Le nouveau gouvernement français dirigé par François Bayrou ne reprendra pas les propositions d’interdiction du voile pour les accompagnatrices de sorties scolaires et les étudiantes à l’université formulées par son ministre de l’Intérieur, a indiqué mercredi sa porte-parole, selon l’AFP.
Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau (parti Les Républicains, droite) a lui-même précisé qu’il « s’agissait de sa position personnelle et que ce sujet, n’ayant probablement pas une majorité au Parlement, n’était pas un sujet qui serait abordé par le gouvernement dans l’état actuel de la majorité parlementaire », a relevé la porte-parole du gouvernement Sophie Primas, lors d’un compte-rendu du Conseil des ministres.
Bruno Retailleau a estimé lundi dans le quotidien français Le Parisien que « les accompagnatrices (de sortie scolaire) n’ont pas à être voilées », estimant que le voile est « un étendard pour l’islamisme, et un marqueur de l’infériorisation de la femme par rapport à l’homme ».
« Les sorties scolaires, c’est l’école hors les murs », a-t-il martelé en appelant à changer la loi. Il s’est aussi prononcé pour l’interdiction du port du voile à l’université, s’attirant dans les deux cas de vives critiques à gauche de l’échiquier politique.
Bruno Retailleau veut « interdire aux femmes musulmanes qui portent (le voile) de faire des études supérieures », « soit exactement ce qu’on reproche à juste titre aux talibans », a déclaré le député (LFI, gauche radicale) Antoine Léaument.
Benjamin Lucas, député écologiste des Yvelines, a aussi vivement critiqué les déclarations de Retailleau. Dans une lettre ouverte adressée au Premier ministre François Bayrou, Lucas accuse le ministre d’être un « véritable mégaphone des éléments de langage de l’extrême droite ». Benjamin Lucas déplore une remise en cause directe de la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État, qu’il décrit comme « un trésor national ».
L’ancien rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité, Nicolas Cadène, avait également réagi en rappelant que les accompagnateurs scolaires et les étudiants ne sont pas soumis à la loi de 2004 sur les signes religieux dans les écoles publiques. Selon lui, étendre cette loi serait « un mauvais coup porté à la laïcité », risquant d’alimenter les tensions communautaires.
En octobre 2024, après une interdiction du hijab dans le sport en France, trois rapporteurs spéciaux et le groupe de travail des Nations unies sur la discrimination à l’égard des femmes et des filles ont déclaré que « la neutralité et la laïcité de l’Etat ne sont pas des motifs légitimes d’imposition de restrictions des droits à la liberté d’expression et à la liberté de religion ou de conviction ».
« Les filles et femmes musulmanes qui portent le hijab doivent avoir des droits égaux de participer à la vie culturelle et sportive, et de prendre part à tous les aspects de la société française, dont elles font partie », ont affirmé les experts de l’ONU, qui sont mandatés par le Conseil des droits de l’homme mais ne s’expriment pas au nom de l’organisation.
Une étude réalisée en mai 2024 par le quotidien français Le Figaro a conclu qu’en une décennie, de 2009 à 2020, la proportion de femmes musulmanes portant le voile islamique a augmenté de 50%.
En 2022, la France avait été accusée par le comité des droits de l’homme de l’ONU de violer le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, après avoir interdit du port de voile à une femme lors d’une formation continue organisée dans un lycée en France.
Source: Divers