIe, XIXe ou XXe arrondissement, des quartiers populaires de la capitale envisagés pour accueillir cette rue Jamal Khashoggi. Sputnik France a contacté le service presse de la Mairie de Paris. Ce dernier n’avait pas donné suite à nos demandes de réaction au moment de la publication de cet article.
En France, depuis le quinquennat de Nicolas Sarkozy et l’achat du Paris Saint-Germain, le petit émirat gazier ne ménage pas sa peine afin d’étendre son influence à coups de pétrodollars au détriment de l’Arabie saoudite. Dernier exemple en date, les fontaines du rond-point des Champs-Élysées dont le coût de 6,3 millions d’euros a été financé en partie par Doha.
Source: Sputnik