Le président syrien par intérim, Ahmed al-Charaa, a de nouveau évoqué la conclusion d’un accord avec Israël tout en excluant pour le moment l’éventualité d’une normalisation. Ce qui soulève question de savoir quand le moment serait propice pour le faire.
Dans une interview accordée aux médias turcs, al-Charaa a déclaré que la Syrie était « très proche » de parvenir à un accord dans les prochains jours, grâce à la médiation américaine, affirmant qu’il serait similaire à celui de 1974 . Et de répéter que « l’accord avec Israël ne signifie en aucun cas la normalisation des relations ni l’adhésion de la Syrie aux accords d’Abraham ».
Qualifiant l’attaque contre le ministère syrien de la Défense par Israël de déclaration de guerre, il a estimé que l’accord de sécurité avec Israël est « inévitable.» Ce qui illustre qu’il admet que l’équilibre des foces n’est pas en sa faveur et qu’il n’a pas beaucoup le choix.
Ce n’est pas la première fois qu’al-Charaa rend compte d’un accord sécuritaire avec l’entité sioniste tout en rejetant la normalisation en disant que c’est n’est pas le moment.
Il y a quelques jours, il avait indiqué que « les négociations de sécurité avec Israël pourraient aboutir à des résultats dans les prochains jours », soulignant que le succès de l’accord de sécurité pourrait conduire à d’autres accords. Et d’arguer que « la paix et la normalisation ne sont pas à l’ordre du jour actuellement. »
Or le Premier ministre israélien a véhiculé dimanche une déclaration qui contredit les propos du président syrien intérimaire. Tout en confirmant qu’il y a eu des progrès dans les contacts avec les Syriens, Benjamin Netanyahu estime que la question est encore loin d’être réalisée, tout en évoquant la possibilité d’une normalisation entre Israël et la Syrie. Reste à savoir s’il s’agit d’une contradiction bien calculée de sa part ou d’une condition sine qa non à l’accord.
La chaîne israélienne Channel 13 a rapporté dimanche qu’un accord avait été trouvé sur la plupart des points ou clauses de l’accord de sécurité en cours d’élaboration avec la Syrie, soulignant que le principal point de désaccord concerne la liberté d’action de l’armée de l’air israélienne dans l’espace aérien syrien.
Selon l’analyste militaire de la chaine, Alon Ben-David, Ahmad al-Charaa, a accepté la démilitarisation des zones du sud-ouest de la Syrie, en échange de quoi Benjamin Netanyahu a accepté de se retirer de la plupart des points conquis en territoire syrien, à l’exception du sommet de Jabal al-Cheikh (mont Hermon).
Cependant, rapporte-t-il, le désaccord réside dans le fait que les Syriens exigent un engagement israélien à respecter la souveraineté aérienne syrienne. Ce que refusent catégoriquement les Israéliens selon lesquels « sans liberté d’action pour l’armée de l’air israélienne, qui utilise l’espace aérien syrien comme corridor vers l’Iran, il n’y aura pas d’accord. »
Faisant face à une supériorité militaire israélienne incontestable, en raison de la destruction du potentiel militaire syrien après la chute de Bachar al-Assad, le retrait des Iraniens et le repli des Russes, le président syrien intérimaire n’a pas l’embarras du choix.
Privée de toute dissuasion et mettant tous ses œufs dans le panier des Américains, les parrains inconditionnels d’Israël, s’alliant à des pays arabes qui prônent la normalisation, il a laissé à ce dernier la liberté d’imposer un fait accompli, en violant non seulement son espace aérien mais son territoire aussi, sans aucune résistance.
Israël qui contrôle pas moins de 600 km2 du sud syrien et rallie à ses côtés les communautés druze de Soueïda et kurde de Deir Ezzor, a la main haute dans ce pays, pour y imposer ses conditions sans être contrarié.
Mais, les déclarations de Premier ministre israélien dont les fourberies ne manquent pas à son sac semblent donner la fausse impression que les dirigeants syriens ont les moyens d’imposer leur choix.
Parmi tous ceux qui ont finalisé la normalisation avec l’entité sioniste, depuis l’Egypte, en passant par la Jordanie, les Emirats arabes unis, le Bahreïn, le Maroc et le Soudan, le cas syrien est certes le plus humiliant.
Admettant que la normalisation avant le génocide à Gaza n’est pas la normalisation après, elle serait difficilement admise par le peuple syrien qui voit ses frères palestiniens exterminés. Des manifestations sont organisées dans certaines régions. Dès lors, c’est lui qu’il faut persuader, et par tous les moyens. Aussi bien par les frappes que la Syrie ne peut repousser, que par d’autres moyens qui ne montrent pas les dirigeants syriens si impuissants.
Sadate avait suivi une tactique bien rôdée avec le peuple égyptien afin de neutraliser toute contestation lorsqu’il a entrepris les relations avec l’entité sioniste. Il était guidé étape par étape par le stratège américain Henry Kissinger. Sachant qu’il avait entamé le processus en vainqueur présumé de la guerre de 1973, al-Charaa l’entame avec une impuissance flagrante à défendre un pays dépecé.
Le montrer en vainqueur est primordial pour la finalisation de la normalisation. Les leçons de Kissinger sont toujours de vigueur.
Source: Divers