Dans une interview pour l’agence russe Sputnik, le président du Parti panafricain du Niger, Oumarou Abdourahamane, a émis l’espoir que son pays travaille avec la Russie pour la réalisation de projets communs mutuellement bénéfiques pour développer ses gisements d’uranium et de pétrole.
« Nous avons de l’uranium, du pétrole et beaucoup d’autres choses dans le pays, mais nous devons voir comment travailler et comment les développer et les partager parce que nous avions d’anciens partenaires avant et les échanges [avec eux- ndlr] n’étaient pas très bons, donc l’Afrique doit maintenant travailler avec la Russie parce qu’elle est sérieuse et nous aidera à partager tout ce que nous faisons ensemble », a-t-il indiqué. Abdurahamane a également souhaité que le renforcement des relations entre la Russie et l’Afrique serait profitable mutuellement aux peuples africain et russe.
Pays si riche si pauvre
En plus de l’uranium et du pétrole, le Niger possèdent des mines d’or, de fer, et de charbon.
En dépit de ses richesses, le Niger est l’un des plus pauvres de la planète : 63 % de personnes vivant sous le seuil de la pauvreté, 16 % de son PNB provenant de l’aide internationale. (Chiffres 2007).
Selon la banque mondiale, le niveau d’extrême pauvreté, s’élève à 41,8 % en 2021, touche plus de 10 millions de personnes.
Force est de constater que certaines études attribuent cette pauvreté extrême au fait que le Niger est un pays agricole, aux dérèglements climatiques ou autres, ignorant ses richesses en ressources minières et les raisons réelles pour lesquelles elles n’ont pas contribué à son développement.
Le groupe Orano, au nom de la France
Concernant l’uranium nigérien dont il est beaucoup question depuis le coup d’état qui a renversé le président Mohamad Bazoum, nul doute que c’est la France qui en est le principal bénéficiaire.
Les médias français s’efforcent d’occulter ce fait, en avançant que le Niger n’est que son troisième fournisseur d’uranium, contribuant pour seulement 19% de ses approvisionnements entre 2005 et 2020, derrière le Kazakhstan et l’Australie, (selon le comité technique Euratom).
Mais ce pays constitue l’un des partenaires majeurs de l’Hexagone dans le Sahel pour la simple raison que ses importantes réserves d’uranium sont exploitées depuis un demi-siècle par le groupe Orano (ex-AREVA), détenu à hauteur de 45 % par l’État français.
Au total, la France a importé l’année dernière environ 21 000 tonnes d’uranium, selon les données des Douanes. Alors que la consommation annuelle du parc de 56 réacteurs EDF varie entre 7 à 9 000 tonnes.
La majorité des imports est donc liée aux matières possédées par les clients d’Orano dans le cadre des services de conversion ou d’enrichissement, ou de Framatome pour de la fabrication de combustible. Une petite part est aussi liée l’augmentation des stocks stratégiques du pays.
Le plus grand gisement du monde
Orano Areva exploite déjà deux mines d’uranium dans le nord nigérien et envisage d’en exploiter une troisième dans l’avenir :
*la Somaïr (Société des mines de l’Aïr) La première va poursuivre ses activités jusqu’en 2040 tandis
* Cominak (compagnie des mines d’Akokan), qui a fermé en 2021 mais fait l’objet d’un vaste projet de réaménagement.
* Orano mène des études en vue d’exploiter le site d’Imouraren, l’un des plus grands gisements d’uranium au monde, également dans le nord du Niger, dont les réserves ont été estimées à environ 200.000 tonnes et qui n’a jamais produit depuis son rachat en 2009.
Secret des contrats, avantages fiscaux
Dans une note d’information datant de 2013 sur les accords miniers entre AREVA et le Niger, Oxfam et ROTAB, tous deux membres de la coalition « Publiez ce que vous payez », ont dénoncé le secret et la pression entourant les négociations sur les contrats d’extraction d’uranium nigérien.
Les organisations ont également dénoncé un régime fiscal plus accommodant pour la multinationale qui exploite l’uranium nigérien depuis 50 ans, représentant près de 40% de son approvisionnement mondial.
Elles reprochent aux deux filiales d’AREVA, Somaïr et Cominak, de bénéficier de nombreux avantages fiscaux : exonérations de droits, de TVA et même de taxes sur les carburants, qu’elles utilisent massivement.
Une « provision pour la reconstruction des mines » leur permet également de mettre de côté 20% de leurs bénéfices qui sont donc exclus de l’impôt sur les sociétés.
13% des exportations et 5,8 du PIB
A titre d’exemple illustrant le déséquilibre flagrant en faveur de la société française, Oxfam et ROTAB rapportent qu’en 2010, les deux filiales ont extrait un total de 114 346 tonnes métriques d’uranium au Niger, représentant une valeur d’exportation de 2300 milliards de francs CFA. Sur cette somme, le Niger n’a été payé que 300 milliards de francs CFA, soit 13% de la valeur exportée.
Il est extrêmement difficile d’accéder aux chiffres sur l’extraction de l’uranium au Niger et sur la taxation des activités locales d’Areva. Areva affirme que 70% de la valeur de l’uranium revient au gouvernement nigérien. Mais le gouvernement nigérian et la société civile nigériane jugent le partenariat déséquilibré : l’uranium représentait 70,8% des exportations du pays en 2010, et seulement 5,8% du PIB », avait déploré Anne-Sophie Simpere, d’Oxfam France.
Ces chiffres qui en disent long sur les causes réelles de la pauvreté du peuple de ce pays devraient guider la Russie sur laquelle les espoirs misent pour l’en affranchir. En dépend certainement son influence dans le continent africain tant que les Africains refuseront de se laisser berner encore une fois.
Source: Médias